Assurance auto : des hausses salées pour des milliers de conducteurs
Les Ontariens payaient déjà leur assurance auto près de 1700 $ en moyenne en 2022. Dans le Grand Toronto, la facture s'élevait à plus de 2200 $.

Les conducteurs en Ontario ont payé en moyenne près de 1700 $ en 2022 en primes annuelles d'assurance auto (plus de 2200 $ dans le Grand Toronto), selon l'Autorité ontarienne de réglementation des services financiers. (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Frank Gunn
Des augmentations de 5 %, 10 %, 15 %, voire jusqu'à 22,5 % des primes d'assurance automobile attendent de nombreux automobilistes en Ontario ce printemps et cet été lors du renouvellement de leur police.
L'Autorité ontarienne de réglementation des services financiers a approuvé plus de 25 requêtes de compagnies d'assurance auto – parmi les plus importants assureurs de la province – pour des hausses de primes ce printemps et cet été.
L'augmentation moyenne de ces primes est de 7 %.
Quelques exemples :
- Les clients de Desjardins pourraient faire face, selon leur police, à des hausses moyennes d'environ 1,5 % à 5 % en avril et en mai.
- TD doit aussi hausser ses primes d'environ 5 % en mai.
- Intact réduira les primes de certains clients et augmentera celles d'autres conducteurs de 1,53 % en juillet, alors que certains clients d'Echelon devront payer 14,94 % de plus à partir de ce mois-là.
- Certains clients d'Allstate font face à des hausses pouvant atteindre 15 % ce printemps.
- La hausse du coût des polices de Northbridge pourrait atteindre 22,52 % ce printemps et cet été.

Nellie Furtado dit qu'elle a besoin d'une voiture pour se rendre au travail et faire ses courses.
Photo : Radio-Canada
La Torontoise Nellie Furtado, qui est avec Desjardins, est résignée à payer plus.
On n'a pas le choix.
Elle ne croit pas trouver un meilleur prix en changeant d'assureur.
Hausses de primes (printemps-été)
Compagnie | Hausse |
---|---|
Intact | -0,2 % à 1,53 % |
CAA | -10,49 % à 2,17 % |
Aviva | -0,03 % à 3,94 % |
Desjardins | 1,46 % à 5 % |
TD | 0 % à 5,04 % |
Co-operators | 5,99 % |
SGI | 9,71 % à 9,73 % |
Definity | 3,43 % à 12,28 % |
Facility Association | 13,08 % |
Echelon | 14,94 % |
Allstate | 0 % à 15 % |
Northbridge | 4,96 % à 22,52 % |

Jason De Carlo dit que ça coûte « cher » d'assurer un véhicule à Toronto.
Photo : Radio-Canada
Jason De Carlo, qui paie déjà 300 $ par mois pour assurer son VUS de luxe, raconte que la hausse de ses primes s'ajoute à l'augmentation de ses factures de téléphone et d'épicerie, notamment.
C'est quand même cher.

