Depuis ses débuts, la formation collégiale est matière à débats

Étudiants de cégep en 1983.
Photo : Radio-Canada
Le programme des matières de bases communes à la formation collégiale a de nouveau été remis en question par la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ). Nos reportages d’archives témoignent que la formation collégiale et son tronc commun obligatoire sont remis en cause périodiquement depuis la création des cégeps.
Former des étudiants et des citoyens
C’est en 1963 que le rapport Parent décide de créer les collèges d’enseignement professionnel et technique (cégep) dans le but de démocratiser l’éducation supérieure. Le réseau collégial vient remplacer les instituts techniques et les collèges classiques réservés la plupart du temps à l’élite.
En septembre 1967, les premiers cégeps voient le jour. Au total, 12 cégeps sont implantés cette année-là un peu partout à travers la province.
Le niveau d'enseignement collégial est une particularité québécoise. Alors que les cégeps francophones offrent un tronc commun de cours obligatoires, les cégeps anglophones offrent une formation de base avec des cours au choix.
À l’origine, le rapport Parent souhaitait que les jeunes acquièrent une meilleure culture générale.
Plus qu’une formation donnant accès au marché du travail ou à l’université, c’est également une éducation citoyenne que l’on entend donner avec la formation collégiale.
Le 7 mai 1969 à l’émission Femme d’aujourd’hui, la journaliste Renée Larochelle présente un reportage deux ans après l’implantation des cégeps au Québec.

Reportage de Renée Larochelle deux ans après l’instauration des cégeps au Québec. Des étudiants parlent de leur choix de carrière, de leur expérience au cégep et de l’inégalité entre le programme général et le programme technique.
En deux ans, le nombre d’établissements a pratiquement doublé. En 1969, le Québec compte 23 cégeps.
Dans le reportage, on peut entendre Gérard Filion, directeur général de Marine Industries, prononcer un discours sur les programmes présentés par les cégeps. Le DG y déplore le peu d'options pour les cours techniques, notamment en foresterie, en métallurgie et dans le domaine des mines, au détriment des cours de sciences humaines.
Il considère que le cégep doit être mieux adapté au marché du travail. Gérard Filion déclare qu’avec les formations offertes au niveau collégial en 1969, les jeunes ne seront pas prêts pour entrer dans le monde technologique dans lequel nous vivons
. Une critique qui reviendra souvent au cours des décennies suivantes.
Toujours en 1969, Pierre Bisaillon, directeur du cégep Édouard-Montpetit, estime qu’à peine 20 % des élèves sont inscrits aux programmes techniques. Cela est dû à l’offre de programmes encore assez limitée.
La réforme Robillard
« Il faut réorienter le cégep de l’an 2000 et tout sera remis en question... les cours, les programmes, les pratiques des enseignants, le cheminement des élèves, le financement. »
En 1992, 25 ans après la création des cégeps, la ministre de l’Éducation supérieure du Québec, Lucienne Robillard, tient une commission parlementaire sur le régime des études collégiales.
L’objectif est alors de diminuer le décrochage scolaire au niveau collégial, qui est alors de 30 %, et d’augmenter le nombre de diplômés des secteurs techniques.

Reportage de Louise Lafontaine au sujet des orientations de la réforme Robillard sur la formation collégiale. Le bulletin de nouvelles est animé par Suzanne Laberge.
Le 12 novembre 1992 au Téléjournal, la journaliste Louise Lafontaine présente un reportage au sujet des orientations de la réforme Robillard sur la formation collégiale.
La ministre souhaite donner une plus grande autonomie d'enseignement aux établissements collégiaux. Des changements à la formation technique sont apportés avec les stages en entreprise et les cours de la formation générale sont plus diversifiés.
La formation commune à tous les élèves francophones se divise en 14 cours obligatoires. Quatre cours de littérature, trois cours de philosophie, deux cours d’anglais langue seconde, trois cours d’éducation physique et deux cours complémentaires.
À quoi sert la philosophie?
La réforme Robillard accorde moins d’importance aux cours d’éducation physique et à ceux de philosophie.
« La mise en garde que je ferais, c’est qu’il est clair que la mode est à la hiérarchie des rationalités qui met au sommet la rationalité économique. »
Le 14 février 1993 à Aujourd’hui dimanche, Anne-Marie Dussault s’entretient avec Guy Bourgeault, philosophe et professeur en sciences de l’Éducation à l’Université de Montréal.

L’animatrice Anne-Marie Dussault s’entretient avec Guy Bourgeault, philosophe et professeur en sciences de l’Éducation à l’Université de Montréal au sujet de la réforme Robillard et de ses impacts sur les cours de philosophie au cégep.
Guy Bourgault aborde les impacts de la réforme Robillard sur les cours de philosophie au cégep qui passent de quatre à trois.
Pourquoi un étudiant en techniques policières ou une étudiante en technique infirmière aurait besoin de Platon?
, demande l’animatrice.
Le professeur mentionne qu’il est intéressant que les gens voient la réalité humaine et sociale autrement que sous l’angle de leur spécialité.
Pour Guy Bourgeault, la philosophie doit permettre aux étudiants de faire trois mouvements d’intelligence capitaux. Le premier est celui de l’élargissement des horizons, le second mouvement est celui du sens de la profondeur et le troisième est le mouvement de recul qui permet à l’étudiant de prendre une certaine distance critique et de ne pas être à la merci des modes
.
50 ans après leur création, les cégeps ont-ils rempli leur mission?

L’animateur Gérald Fillion s’entretient avec l’économiste Pierre Fortin au sujet de l’apport socio-économique des cégeps au Québec sur l'éducation des jeunes, 50 ans après leur création.
Le 21 août 2017, alors que les cégeps célèbrent leur 50e anniversaire, l’animateur Gérald Fillion reçoit sur le plateau de RDI économie l'économiste Pierre Fortin.
Selon l’économiste, la mission socio-économique des cégeps a été remplie.
50 ans après la création des cégeps, Pierre Fortin démontre que l’implantation de ces établissements d’enseignement a considérablement augmenté le taux de scolarisation chez les jeunes Québécois.