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« Le Québec n’est pas la poubelle toxique des États-Unis et de l’Ontario »

Le projet d'enfouissement de millions de tonnes de déchets dangereux, à Blainville, suscite des inquiétudes.

La compagnie produit une sorte de béton imperméable qui recouvre la matière traitée avant d'être enfouie.

Stablex traite et enfouit des résidus dangereux inorganiques industriels. Ces déchets sont enfermés dans de vastes « cellules ».

Photo : Stablex

Des citoyens, des élus et l'Union des producteurs agricoles (UPA) expriment leurs préoccupations face au projet de « cellule 6 » de la compagnie américaine Stablex, qui vise à enfouir à perpétuité des millions de tonnes de résidus contaminés en empiétant sur des boisés et des milieux humides. Le gouvernement du Québec s'en remet à l'examen indépendant du BAPE. Quant à la Ville de Blainville, elle se déclare ni pour ni contre.

Radio-Canada rapportait jeudi que Stablex a demandé l'autorisation au ministère de l'Environnement de doubler sa capacité de réception de déchets industriels contaminés. La compagnie veut pouvoir enfouir 8 millions de mètres cubes de matières supplémentaires sur 40 ans, soit quatre fois le volume du stade olympique de Montréal.

Le résident de Blainville Claude Beaudet s'inquiète de la taille du terrain visé, vaste de 69 hectares, dont 54 hectares d'habitat forestier et 9 hectares de milieux humides seront détruits.

Cessez les développements d'industries lourdes dans un environnement qui doit, à tout prix, être protégé, agrandi et soigné.

Une citation de Claude Beaudet, résident de Blainville

Philippe Le Guerrier, représentant de l'UPA pour les Laurentides, explique que la cellule numéro 6 où seront enfouis les déchets se situe à environ un kilomètre de bassins d'irrigation d'entreprises agricoles.

Philippe Le Guerrier debout dans un champ.

Philippe Le Guerrier est le représentant de l'Union des producteurs agricoles (UPA) pour les Laurentides.

Photo : Radio-Canada / Philippe-Antoine Saulnier

Les légumes qu'on produit, on le fait avec de l'eau d'étangs du secteur, dit-il, inquiet d'une contamination de la nappe phréatique.

L'entreprise assure que son procédé est sécuritaire à perpétuité. Une fois remplie au complet, une cellule est fermée par un revêtement composé d’une couche de séparation en sable, d’une couche d’argile compactée et d’une géomembrane étanche.

Le ministère de l'Environnement a toutefois exprimé des préoccupations sur ce qu'il adviendra le jour où l'entreprise cessera ses activités. Dans 500 ans, il va y avoir du danger pareil, croit Philippe Le Guerrier.

Vue aérienne des terrains de Stablex où sont les cellules 1 à 5 (en bas à droite) et où serait la cellule 6 (en haut à droite).

Vue aérienne des terrains de Stablex où sont les cellules 1 à 5 (en bas à droite) et où serait la cellule 6 (en haut à droite).

Photo : Google Earth

Les déchets de l'extérieur du Québec dérangent

Depuis 40 ans, la moitié des matières dangereuses qu'a reçues Stablex venaient de l'Ontario et du nord-est des États-Unis. Il s'agit de matières dangereuses résiduelles et de sols contaminés, par exemple aux métaux lourds.

Ça ne devrait pas être aux gens des Laurentides de vivre avec les poubelles de nos voisins du Sud, réagit la porte-parole de Québec solidaire en matière d'Environnement, Alejandra Zaga Mendez.

Martine Ouellet devant un micro dans un studio.

Martine Ouellet, la cheffe de Climat Québec (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Erik Chouinard

L'ex-ministre péquiste des Ressources naturelles Martine Ouellet a déposé mardi soir au conseil municipal de Blainville une pétition signée par près de 3000 personnes opposées au projet.

Est-ce qu'on va accepter que Blainville serve de poubelle pour les États-Unis et l'Ontario, qui veulent se débarrasser de leurs déchets toxiques?

Une citation de Martine Ouellet, cheffe de Climat Québec

Stablex assure qu'elle est une solution sécuritaire au traitement et à la gestion de ces déchets qui doivent bien finir quelque part.