Douglas Ford raconte que ses enfants dépensent beaucoup pour leur assurance auto à cause de leur âge, ce qu'il trouve injuste.
Photo : Radio-Canada
Douglas Ford de Bobcaygeon, au nord de Peterborough, dit que les primes pour sa camionnette, qui s'élèvent à 1600 $ par an, sont raisonnables
. Il ajoute toutefois que la facture peut être salée pour les jeunes conducteurs comme ses enfants.
Les nouveaux conducteurs paient 3000 $ à 5000 $, même s'ils n'ont rien fait de mal. C'est injuste.
Cela dit, il comprend que les assureurs doivent couvrir leurs dépenses, notant que le coût des véhicules a bondi. Le coût d'une camionnette comme la mienne est passé de 40 000 $ à 60 000 $ et plus durant la pandémie
, raconte-t-il.
À lire aussi :
Selon les plus récentes données de l'Autorité ontarienne de réglementation des services financiers, les conducteurs de la province payaient déjà en moyenne 1674 $ annuellement en octobre 2022.
La moyenne pour la région de Toronto était de 2245 $.
Les assureurs se défendent
Desjardins affirme que « plusieurs éléments expliquent les hausses de primes partout au pays », attribuant la situation à la hausse des réclamations et à l'inflation, notamment.
On constate une hausse du nombre de collisions liée à la reprise des habitudes de déplacements et aussi du nombre de vols de voiture
, explique la porte-parole Valérie Lamarre.
Elle ajoute que le coût des pièces et des réparations a explosé
.
Pensez au remplacement d’un rétroviseur qui aujourd’hui est chauffant, muni de clignotants intégrés et de capteurs d’angles morts à recalibrer après un impact.
Même son de cloche de la part de Facility Association, qui mentionne également les vols de catalyseurs.
Comment faire baisser ses primes?
Le Bureau d'assurance du Canada (BAC) recommande ces approches pour payer moins cher en assurance auto :
- magasiner entre assureurs
- combiner assurance auto et maison
- augmenter sa franchise
- maintenir un bon dossier de conducteur
- acheter des pneus d'hiver
L'analyste Matt Hands du site web Ratehub recommande lui aussi aux conducteurs de magasiner
, soulignant que ce ne sont pas tous les assureurs qui augmentent leur taux ce printemps et cet été.
Certains assureurs, ajoute-t-il, offrent des rabais de fidélité et des économies si on combine ses polices pour l'auto et la maison.
Nous comprenons que les augmentations peuvent être difficiles; celles-ci sont toutefois comparables aux mesures adoptées par d’autres compagnies d’assurance et nous continuons d’offrir des tarifs concurrentiels
, dit une porte-parole de Sonnet/Definity, qui affirme que les assureurs font face à diverses pressions
comme l'inflation.
Charles Pare de Northbridge cite l'augmentation de la fréquence des réclamations et de leur coût.
Les augmentations de taux reflètent le fait que nous n’avons pas augmenté les taux des Assurances Federated de façon notable en près de 10 ans.
Echelon, qui appartient au groupe CAA, explique qu'elle n'a pas augmenté ses taux du tout
durant la pandémie et qu'elle dessert un petit segment du marché à haut risque
.
Intact/Belair affirme ne pas pouvoir commenter, parce que l'entreprise est cotée en bourse. Pour cette raison, nous ne divulguons pas d’information sur notre tarification
, explique la porte-parole Carine Salvi.
TD a refusé de commenter, soulignant que la question touche toute l'industrie. La compagnie nous a dit de contacter le BAC.
SGI, Co-operators et Allstate n'ont pas répondu à notre demande de commentaire.
Inflation et fraude
Le BAC cite une confluence de facteurs
, y compris l'inflation, des perturbations dans la chaîne d'approvisionnement, la pénurie de main-d'œuvre et des tierces parties, pour expliquer la hausse des primes en Ontario.
En 2021, la réclamation moyenne d'indemnisation pour un accident était de 35 833 $ en Ontario comparativement à 8717 $ en Alberta.
Les vols de véhicules sont en forte hausse en Ontario, ajoute le BAC.
Le Bureau d'assurance rejette l'idée d'un plafond limitant l'augmentation des primes, affirmant que ce genre de mécanisme a échoué ailleurs dans le monde.
Le BAC ajoute que les assureurs ont accordé des allègements d'environ 1,8 milliard de dollars à leurs clients en Ontario durant la pandémie.
Selon l'analyste en assurance Matt Hands du site web Ratehub, nombre de compagnies d'assurance font du rattrapage
après avoir gelé ou réduit leur taux durant la pandémie. C'est sans parler de l'impact de la fraude et de l'inflation, dit-il.
Il y a quelques années, remplacer un parebrise coûtait quelques centaines de dollars. C'est rendu des milliers de dollars.
Cela dit, il croit que des changements en matière de réglementation gouvernementale qui pourraient limiter les hausses de primes avancent à pas de tortue
.

Matt Hands de Ratehub affirme que les changements de réglementation avancent à « pas de tortue » actuellement.
Photo : Radio-Canada
M. Hands dénonce lui aussi ce que le Nouveau Parti démocratique (NPD) et d'autres critiques qualifient de discrimination par code postal.
J'habitais à Toronto avant de déménager à London et je payais beaucoup plus en assurance
, raconte-t-il. Oui, le risque de vol et d'accident est plus élevé à Toronto, mais si j'ai un dossier vierge et de l'expérience comme conducteur, pourquoi suis-je quand même pénalisé?
Le gouvernement en fait-il assez?
Le député torontois Tom Rakocevic, porte-parole du NPD en matière d'assurance auto, rétorque que les allègements accordés durant la pandémie n'étaient pas des économies réelles dans bien des cas.
Selon lui, pour avoir des économies substantielles, il fallait souvent que le conducteur réduise sa couverture, en optant par exemple pour une police qui couvre le vol et le feu uniquement, parce qu'il ne se servait plus de son véhicule ou l'utilisait peu.

