L’opposition doute qu’il soit possible d'adopter d'ici juin le projet de loi 15 en santé

Le projet de loi 15, qui vise à réformer le réseau de la santé, fait grincer des dents les partis d'opposition. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
« Projet de loi mammouth, Saint Graal de la centralisation, réforme de bureaucrates » : les partis d'opposition à Québec accueillent avec méfiance le projet de loi 15 du ministre de la Santé, Christian Dubé, et mettent en garde le gouvernement Legault contre le fait de préconiser « une approche bulldozer » pour le faire adopter d'ici la fin de la session parlementaire, en juin.
En conférence de presse, mercredi, le ministre de la Santé du Québec, Christian Dubé, s'était fait demander s'il prévoyait faire adopter ce projet de loi d'ici la fin de la session parlementaire, en juin. Ce serait tout un succès
, avait-il répondu en souriant.
Il faut poser la question aux oppositions
, avait-il poursuivi, précisant qu'il était, lui, capable de travailler jour et nuit pour que ça arrive
et qu'il serait pertinent de siéger plus longtemps
si nécessaire, vu l'importance de cette réforme.
Aux yeux d'André Fortin, porte-parole de l’opposition officielle en matière de santé, il apparaît particulièrement ambitieux
d'adopter d'ici l'été ce projet de loi que le ministre Dubé qualifie lui-même de costaud
.
Je n'ai jamais vu un projet de loi de 1200 articles et ça fait huit ans que je suis un parlementaire
, a déclaré le député libéral de Pontiac en conférence de presse, jeudi.
On propose une mégaréforme, une réforme de structure sur la façon de faire dans le réseau de la santé
, a ajouté M. Fortin, pour qui il est risqué de ne pas étudier, article par article, un projet de loi, quel qu'il soit.
Les libéraux entendent collaborer
avec le gouvernement dans l'étude du projet de loi 15, mais ils déconseillent au ministre Dubé de leur imposer le tout selon une approche bulldozer
.
Comme le projet de loi contient beaucoup d'aspects différents
, il y aurait peut-être lieu de l'étudier par morceaux
, suggère André Fortin.
« Je ne comprends pas pourquoi le ministre a insisté pour tout mettre dans le même projet de loi. »
Il va y avoir une consultation qui est très nécessaire
, a insisté M. Fortin.
Une réforme de bureaucrates, dit Québec solidaire
Tant les libéraux que les députés de Québec solidaire (QS) et du Parti québécois (PQ) accueillent avec méfiance le projet de loi 15 et les transformations qu'il propose.
Une réforme pas faite pour le monde, mais pour des bureaucrates
, critique Gabriel Nadeau-Dubois, de QS .
Avec cette réforme, le chef du deuxième groupe d’opposition reproche au gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) de centraliser encore plus le réseau de la santé que l'avaient fait les libéraux lorsqu'ils étaient au pouvoir.
« C'est le Saint Graal des réformes centralisatrices. »
Les solutions pour réparer le système de santé, qui les a? Les bureaucrates ou le monde sur le terrain?
questionne M. Nadeau-Dubois.
Malgré ces vives critiques, Québec solidaire se refuse à prédire qu'il votera contre la pièce législative déposée par le ministre de la Santé. Il s'agit de réactions préliminaires
et il y aura des consultations particulières, comme c'est le cas lors de l'étude d'un projet de loi, précise le parti.
Cela dit, une adoption en juin est improbable, selon QS : M. Dubé est bon dans les chiffres; je l'invite à compter le nombre de jours qu'il y a d'ici juin
, a ironisé Vincent Marissal, député de Rosemont et critique en matière de santé pour QS.
« C'est lui [Christian Dubé] qui a créé un monstre et il voudrait qu'on adopte le mammouth en une bouchée. »
M. Marissal dit espérer que le gouvernement de François Legault ne fera pas adopter le projet de loi 15 sous le bâillon.
Un système qui ne sera plus imputable, craint le PQ
On a écouté le ministre Dubé avec courtoisie
, a pour sa part déclaré Joël Arseneau, du Parti québécois, qualifiant de bonne
la rencontre de 45 minutes durant laquelle le ministre de la Santé leur a présenté son projet de loi.
Mais cette réforme comporte le risque que le système de santé n'ait plus de comptes à rendre à personne
, selon le député des Îles-de-la-Madeleine, qui en a lui aussi contre la centralisation qu'elle sous-tend.
Et, considérant l'ampleur de projet de loi, Joël Arseneau doute que les parlementaires puissent passer à travers ses 1200 articles d'ici la fin de la session, en juin. Il espère que ce sera fait d'ici la fin de 2023, tout au plus.
On n'a pas lésiné pour faire tous les changements auxquels les Québécois sont en droit de s'attendre
, avait dit Christian Dubé sur ICI RDI mercredi en présentant son projet de loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace
.
Faciliter l'accès des personnes à des services sécuritaires en renforçant la coordination des composantes du système est l'une de ses grandes visées. Instituer Santé Québec en est une autre. Cette nouvelle entité devra, entre autres mandats, mettre en place des mécanismes d'accès aux services.
La réforme a été froidement accueillie par les syndicats du milieu de la santé, qui dénoncent une plus grande centralisation et un manque d’écoute de la part du gouvernement.