Le dossier complet sera évalué par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), à partir du 8 mai. Les citoyens pourront se faire entendre durant les quatre mois d'étude.

Benoit Charette parle dans un lobby d'hôtel.

Le ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP), Benoit Charette

Photo : Radio-Canada

Le ministre québécois de l'Environnement, Benoit Charette, s'en remet à l'examen indépendant du BAPE. Je ne connais pas de projets passés au BAPE qui ont été acceptés tels que présentés initialement. C'est tout le temps une démarche qui permet de bonifier ou sinon carrément de refuser un projet, explique-t-il.

Le ministère absent depuis 10 ans du comité de suivi

Le siège du ministère de l'Environnement, de la Lutte congre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) est laissé vide depuis 10 ans dans le comité de suivi des activités de Stablex. Ces réunions, cinq fois par année, permettent d'assurer le suivi général des exigences du ministère.

Ils sont convoqués, on envoie l’invitation, on envoie le compte rendu et ils se sont satisfaits de ça depuis environ 2012, a expliqué Pierre Légo, cadre de Stablex, lors de la réunion publique du 8 mars.

Le MELCCFP effectue ses propres vérifications, suivis et inspections afin de s’assurer du respect de la réglementation, explique le porte-parole du ministère, Frédéric Fournier.

Officiellement ni pour ni contre, Blainville n'avait pas demandé de BAPE

Contrairement aux citoyens et à l'UPA, la Ville de Blainville a admis à Radio-Canada ne pas avoir réclamé la tenue d'un BAPE et elle ne sait pas si elle va y participer.

La Ville a pu poser des questions à Stablex et continuera à le faire, se satisfait le porte-parole de la Municipalité, Yannick Proulx.

Blainville a déjà autorisé le principe de la vente du terrain à la compagnie, pour 14 millions de dollars, conditionnellement à l'obtention des autorisations environnementales.

Ce n'est pas qu'on va s'opposer ou qu'on va être en faveur du projet, c'est qu'on va s'assurer que tous les éléments du projet soient bien considérés, en s'assurant que le projet se réalise avec le moins d'impact environnemental et social.

Une citation de Liza Poulin, mairesse de Blainville
Liza Poulin en entrevue.

Liza Poulin, mairesse de Blainville

Photo : Radio-Canada

On est conscients que les tourbières, c'est un joyau pour notre territoire. Donc, je partage les préoccupations des gens, dit la mairesse à Radio-Canada. Elle affirme toutefois que le projet de Stablex et la protection des tourbières, ce sont deux dossiers distincts, j'aimerais qu'on ne les mélange pas.

L'étude d'impact du projet indique clairement que 1000 mètres carrés (0,1 hectare) de tourbière seront perdus.

En ce qui concerne la sécurité des cellules, le responsable de l'environnement à la Ville de Blainville, Éric Lépine, rappelle que Stablex enfouit déjà des matières dangereuses depuis 40 ans, au sud-ouest de l'emplacement projeté.

On a quand même un contrôle, il y a un suivi, il y a une correspondance quasi journalière avec la compagnie, dit-il. Donc, à partir du moment que les règles de sécurité, les règles de bon fonctionnement sont assurées, on n'a pas d'indication contraire à l'effet que ça va être pire là que ça l'est en ce moment.

En ce moment, ça fonctionne bien. C'est une compagnie qui a quand même une très bonne feuille de route au niveau sécurité. Si tout va bien, on va actualiser les techniques, donc ça devient rassurant pour la population.

Une citation de Éric Lépine, responsable de l'environnement à la Ville de Blainville

En 2021, il y a eu un incendie dans un des bâtiments de Stablex, alors que des déchets de chlore étaient en train d'être traités. La matière se serait enflammée au moment du transbordement du produit dans des bassins. Heureusement, les pompiers de Blainville ont leur caserne juste à côté de ces installations.

Stablex a décliné notre demande d'entrevue et de visite des installations. La compagnie nous a aussi écrit : Nous croyons qu'il est préférable de ne pas publier d'article sur Stablex en amont des audiences.

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