Le député du NPD Tom Rakocevic accuse le gouvernement Ford de protéger les assureurs et leurs profits plutôt que les conducteurs.
Photo : Radio-Canada
M. Rakocevic accuse le gouvernement de Doug Ford de prendre parti
pour les assureurs et leurs importants profits
au lieu de défendre les conducteurs.
Nous sommes les meilleurs conducteurs au Canada, mais nous payons les primes les plus élevées au pays.
Le gouvernement Ford a refusé, dit-il, d'appuyer son projet de loi privé pour mettre fin à la discrimination par code postal.
Devrait-il y avoir un plafond annuel d'augmentation des primes? M. Rakocevic pense qu'il s'agit de l'une des possibilités
qui pourraient être évaluées.
De son côté, le gouvernement Ford affirme que le budget 2023 contenait plusieurs initiatives pour limiter la facture
des automobilistes, que ce soit en luttant contre la fraude ou en réduisant les coûteux différends.
Le gouvernement a un plan pour continuer à réparer [les problèmes liés à] l'assurance automobile.
Parmi les initiatives gouvernementales, il mentionne :
- Inciter les assureurs à offrir plus d'options à leurs clients, y compris des programmes établissant la prime selon l'usage du véhicule grâce à la télémétrie;
- Abolir à partir de janvier 2024 l'obligation d'avoir une couverture contre les dommages matériels causés à un véhicule par un autre automobiliste (indemnisation directe);
- Demander à l'Autorité ontarienne de réglementation des services financiers d'évaluer la question de la discrimination par code postal et de créer un outil pour répertorier les cas de fraude.
M. Hands de Ratehub croit que l'assurance télémétrique pour laquelle la prime varie selon la conduite pourrait être un produit novateur
. En revanche, il se demande qui aura avantage, à moins d'avoir une vieille voiture, à abandonner l'indemnisation directe et à risquer de ne pas être remboursé en cas de vol ou d'accident.
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Des gouvernements ontariens successifs ont promis de faire baisser les primes d'assurance auto, sans grand succès, y compris les libéraux de Kathleen Wynne qui avaient promis une réduction de 15 % en 2013.
En 2022, la vérificatrice générale de l'Ontario, Bonnie Lysyk, affirmait dans un rapport que le gouvernement Ford peut faire davantage
pour réduire les taux.
Parmi ses recommandations :
- « L'Ontario pourrait payer directement pour le traitement des blessures subies lors d’un accident d’automobile, à l’instar de l’Alberta, plutôt que de verser de l’argent aux blessés pour qu’ils puissent obtenir leur propre traitement. »
- « L’Ontario pourrait suivre la Colombie-Britannique et la Saskatchewan dans la mise en œuvre d’un régime de permis ou de certification pour les ateliers de réparation afin de protéger les consommateurs contre les mauvaises réparations et la fraude. »
Manque de transparence?
En Ontario, un assureur doit obtenir l'approbation de l'Autorité ontarienne de réglementation des services financiers pour augmenter ses primes d'assurance auto.
L'Autorité évalue les projections de futures réclamations
d'un assureur demandant une hausse de taux pour que les primes demeurent raisonnables
, explique la porte-parole Russ Courtney. Elle souligne elle aussi que des facteurs comme l'inflation et la hausse du prix des pièces font grimper le coût des réclamations.
Les primes que la compagnie d’assurance facture doivent être suffisantes pour couvrir ses obligations en matière de sinistres et ses dépenses d’exploitation, et se traduire par un profit raisonnable.
Radio-Canada a demandé à l'Autorité le pourcentage des requêtes de hausse de taux rejetées l'an dernier et cette année.
Sans répondre directement à la question, l'organisation assure que l'approbation de toute augmentation est fondée sur les données
. Si la hausse demandée est jugée trop élevée, l'assureur peut modifier sa requête et proposer une hausse moindre, ajoute Mme Courtney.
Pour sa part, le député Rakocevic du NPD réclame plus de transparence
dans le processus d'approbation des hausses de primes. On dirait que les compagnies d'assurance se fixent un taux et cherchent ensuite des raisons de le justifier
, lance-t-il.
L'Autorité de réglementation des services financiers recommande aux automobilistes de magasiner
entre compagnies d'assurance pour obtenir un meilleur taux.