•  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Vaincre la dépendance : 15 ans de sobriété pour Peter Tilley, de la Mission d’Ottawa

Peter Tilley, le président-directeur général de la Mission d'Ottawa pose sur la rue Daly, à Ottawa.

Peter Tilley, le président-directeur général de la Mission d'Ottawa célèbre ses 15 ans de sobriété.

Photo : Radio-Canada / Simon Lasalle

Dans un petit sous-sol d'église à l'ouest d'Ottawa a eu lieu vendredi soir une cérémonie bien particulière. Peter Tilley, le président-directeur général de la Mission d'Ottawa, un organisme qui vient en aide aux plus démunis, célébrait ses 15 ans de sobriété avec les membres des Alcooliques anonymes (AA), un groupe qu'il fréquente depuis autant d'années.

Dans son rôle à la Mission d’Ottawa, M. Tilley a entendu les récits de dizaines de personnes qui gardent des souvenirs douloureux et pénibles de leur vie. L’alcool et les drogues se sont présentés comme des occasions de s’engourdir, de faire taire une souffrance qui les habitait en permanence.

J’ai été une de ces personnes, laisse-t-il tomber, assis devant un vieux bureau de bois dans un coin de la pièce où il travaille sur la rue Daly, à Ottawa.

Sur son bureau trône cette citation tout près d'une photo de sa fille.

Sur son bureau, devant une photo de sa fille, on peut lire cette inscription en anglais qui, traduite librement, se lit comme suit : « Peu importe où vous allez dans la vie, ce qui compte, ce sont les personnes qui vous accompagnent. »

Photo : Radio-Canada / Simon Lasalle

Dans une famille en apparence tout à fait normale faisait déjà rage le vice de l’alcool. Le jeune Peter a été témoin des fêtes bien arrosées auxquelles ses parents ont pris part et a grandi dans un environnement inadéquat qui l’a poussé à suivre les traces de ses proches.

J’avais très hâte de pouvoir commencer à boire, se remémore-t-il.

L’alcool lui a aussi servi à engourdir sa propre douleur dès l’âge de 14 ans. Il lui a ensuite ouvert la porte à la consommation de drogues. Toutes les drogues imaginables, à l’exception des substances injectables, précise M. Tilley.

Cocaïne, LSD, champignons : on peut toutes les nommer. Du pot, j'en fumais six, sept, huit fois par jour.

Une citation de Peter Tilley, président-directeur général de la Mission d'Ottawa

Il avait pourtant un avenir brillant devant lui. Enfant, il réussissait bien à l’école jusqu’à ce qu’il commence à boire. Vers 16 ans, il est même devenu le vendeur de drogues de son école secondaire.

À la mi-vingtaine, Peter Tilley a réussi à arrêter de consommer de la drogue, mais l’alcool est resté. Je trouvais que j’allais mieux, je me disais que je pouvais continuer à boire, explique-t-il.

Déclencher le changement

Un diplôme et une carrière dans l'industrie hôtelière plus tard, la consommation a suivi son cours. À 47 ans, tout a basculé.

Toutes les pensées de l'hôtelier étaient dirigées vers sa consommation. Les deux derniers mois ont été un véritable enfer. J’étais saoul du matin au soir et j’avais un emploi, se souvient-il.

Je me disais : tant que je suis capable de fonctionner et de me présenter au travail, je ne suis pas alcoolique.

Une citation de Peter Tilley

M. Tilley élevait seul sa jeune fille de 12 ans, la mère de celle-ci étant décédée alors qu'elle n'avait que cinq ans.

Lorsque j’ai touché le fond du baril, mon alcoolisme était incontrôlable, ça allait me tuer, confie-t-il. Je commençais chaque journée avec des shots de vodka à 6 h du matin pour m’aider à tenir jusqu’à midi.

Un matin, il s’est réveillé en crise. Je me suis dit : c’est assez.

