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La Saskatchewan au sommet des disparitions de mineurs au Canada, selon le fédéral

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Plus du quart des jeunes disparus au Canada en 2022 étaient autochtones, et 60 % d’entre eux étaient des femmes.

Photo : Radio-Canada / Rob Kruk

La Saskatchewan occupe le sommet d’un triste palmarès en devenant la province comptant le plus haut taux d’enfants et d’adolescents disparus par habitant au Canada.

En 2022, plus de 30 000 mineurs ont été signalés comme disparus au pays. Et de ce nombre, un cas sur six provient de la Saskatchewan, selon les données du gouvernement (Nouvelle fenêtre).

La Saskatchewan, qui a un taux de 398 cas pour 100 000 habitants, est suivie du Manitoba, avec 291 cas pour 100 000 habitants, selon le gouvernement fédéral. L'Île-du-Prince-Édouard et le Nunavut avaient les taux les plus bas, soit 3 cas pour 100 000 habitants.

Cette triste réalité, le sergent Josh Potter, du Service de police de Regina, avec ses 20 années d’expérience derrière le gilet pare-balles, connaît bien.

Radio-Canada a pu le suivre dans ses fonctions durant une journée. Et les chiffres reflètent la réalité sur le terrain.

En cette journée du 1er mai 2023, un code 931 apparaît sur l’écran : il s'agit d'un enfant de 13 ans, fort probablement en fugue, et les autorités craignent pour sa sécurité.

Le sergent Josh Potter dans son véhicule de patrouille à Regina la 1er mai 2023.

Le sergent Josh Potter suit régulièrement les cas d'enfants disparus à Regina.

Photo : Radio-Canada / Laurence Taschereau

Durant une journée normale, la police de Regina reçoit en moyenne six appels pour des personnes disparues par jour.

Les raisons qui amènent à classer un cas dans la catégorie des personnes disparues sont diverses. On passe d’un cas de fugue pour les jeunes, à l'enfant de 4 ans qui poursuit un chat dans la ruelle, jusqu'à un patient confus atteint de la maladie d'Alzheimer, explique le sergent.

Dans 99 % des cas, les personnes sont retrouvées, selon le Service de police de Regina.

Il n’en demeure pas moins que la problématique reflète des questions de société à prendre au sérieux, selon le président de la Fédération de la police de la Saskatchewan, le sergent Casey Ward.

Il y a aussi les problèmes de santé mentale et de dépendances… et ce sont des choses avec lesquelles nous devons lutter dans la province, explique-t-il. Et il y a les fugueurs chroniques.

Mineurs en fugue

Pour les deux policiers, il est difficile de mettre le doigt sur une cause unique qui pourrait expliquer le triste palmarès de la province quant aux nombres d’enfants et d’adolescents disparus.

Toutefois, les fugues des jeunes contribuent à faire grimper les statistiques.

Plusieurs appels proviennent donc de centres jeunesse. Si les jeunes ne se présentent pas à la fin de la journée, on nous signale leur disparition, explique le sergent Potter.

La vice-cheffe de la Fédération des nations autochtones souveraines (FSIN), Aly Bear, dit que cela s'explique en partie par le placement encore trop élevé de jeunes Autochtones par les services sociaux.

Aly Bear, vêtue d'une coiffe de chef et d'un complet veston rouge, debout devant l'escalier d'un édifice.

Aly Bear croit que le système de placement d'enfants autochtones par les services sociaux est traumatisant. Pour elle, il est évident que les jeunes qui se retrouvent dans le système tenteront de retourner dans leurs communautés en fuguant.

Photo : Facebook/Aly Bear

Regardez les services sociaux, les jeunes Autochtones y sont surreprésentés, et beaucoup de nos jeunes ne veulent pas être là. Beaucoup d'entre eux, quel que soit l'état dans lequel se trouvent leurs parents, veulent rentrer chez eux. Ils veulent être avec leur famille.

Une citation de Aly Bear, vice-cheffe de la FSIN

C'est une hypothèse que soutient le sergent Ward : Au lieu de les placer, y a-t-il quelqu'un au sein de la communauté chez qui nous ils pourraient être en sécurité?

Trafic humain et exploitation sexuelle

Le sergent Ward, également chargé de l’unité VICE qui enquête sur les cas d’exploitation sexuelle et de trafic d'êtres humains, estime que la disparition des jeunes femmes est souvent liée au scénario Roméo. C'est quand le trafiquant est en relation avec quelqu'un , explique-t-il.

À la maison de transition de Regina, la directrice générale, Stephany Taylor, le constate également : les jeunes femmes, et encore plus les jeunes femmes autochtones, fuient des situations de violence et d’exploitation.

Quatre-vingt-dix pour cent de ma clientèle sont des femmes autochtones.

Une citation de Stephany Taylor

Elles viennent se réfugier dans son centre pour fuir des situations de violence et d’exploitation, mais il arrive aussi qu'elles repartent sans crier gare.

Stephany Taylor doit alors les signaler comme personnes disparues.

Cette forte représentativité d’adolescentes et de femmes autochtones a plusieurs racines, dont certaines remontent loin, croit Aly Bear, comme le peu d’importance accordée aux personnes issues des Premières Nations.

Quand j'étais en 9e année, j'ai fait mon premier rapport de lecture sur un livre intitulé "Just Another Indian" et cela a été l'une des premières révélations pour moi : la société au sens large considère les membres des Premières Nations comme jetables.

Une citation de Aly Bear, vice-cheffe de la FSIN

Depuis la publication de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, en 2019, les différents ordres de gouvernement ont mis en place des fonds et des programmes.

En avril, le gouvernement fédéral a annoncé des investissements de 2,5 millions de dollars pour une vingtaine d’organisations autochtones pour des projets de guérison pour les familles et les survivantes autochtones disparues et assassinées.

En Saskatchewan, le gouvernement a créé un fonds de 400 000 $ dans son budget 2023-2024 qui servira à des programmes de prévention spécifiquement pour les femmes autochtones disparues.

Toutefois, ce n’est pas suffisant pour plusieurs acteurs de première ligne, dont Blaire Buffalo, une agente de liaison entre les familles autochtones de personnes disparues et le gouvernement à l’Unité de liaison pour l’information à l’intention des familles (FILU).

Lorsque je lis le budget, cela me semble être une approche de fortune. Il n'y a pas de fonds consacrés aux mesures de prévention ou à la réforme du système judiciaire, dénonce Blaire Buffalo.

Aly Bear estime pour sa part qu'il est temps de s’attaquer aux racines du problème.

Où sont nos lieux de prière sur notre propre terre? Nous n'avons pas accès à des espaces de cérémonie, mais vous savez à quoi les gens ont accès pour faire face à leurs traumatismes? À l’alcool et aux drogues, dit-elle, la gorge nouée.

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