•  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Érosion et submersion côtières : la gestion de Québec « n’est pas efficace »

Des chalets inondés et déplacés par l'eau.

Le chemin des Chalets, aux Îles-de-la-Madeleine, a été inondé lors du passage de la tempête Fiona, en septembre 2022. Ce secteur est particulièrement touché par l'érosion et par la submersion côtières. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose

La gestion des risques liés à l’érosion et à la submersion côtières effectuée par les ministères québécois « présente des lacunes et n’est pas efficace », selon un audit de performance réalisé par la commissaire au développement durable.

La commissaire Janique Lambert qualifie de préoccupants les trois constats issus de ses travaux.

Selon elle, les lacunes gouvernementales en matière de gestion et d’adaptation aux changements climatiques pourraient avoir des conséquences à plusieurs égards.

Ce sont de gros risques et de fortes conséquences en matière de sécurité des personnes, d’intégrité des bâtiments et de protection de l’environnement, résume Mme Lambert.

Absence de vision globale

Il n’y a pas de gestion intégrée des risques liés à l’érosion et à la submersion côtières à l’échelle gouvernementale, constate en premier lieu la commissaire.

Cela empêche Québec d’avoir une vision globale et une coordination efficace des interventions à réaliser, selon Mme Lambert.

Tout le monde travaille de façon sectorielle, donc en silo. Ce n'est pas une façon de faire qui est optimale sur le plan gouvernemental, surtout avec un [problème] si grand.

Une citation de Janique Lambert, commissaire au développement durable

Mme Lambert souligne d'emblée le report de l'échéancier pour mettre en œuvre un plan de gestion concertée de l’adaptation aux risques d’érosion et de submersion côtières. Le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP), qui devait entamer la création de ce plan en août 2022, a finalement reporté le début de l'exercice, qui prendra quatre ans, au 1er avril 2023.

Janique Lambert s'adresse aux journalistes.

La commissaire au développement durable, Janique Lambert, a présenté son rapport pour l'année 2022-2023.

Photo : Radio-Canada

Janique Lambert soulève plusieurs lacunes dans la planification des différents ministères concernés par l'érosion côtière.

Par exemple, elle souligne que le ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD) ne dispose pas de données sur l’exposition future à l’érosion dans certaines MRC côtières, ce qui l'empêche d’évaluer les investissements à venir et les priorités dans sa planification.

Les travaux d'enrochement sur la route 199.

Les travaux d'enrochement visent à protéger la route de l'érosion dans le secteur de Pointe-aux-Loups, aux Îles-de-la-Madeleine. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Steve Rompré

La commissaire calcule d'ailleurs que 80 % des dépenses liées à l’érosion effectuées par le MTMD entre mars 2018 et mars 2023 ont été faites à la suite de dommages subis plutôt qu’à titre préventif.

Plusieurs spécialistes disent qu'il est toujours moins cher de prévenir que de guérir, souligne Mme Lambert. Dans ce cas bien précis, chaque dollar bien investi en adaptation, en prévention, permet d’économiser de 13 à 15 dollars de frais pour corriger les conséquences subies.

Selon le Plan pour une économie verte 2030, si aucune mesure d’adaptation n’est mise en œuvre, l’érosion pourrait endommager plus de 5000 bâtiments et près de 300 kilomètres de routes d’ici 2065 au Québec. La facture pourrait s'élever à 1,5 milliard de dollars.

Manque de connaissances

La commissaire au développement durable note également le manque de connaissances pour gérer efficacement les risques liés à l’érosion et à la submersion côtières.

Elle constate aussi que les informations existantes sont souvent diffusées de manière limitée et ne sont pas toujours accessibles.

Par exemple, les données sont souvent dispersées sur plusieurs sites web et les ministères ne s’assurent pas toujours de les transmettre aux intervenants locaux et régionaux.

Des résidences aux abords de la plage à Sainte-Flavie.

L'érosion des berges menace des résidences à Sainte-Flavie. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Jean-Luc Blanchet

Le MELCCFP ne s’est pas assuré d’obtenir tous les droits nécessaires au partage de certaines données acquises au moyen de contrats de recherche octroyés à des tiers, peut-on également lire dans le rapport.