À genoux par terre et des larmes plein les yeux, il s’est mis à implorer le Seigneur, lui demandant la force nécessaire pour survivre à sa dépendance.

Comment la vie peut-elle être belle sans alcool? en était-il venu à se demander.

Cet après-midi-là, il s’est rendu à sa première réunion avec les AA et tout a changé. J’ai rencontré des gens remplis de vie et d’humour qui avaient repris leur destin en main et je me suis dit qu’il y avait de l’espoir, souligne aujourd'hui l'homme dans la jeune soixantaine.

La place de l’espoir

Dans son récit, c’est l’espoir qui domine. Un aspect remarquable de sa réussite : Peter Tilley a fait un pied de nez à la dépendance au premier essai.

Quelques semaines après sa première réunion, il a commencé un des programmes de traitement de la toxicomanie au Centre de santé mentale Royal Ottawa.

Je suis resté devant le bureau [à cet hôpital] et je leur ai dit que je ne partirais pas, que j’avais besoin d’aide, et ils m’ont finalement permis de voir un médecin, raconte-t-il.

Je me suis battu contre les envies, contre les symptômes de sevrage, et graduellement, je me suis rendu à un an et demi de sobriété, puis à deux ans, puis à trois ans…

Une citation de Peter Tilley, président-directeur général de la Mission d'Ottawa

Il avait enfin du temps pour prendre soin de lui et pour entamer un travail de guérison grâce à la spiritualité. Et surtout, il a réussi à se pardonner, dit-il en serrant dans sa main les jetons de sobriété qu'il garde en permanence sur son porte-clés.

Trois jetons métalliques sont accrochés à un porte-clés.

Les jetons sont offerts aux membres pour souligner les grandes étapes de leur sobriété.

Photo : Radio-Canada / Simon Lasalle

Peter Tilley s’est servi de son expérience pour améliorer les programmes offerts par la Mission d’Ottawa.

Il a fait déménager un programme pour traiter la toxicomanie afin que les personnes en rétablissement ne soient plus en contact avec celles qui ne sont pas prêtes à entreprendre ce cheminement. Ce changement a radicalement fait augmenter les taux de succès, relate-t-il avec fierté.

Aujourd’hui, M. Tilley ne veut plus boire. J’aime ma vie et je suis choyé, lance-t-il avec un grand sourire.

Il tire beaucoup de fierté de son emploi qui lui permet d'offrir du soutien à d'autres personnes qui entament ce cheminement. Je parle avec elles tous les jours. J’espère pouvoir les inspirer autant qu’elles m’inspirent, affirme-t-il.

Peter Tilley travaille à son bureau.

Peter Tilley travaille à la Mission d'Ottawa depuis une dizaine d'années.

Photo : Radio-Canada / Simon Lasalle

Il se désole du sort que la société réserve aux personnes aux prises avec une dépendance ainsi que du jugement auquel font face ceux qui sont à la rue.

N’abandonnez pas ces personnes, implore-t-il en terminant l'entrevue. On pense à tort qu’il n’y a pas d’espoir pour les personnes qui vivent avec une dépendance, et c'est faux, selon lui. Ce n'est pas parce qu’on est un toxicomane qu’on doit mourir d’une surdose, fait-il remarquer.

Ces personnes méritent d'avoir une meilleure vie, termine-t-il. Il y a de l'espoir.

Vous souhaitez signaler une erreur?Écrivez-nous (Nouvelle fenêtre)

Vous voulez signaler un événement dont vous êtes témoin?Écrivez-nous en toute confidentialité (Nouvelle fenêtre)

Vous aimeriez en savoir plus sur le travail de journaliste?Consultez nos normes et pratiques journalistiques (Nouvelle fenêtre)

Infolettre ICI Ottawa-Gatineau

Une fois par jour, recevez l’essentiel de l’actualité régionale.

Formulaire pour s’abonner à l’infolettre d’ICI Ottawa-Gatineau.