Culture syndicale forte et climat de travail difficile à Sayabec

Les relations tendues entre les employés et la direction de la Municipalité durent depuis plusieurs années. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada
Un rapport présenté aux élus de Sayabec en 2020 attribuait plusieurs problèmes organisationnels que vivait la Municipalité à sa culture syndicale. Trois ans plus tard, le climat tendu entre les employés et l'administration perdure.
Ce rapport d'une quarantaine de pages, commandé par le conseil municipal, est une mise à jour d'un diagnostic organisationnel réalisé en 2015 par la firme Malette.
Ce premier document d'une centaine de pages faisait déjà état, il y a huit ans, d'un climat de méfiance entre les différents services de la Municipalité, de relations de travail tendues et de comportements inadéquats.
Le dépôt en août 2020 de l'actualisation du rapport de 2015 n'a pas réglé la situation.
La Municipalité de Sayabec fait toujours face en 2023 à un climat de travail difficile. Début mai, des syndiqués dénonçaient un climat de travail malsain et du harcèlement tandis que les élus et la directrice générale, Chimène Ngomanda, déploraient une vague de dénigrement et de diffamation teintée de racisme.

Chimène Ngomanda, directrice générale de Sayabec, raconte avoir reçu des insultes en raison de sa couleur de peau. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada
Davantage d’encadrement nécessaire
Une des principales conclusions du rapport de 2020 est qu'un recadrage du syndicat dans les limites de son rôle était, à l’époque, nécessaire.
On peut lire dans les constats que les employés n'avaient pas l'habitude d'être évalués, ce qui a affecté le rendement de certains d’entre eux. Un climat de laxisme s’était alors installé chez certains membres du personnel.
Les auteurs du rapport de 2020 observent qu'une culture organisationnelle de syndicalisme
, où le président du syndicat jouait un rôle très actif, semblait très présente parmi les employés, ce qui compromettait leur motivation et leur engagement.
Le rapport relève que la partie syndicale avait toujours eu un grand pouvoir décisionnel, à tel point que la direction devait même, selon les constats de la firme Malette, regagner une partie de son droit de gestion
.
Un encadrement plus soutenu doit être mis en place auprès des employés qui manquent de civilité, qui font de l'insubordination ou qui manquent à leurs rôles et responsabilités
, peut-on lire.
Pour les auteurs, une plus grande fermeté était nécessaire afin de redresser les comportements et les rendements nuisibles à la performance de la Municipalité.
Insubordination
Le rapport critique la décision, à l'époque, d’attribuer la responsabilité de chef d’équipe au représentant syndical à la suite du départ de la direction des travaux publics.
Or, celui-ci ne répondait pas aux attentes en termes d’attitude et de comportements attendus [...] et aurait dû faire l’objet d’une intervention formelle
.
Cet employé, d'après le document, serait devenu un leader négatif en contournant l’autorité et en montant ses collègues contre l’employeur.
Des épisodes de manque de respect auraient aussi été notés parmi le personnel envers la direction générale et entre employés.
L'attitude négative, la rigidité et la fermeture de certains employés sont une cause importante contribuant grandement à la détérioration de la performance et du climat de travail au sein de la Municipalité
, peut-on lire.
Le rapport souligne que le syndicat indiquait aussi percevoir un manque de respect du côté de l’employeur.
Les directions générales précédentes critiquées
Selon le document, d'anciennes directions générales auraient été responsables de l'installation d'un climat de travail difficile.
L'ancienne direction faisait du clivage entre le conseil municipal et les employés ce qui, selon nos consultations, a contribué à forger un climat de suspicion et de méfiance des employés envers l'appareil municipal
, peut-on lire.
Une approche de laisser-aller de la part des anciennes directions générales, avec peu de mécanismes de contrôle et une grande marge de manœuvre de la part des employés auraient aussi participé à la mise en place de la culture organisationnelle prévalente au sein de la Municipalité.
Par ailleurs, le rapport vante la rigueur de l'actuelle directrice générale, Chimène Ngomanda, alors directrice générale par intérim, pour faire respecter ses directives et intervenir avec fermeté auprès des employés en situation de sous-performance.
Des recommandations difficiles à mettre en place
Le rapport de 2020 fournit de nombreuses recommandations à la Municipalité. Or, d'après la directrice générale, la résistance de la part de certains employés rend difficile l'application de plusieurs d'entre elles.
Elle donne en exemple la mise en place de rencontres hebdomadaires avec les employés afin d'effectuer un suivi des tâches. En fonction du département municipal, cette initiative de la directrice générale n'est pas toujours suivie.
Tout le monde ne veut pas forcément qu'on suive son travail, qu'on lui demande pourquoi telle chose n'a pas été faite. Certains employés répondent qu'ils savent ce qu'ils ont à faire, que ce n'est pas à moi de leur dire quoi faire
, raconte-t-elle.
Les recommandations ne sont pas toujours les bienvenues.
Nathalie Courchesne, la représentante du Syndicat canadien de la fonction publique, auquel est affilié le Syndicat des employés de la Municipalité de Sayabec, a refusé nos demandes d’entrevue.
Par écrit, la conseillère syndicale indique qu’il lui est difficile de commenter un rapport de 2015. Elle signale que plusieurs employés ont quitté la municipalité depuis.
Mme Courchesne estime que la violence en milieu de travail est toujours présente. Elle en veut pour preuve le fait que le maire de Sayabec, Marcel Belzile, admette que le ton a monté
.
Pour ma part, je me questionne à savoir à combien de décibels ça prend quand nous haussons le ton pour confirmer que c’est crier
, écrit la conseillère syndicale dans sa réponse.
Elle a toutefois transmis à Radio-Canada un rapport de médiation de 2021 visant à améliorer les relations de travail entre l'employeur et le syndicat.
Selon ce document, les parties avaient alors convenu d’entretenir des relations de travail respectueuses, positives et plus humaines.
Les deux parties sont actuellement en renégociation de convention collective.