La répudiation de la doctrine de la découverte, moment symbolique pour le Grand Nord

François Paulette estime que la répudiation est une étape symbolique positive, mais qu'il incombe aux dirigeants et aux chefs d'utiliser cette répudiation comme un tremplin vers un véritable changement.
Photo : Radio-Canada / Pat Kane
Des leaders autochtones du Grand Nord réagissent à l’annonce du Vatican de rejeter la doctrine de la découverte, qui est une occasion de changement pour certains, et une manœuvre de relations publiques pour d’autres.
L’aîné Denesuline et récipiendaire de l’Ordre du Canada François Paulette croit que le rejet par le Vatican de cette doctrine est un geste symbolique qui peut conduire à des changements positifs si les dirigeants autochtones poursuivent sur cette lancée.
Pour ce défenseur des droits autochtones, cette répudiation est une étape importante, mais l’Église ne contrôle pas les terres canadiennes.
« C’est le gouvernement du Canada qui doit faire des changements. [...] J’espère que les leaders, les chefs, prendront cela à bras-le-corps, et que nous irons de l'avant et aurons des discussions très positives de nation à nation avec le Canada. »
Cette doctrine est un concept légal ayant ses racines dans des bulles papales
datant du 15e siècle. Elle a été utilisée pour justifier la saisie de territoires qui appartenaient à des peuples autochtones.
À lire aussi :
Jeudi, le Vatican a annoncé que ces bulles papales avaient été manipulées
à des fins politiques par les puissances coloniales pour justifier des actes immoraux à l'encontre des peuples autochtones.
Jack Anawak, ancien député fédéral pour le Nunavut et ancien député territorial, dit que la déclaration du Vatican lui donne de l’espoir, et qu’elle était attendue depuis longtemps.
« Ce que ça veut dire, c’est qu’on peut être sur un vrai chemin de réconciliation avec les églises et les gouvernements à travers le monde. »
C’est une occasion pour nous de reconnaître que le Pape était sincère lorsqu’il a demandé pardon et maintenant, il répudie la doctrine de la découverte
, dit Jack Anawak, faisant référence aux excuses formulées par le pape François l’été dernier pour le rôle joué par l’Église catholique dans le système des pensionnats autochtones.
L’avocate vancouvéroise Kate Gunn, spécialisée en droit autochtone, dit que la répudiation peut entraîner des changements, mais qu’elle ne modifiera pas les lois canadiennes.
Pour qu'un changement significatif se produise, il faut des mesures de suivi concrètes
, dit-elle.
Selon l'avocate, toutes les affaires relatives aux titres et aux droits des peuples autochtones impliquent, dans une certaine mesure, l'affirmation de la souveraineté de la Couronne et, par extension, de la doctrine de la découverte.
Je pense donc que cette clarification de la part de l'Église donne plus de poids aux arguments des peuples autochtones selon lesquels le Canada ne devrait pas [soutenir] cette position.
Dëneze Nakehk'o
est l’un des membres fondateurs de Dene Nahjo, un collectif visant à créer des espaces favorisant la reconnexion des Autochtones avec le savoir traditionnel.Il qualifie la répudiation de manœuvre de relations publiques habile
de la part du Vatican pour rester pertinent dans le monde moderne.
Selon lui, la déclaration du Vatican est un pas vers la guérison, mais le clergé n’est pas celui qui prend des décisions dans notre société.
« Je ne sais pas dans quelle mesure il [le clergé] est pertinent dans la société moderne, et je ne sais pas dans quelle mesure nous devrions lui donner la parole. »
Selon M. Nakehk’o,C’est ce qui a justifié le vol des terres, la destruction de nos cultures, l’enlèvement de nos enfants… Cette [doctrine] a fait énormément de tort à plusieurs générations de gens.
Gérer ces torts demande des actions et la restitution des terres est l’une des mesures que l’Église pourrait prendre immédiatement, selon Dëneze Nakehk'o
, ajoutant que le rejet de cette doctrine est demandé par les peuples autochtones depuis des centaines d’années.Le message des peuples autochtones est le même depuis plus de 500 ans. [...] La différence, c'est que le public et les gens commencent à écouter et à être attentifs à ce qui se passe.
Avec les informations de Lawrence Nayally, Juanita Taylor, Toby Otak et Kanina Holmes