Suncor s’entend avec Total pour racheter ses actifs dans les sables bitumineux
Conoco Phillips détient un premier droit de refus sur une partie de la transaction annoncée.

« L'ajout de ces actifs dans le portefeuille de Suncor sera assujetti à notre objectif de réduction de nos émissions pour devenir une entreprise carboneutre d'ici 2050 », écrit Suncor.
Photo : La Presse canadienne / Jeff McIntosh
La pétrolière Suncor a annoncé qu’elle compte acquérir les actifs de Total dans les sables bitumineux au Canada pour un montant initial de 5,5 milliards de dollars.
L’accord entre les deux pétrolières prévoit des paiements supplémentaires pouvant atteindre 600 millions de dollars, conditionnels aux prix de référence Western Canadian Select et à certaines cibles de production
, précise le communiqué de presse de Suncor.
La transaction inclut la part restante de Total du site d’extraction à Fort Hills (31,23 %) ainsi que 50 % des parts du site de Surmont. Suncor serait alors propriétaire à parts égales de Surmont avec Conoco Phillips, qui détient toutefois un premier droit de refus sur cette partie de la transaction.
Surmont est un producteur de grande qualité qui ajoute une production à long terme au portefeuille de sables bitumineux de Suncor
, poursuit le communiqué de presse.
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Si la transaction est conclue, Suncor possédera 100 % des actifs de Fort Hills et pourra ajouter 135 000 barils de pétrole à sa production quotidienne, ainsi qu'une réserve de pétrole estimée à 2,1 milliards de barils.
Selon la pétrolière, l'acquisition des actifs de Total permettra de remplacer la moitié de la production du site Base lorsqu’il atteindra sa fin de vie en 2030.
Jean-Thomas Bernard, professeur auxiliaire au Département de science économique à l'Université d'Ottawa, souligne que l’accord n’est pas une décision très surprenante.
Les entreprises étrangères se sont retirées graduellement des sables bitumineux, de sorte qu'aujourd'hui leur présence est minime
, remarque-t-il. Ça fait partie de l'évolution de la demande et de la production du pétrole.
Louis Beaumier, directeur général de l'Institut de l'énergie Trottier (IET) à Polytechnique Montréal, attribue cette évolution à ce qu'il considère comme un manque d'avenir pour ces entreprises internationales dans l'industrie.
Si on est sérieux quant à nos objectifs de décarbonisation et de limiter le réchauffement de la planète, ces gros acteurs du secteur de l'énergie savent bien qu'ils devront se tourner vers autre chose
, remarque-t-il.Ils vont vouloir, si ce n'est continuer à faire des profits au minimum, minimiser les pertes.
Même s'il considère que Suncor n'a pas le profil pour devenir un acteur international majeur, dans le genre de Shell, BP ou Exxon, il voit cet accord comme la continuité de leur expansion dans le pays.
D'autant plus qu'il n'y a pas de plafond de production de pétrole au Canada.
[Actuellement] il n’y a aucun signal qui leur est envoyé, comme quoi ils auront à réduire leurs opérations ou à revoir la façon dont ils opèrent
, explique Louis Beaumier. En fait, vous avez même un peu le contraire parce que le gouvernement fédéral a mis en place un programme de crédit d'impôt pour les investissements dans les technologies de capture et séquestration du carbone.
Alors que le Canada vise le zéro net, il affirme que les entreprises devraient s'éloigner des carburants fossiles.
Ils ont la fenêtre d’opportunité
, indique le directeur général de l’IET. Ils ont les politiques en place pour continuer dans cette voie [...] et du point de vue des affaires, ils ont tout à fait raison de faire [cette transaction].
Selon Rick Kruger, le PDG de Suncor, cette transaction représente une étape majeure pour assurer la sécurité de l'approvisionnement à long terme de pétrole des sables bitumineux.
Le rachat devrait avoir lieu avant la fin du troisième trimestre, soit avant la fin du mois de septembre.
Avec les informations de Emmanuel Prince-Thauvette