On doit avoir une information qui est à jour pour savoir quel sera le climat futur et quelle intervention on doit choisir pour faire face à ça, résume Janique Lambert.

Manque d’encadrement et de soutien aux municipalités

La commissaire observe que peu de municipalités bénéficient de l’encadrement et du soutien nécessaire, technique ou financier, des ministères de la Sécurité publique [ainsi que] de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. Ce soutien pourrait pourtant leur permettre de prendre en charge efficacement les risques liés à l’érosion et à la submersion côtières, affirme Mme Lambert.

Janique Lambert déplore aussi que le ministère de la Sécurité publique n'ait toujours pas produit les cartes de zones de contraintes relatives à l’érosion et à la submersion côtières pour certaines municipalités côtières. Ces cartes peuvent permettre, par exemple, d'interdire la construction de nouveaux bâtiments dans des secteurs à risque.

Par ailleurs, certains outils ministériels existants n’ont pas été fournis aux municipalités et aux MRC.

Recommandations

La commissaire formule cinq recommandations à différents ministères pour améliorer la situation.

Parmi celles-ci, la commissaire suggère d’assurer une gestion intégrée de l’adaptation aux risques liés à l’érosion et à la submersion côtières, de mettre au point des outils pour assurer une meilleure prise en charge des risques, de regrouper et de diffuser les connaissances acquises et de fournir un accompagnement aux municipalités et aux MRC côtières.

S’il y a une chose qui est primordiale, c’est de travailler ensemble et qu’il y ait un porteur de dossier.

Une citation de Janique Lambert

Questionné à l’Assemblée nationale mercredi peu après le dépôt de ce rapport, le ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, Benoit Charette, a indiqué ne pas avoir pris connaissance du document.

Benoit Charette parle au micro en conférence de presse.

Le ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, Benoit Charette (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Charles Contant

Il a toutefois mentionné que certaines actions du gouvernement allaient dans le même sens que les recommandations de la commissaire au développement durable.

Il y a un bureau de coordination qui a été mis en place pour prévenir les situations d’érosion. Ça implique plusieurs ministères. On a anticipé, en quelque sorte, certaines des recommandations de la commissaire au développement durable, a avancé le ministre.

Le maire de Sainte-Flavie salue le rapport

Jean-François Fortin accueille favorablement les constats et les recommandations du rapport. Maire d’une municipalité fortement éprouvée par les changements climatiques, il se réjouit que la commissaire au développement durable mette en lumière des lacunes qu'il a lui-même observées.

Jean-François Fortin devant une promenade au bord du fleuve, à Sainte-Flavie.

Le maire de Sainte-Flavie, Jean-François Fortin, partage les constats de la commissaire Lambert. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / François Gagnon

Les ministères n’ont pas de planification intégrée pour l’ensemble des municipalités, on y va à la pièce, note-t-il. C’est une excellente nouvelle qu’on ait été à même de faire un constat qui est clair, qui permet aux acteurs de comprendre ce qu’on attend d’eux.

Il faut qu’il y ait une meilleure communication entre tous les paliers des ministères concernés et surtout que les municipalités aient les moyens de comprendre leur territoire pour agir. Ça passe par l’accès à des données, par des faits et des études qui sont accessibles.

Une citation de Jean-François Fortin, maire de Sainte-Flavie

Jean-Francois Fortin observe que les autorités municipales doivent souvent faire une demande pour obtenir des données existantes auprès de Québec et que la transmission de celles-ci est variable.

Il plaide en faveur de l’instauration d’une base de données centralisée pour que l’information soit facilement accessible.

Vous souhaitez signaler une erreur?Écrivez-nous (Nouvelle fenêtre)

Vous voulez signaler un événement dont vous êtes témoin?Écrivez-nous en toute confidentialité (Nouvelle fenêtre)

Vous aimeriez en savoir plus sur le travail de journaliste?Consultez nos normes et pratiques journalistiques (Nouvelle fenêtre)

Chargement en cours

Infolettre ICI Gaspésie

Une fois par jour, recevez l’essentiel de l’actualité régionale.

Formulaire pour s’abonner à l’infolettre d’ICI Gaspésie.