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Fusillade dans une garderie de Gatineau : 10 ans plus tard, la douleur demeure

Des policiers et des ambulanciers devant la garderie.

Cet événement a laissé des traces, notamment pour les policiers qui sont intervenus ce jour-là. Nathalie Tremblay explique que dans le cadre de leur travail, ils sont de plus en plus exposés aux problèmes de santé mentale.

Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick

5 avril 2013 : l’impensable s’est produit à Gatineau. Un homme armé d’un fusil de chasse a fait irruption dans une garderie. Il fait un mort avant de retourner l’arme contre lui. Cette fusillade a laissé des traces indélébiles chez les policiers qui ont eu à intervenir sur les lieux.

À l’époque, le policier Patrick Gauthier travaillait comme maître-chien. Il se promenait donc seul avec l’animal. Il se trouvait littéralement à côté de l’établissement. Je ne me souviens pas comment l'appel est rentré, mais j'avais de la difficulté à associer ‘‘arme à feu’’ et ‘‘garderie’’, se souvient-il.

Néanmoins, il n’a pas hésité une seule seconde, arrivant en premier sur les lieux de la garderie. Dix ans plus tard, il parle encore de cette scène avec émotion.

Des policiers avec des enfants dans leurs bras.

Le tireur a fait irruption dans la pouponnière de la garderie avant d'abattre un employé pour ensuite se diriger dans l'autre bâtiment de la garderie. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick

À ce moment, le policier n’ose même pas imaginer le pire. Il craint néanmoins de voir un carnage dans la garderie qui accueille 53 enfants. Cette fusillade aura finalement fait deux morts : Neil Galliou, un éducateur français, et le tireur, qui aurait voulu s’en prendre à son ancienne conjointe, la directrice de la garderie.

Je vois une petite chevelure blonde frisée dans une bassinette. Je m’étais préparé au pire, mais finalement, l’enfant dormait. J’ai eu de la chance que ce soit positif, car sinon, les cicatrices auraient été bien pires dans ma tête, raconte celui qui travaille toujours pour le Service de police de la Ville de Gatineau (SPVG).

Rapidement, les parents convergent vers la garderie, sans réfléchir, avec l’unique envie de serrer leurs enfants dans leurs bras.

Les parents savaient qu’il y avait des victimes, mais ils ne savaient pas si c’était leur enfant. Quand on leur disait que les enfants étaient corrects, ils s’écrasaient à terre, se souvient Josée Bouchard, qui était alors agente communautaire pour le corps policier gatinois. Elle est aujourd’hui agente relationniste.

Quand je suis arrivée, je ne savais pas ce qu'il se passait dans la maison. Patrick [Gauthier] m’a demandé de sécuriser la place et j’ai vu la première personne décédée. C’est triste, poursuit celle qui est policière depuis maintenant 27 ans.

Un père embrasse son enfant.

Les parents ont rapidement convergé vers la garderie pour retrouver leur enfant. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick

En tout, il aura fallu environ deux heures pour que les parents puissent récupérer leurs enfants, qui ont tous été évacués rapidement, notamment par un couple voisin.

Le personnel de la garderie avait été formé, quelques mois plus tôt, par notre service de pompiers pour savoir comment évacuer en cas de feu. Je pense que cette formation a été utile aux éducatrices, qui savaient quoi faire, explique Marc Bureau, qui était maire de Gatineau à l’époque.

Marc Bureau en entrevue.

Marc Bureau a fait un retour à la table du conseil municipal de Gatineau l'automne dernier, cette fois dans un rôle de conseiller.

Photo : Radio-Canada

La santé mentale

Dix ans plus tard, le souvenir de ce drame fait revivre des émotions chez les policiers. Aujourd’hui, les problématiques entourant la santé mentale font partie de leur quotidien.

Policier à Gatineau depuis 1992 et directeur du SPVG depuis 2018, Luc Beaudoin a vu la réalité des agents de la paix changer au fil des décennies. À Gatineau, 80 % de nos appels ne sont pas pour des motifs criminels. Ce sont des appels d’assistance au public, des appels de détresse, explique celui qui partira bientôt à la retraite.

Luc Beaudoin à la table du conseil municipal.

Le directeur du Service de police de la Ville de Gatineau, Luc Beaudoin, a annoncé sa retraite, en janvier, sans dévoiler la date de son départ. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Michel Aspirot

Le SPVG a mis en place plusieurs mesures afin de soutenir ses policiers à la suite du récent drame dans une garderie de Laval ou de la mort d’une policière à Louiseville. Mais selon Luc Beaudoin, il faudrait en faire davantage.

Le système de santé doit être en mesure d’assurer les suivis adéquats avec les différents organismes, la police, la cour [...] pour qu’on puisse se parler et pour éviter qu’on se retrouve un matin devant une personne désorganisée et qui refuse de collaborer.

Une policière avec un enfant dans ses bras.

Les policiers ont rapidement sécurisé les enfants avant l'arrivée des parents. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick

Josée Bouchard admet que ces interventions marquent, jour après jour, les agents de la paix.

Il faut quand même vivre notre appel. Si on a besoin, il faut aller chercher de l’aide. Il faut se dire : est-ce que j’ai fait mon travail? Est-ce que j’ai aidé du mieux que j’ai pu? Après, [il faut passer à autre chose], car on ne survivrait pas.

Chaque événement, je le vis à 100 %. Je le pleure, je le ventile, que ce soit à mes amis, à mes patrons et à mon épouse. Ça m’amène une force de guérison incroyable, explique Patrick Gauthier.

Des policiers avec un enfant dans les bras.

Dans son bilan de la tragédie, le SPVG avait tiré des leçons positives, notamment sur le rôle joué auprès des parents dans les jours qui ont suivi l'événement. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick

Il a également un message pour ses collègues qui vivent la même réalité que lui : Prenez soin de vous. Guérissez-vous. Levez la main si vous avez besoin. Écoutez-vous, respectez-vous et protégez-vous, conclut-il avec le trémolo dans la voix.

Avec les informations de Nathalie Tremblay

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