Violences sexuelles et amnistie : la ministre Déry fait pression sur les universités
La ministre de l'Enseignement supérieur a envoyé une lettre aux universités pour les inciter à « se mettre en action » afin d'assurer la bonne application d'une loi pour combattre les violences à caractère sexuel dans les cégeps et les universités.

La ministre de l'Enseignement supérieur Pascale Déry lors de l'étude des crédits budgétaires en enseignement supérieur le 3 mai 2023.
Photo : Radio-Canada / Assemblée nationale du Québec
Lors de l'étude des crédits budgétaires en enseignement supérieur, la ministre Pascale Déry a été pressée par les oppositions libérale et solidaire d'agir pour que les violences sexuelles soient rapidement exclues de toutes les clauses d'amnistie des conventions collectives des employés des établissements d'enseignement supérieur.
Des associations étudiantes universitaires avaient uni leurs voix en avril dernier pour demander à la ministre d’intervenir à ce sujet, car cette faille empêche de sévir contre les employés qui récidivent en matière de violence à caractère sexuel et nuit à la pleine application de la Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d'enseignement supérieur.
La ministre Déry a répondu aux représentants des partis d'opposition être excessivement sensible
à ce dossier et avoir d'ailleurs envoyé mardi une lettre aux présidents et présidentes des conseils d'administration des universités à ce sujet.
Dans cette lettre, dont Radio-Canada a pu obtenir copie, la ministre Déry les invite à poursuivre le travail ou à [se] mettre en action afin que l'ensemble de vos conventions collectives permettent la pleine application du paragraphe 15 de l'article 3 de la loi
sans pour autant leur donner un délai précis pour le faire.
[...] l'effet des clauses d'amnistie visant toute forme de violences à caractère sexuel, figurant dans différentes conventions collectives, demeure une préoccupation pour le ministère et moi.
Pascale Déry rappelle également aux établissements que le Code du travail permet, pour les établissements qui ne sont pas en cours de négociations, d'intégrer une lettre d'entente sans attendre la fin d'une convention collective.
Aucun scénario écarté
Lors des échanges, la députée libérale Marwah Rizqy a réitéré sa demande qu'un projet de loi vienne imposer l'exclusion, de manière uniforme, des violences sexuelles des clauses d'amnistie des conventions, alors qu'Alexandre Leduc de Québec solidaire a demandé si la ministre Déry envisageait, comme il l'a demandé, l'option du mandat d'initiative pour se pencher sur cette question.
Pascale Déry a répondu toujours privilégier pour le moment la voie de la négociation entre établissements d'enseignement supérieur et syndicats, d'où la lettre envoyée aux universités. La ministre a toutefois répété à plusieurs reprises ne fermer la porte à aucun scénario
, dont celui de l'amendement législatif pour corriger cette situation-là
.
La raison pour laquelle on n'agit pas tout de suite, c'est qu'il y a des ententes négociées et qu'on ne peut pas toujours s'immiscer dans ce processus-là.
La ministre craint que de contourner la voie de la négociation pour imposer une solution législative crée un mauvais précédent.
Il faut être prudent, il faut faire attention à l'atteinte du droit à la négociation des parties. [...] Si on s'immisce dans le processus [de négociations entre les établissements et la partie syndicale sur cette question-là], on va nous demander de le faire pour tout.
La ministre a par ailleurs indiqué que la lutte contre les violences à caractère sexuel était une priorité pour son gouvernement et qu’un plan d’action pour prévenir et combattre ce type de violences en enseignement supérieur a été déposé en février dernier, assorti d’un financement additionnel de 25 millions de dollars, pour un budget total de 54 millions de dollars.