Immigration : la CAQ va annoncer une nouvelle cible, l’opposition réclame un débat
Québec va aussi annoncer de nouvelles exigences sur la connaissance du français pour les immigrants.

Une annonce devrait être faite d'ici quelques semaines, a indiqué le premier ministre François Legault.
Photo : Radio-Canada / Sylvain Roussel
Le dossier de l’immigration est revenu sur le devant de la scène politique mardi, à la lumière de nouvelles données de Statistique Canada révélant une explosion de l’immigration temporaire au Canada et au Québec. Le premier ministre François Legault promet de réviser le seuil annuel de 50 000 immigrants permanents, alors que les partis d’opposition réclament un débat.
En mêlée de presse à l’Assemblée nationale, le premier ministre François Legault s’est dit préoccupé
par le nombre important d’immigrants temporaires qui se trouvent au Québec. Il a affirmé qu’il compte réclamer à Ottawa plus de pouvoirs en matière d’immigration pour arrêter le déclin du français
au Québec.
Au 1er janvier, le Québec accueillait 346 000 personnes non résidentes permanentes, selon les dernières données de Statistique Canada. Au total, le Canada compte environ 1,8 million d’immigrants temporaires, soit une augmentation de près de 608 000 en un an.
Je suis préoccupé. [...] On va, d’ici quelques semaines, faire une annonce concernant les seuils. Ce qui est surtout important, c’est qu’on exige la connaissance du français pour les immigrants.
Ainsi, M. Legault affirme avoir demandé à différents ministres concernés de regarder ce qu’on peut faire avec les travailleurs temporaires pour protéger le français
. Ce qui est important, là, c’est d’agir à court terme
, a-t-il répété à plusieurs reprises.
Plus d'exigences en français
Il a par ailleurs assuré que la ministre de l’Immigration, Christine Fréchette, allait bientôt
annoncer pour la première fois dans l’histoire du Québec [...] des exigences concernant la connaissance du français
pour l'immigration économique, qui est essentiellement gérée par la province. Les immigrants temporaires qui souhaitent devenir permanents devront ainsi respecter ces exigences, a-t-il ajouté.
Les temporaires, il y en a beaucoup et on doit se poser des questions sur ce qu’on fait pour protéger le français. Pas seulement pour les permanents, mais pour les temporaires
, a-t-il ajouté.
Ce n’est pas la première fois que le gouvernement caquiste évoque le souhait de sélectionner une immigration 100 % francophone d’ici 2026. En novembre, M. Legault avait affirmé que le redressement de la langue française au Québec se ferait grâce aux compétences linguistiques des immigrants, qui sont actuellement francophones à environ 80 %, dans la catégorie de l'immigration économique.
Mardi, le premier ministre s’en est pris aux gouvernements précédents, notamment ceux issus du Parti québécois (PQ) et du Parti libéral du Québec (PLQ), les accusant de ne pas avoir utilisé tous les pouvoirs
à leur disposition pour exiger la connaissance du français
de la part des immigrants économiques.
On a aussi des pouvoirs concernant l’immigration temporaire que les gouvernements libéraux et péquistes n’ont pas utilisés, et on va faire des demandes à Ottawa pour avoir tous les pouvoirs
, a dit M. Legault sans donner plus de précisions sur les types de pouvoirs auxquels il fait référence.
Le Québec doit faire ses choix et le Québec va prendre des mesures à court terme pour arrêter le déclin du français [...] Je suis convaincu qu’on va y arriver, on ne peut pas parler d’une disparition du français.
« Grand mensonge caquiste »
De son côté, le PLQ a accusé le premier ministre de mentir
sur les chiffres réels
de l’immigration au Québec, et a appelé le gouvernement caquiste à un débat sur le portrait réel de notre capacité d’accueil
.
En mêlée de presse au Parlement, le chef intérimaire libéral Marc Tanguay a affirmé que son parti envisageait de réviser la cible de 70 000 immigrants permanents par an qu'il avait défendue en campagne électorale, mais refuse de dire si ce sera à la hausse ou à la baisse.

Le chef de l'opposition officielle à Québec, Marc Tanguay
Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel
Il est clair que les chiffres [sur le seuil d'immigration permanente] doivent être révisés à la lumière de la nouvelle réalité, a déclaré M. Tanguay. Est-ce que c'est 70 000? Est-ce que c'est plus? Est-ce que c'est moins?
C'est un grand mensonge caquiste
que de faire une fixation sur un seuil d'immigration permanente à 50 000 − comme le prône le gouvernement Legault − sans tenir compte de l'immigration temporaire qui explose bien au-delà de la capacité d'accueil du Québec, a fait valoir pour sa part le député libéral Monsef Derraji en demandant l’ouverture d’un débat sur le sujet.
François Legault essaie de dire aux Québécois qu'il contrôle la porte de la maison, mais la porte du garage est grande ouverte. [...] Je ne veux plus qu'on parle [du seuil de] 50 000, je veux qu'on parle de 300 000, parce [que les immigrants temporaires] viennent ici, s'installent ici et utilisent nos services.
« Pas bon pour le Québec »
Pour sa part, le chef du Parti québécois Paul St-Pierre Plamondon s’est dit inquiet de la perspective que le gouvernement fédéral impose
ses exigences en matière d’immigration au Québec, ce qui placerait la CAQ dans un dilemme
, selon lui.
La langue française et la culture québécoise sont définitivement menacées. [...] Donc, imaginez si on augmente substantiellement les seuils d'immigration de manière unilatérale à Ottawa. Imaginez les effets sur la langue, la culture, mais également sur le logement, parce que nous sommes déjà en crise [...]. Il y a beaucoup d'enjeux
, a dit le chef du PQ.
Pour les solidaires, il est devenu évident que le modèle caquiste ne fonctionne pas
, a dit mardi le député Guillaume Cliche-Rivard, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière d’immigration, de francisation et d’intégration.
Il a également affirmé avoir demandé au gouvernement d’aborder la question de l'immigration temporaire lors de la consultation pluriannuelle, qui doit définir les orientations de Québec en matière d'immigration entre 2024 et 2027.
Le fait de maintenir nos immigrants dans la précarité d'un statut temporaire sans leur offrir, pour plusieurs, de voie réelle permettant d'obtenir la résidence permanente, ce n'est pas bon pour le Québec.
À notre avis, il ne fait aucun sens de débattre de seuils d'immigration sans inclure nos immigrants temporaires dans nos cibles, dans nos programmes
, a-t-il encore affirmé.
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