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Bourses Perspective Québec : « On tombe entre deux chaises! »

Elles s’appellent Catherine, Vanessa et Clélie. Elles veulent toutes devenir enseignantes au primaire. Elles remplissent tous les critères pour recevoir la bourse Perspective Québec, mais on la leur refuse toujours.

Une photo de famille.

Catherine Gariépy multiplie les démarches depuis janvier dernier pour faire reconnaître son droit à recevoir la bourse Perspective Québec.

Photo : Jessica Proulx

Depuis longtemps, Catherine Gariépy caresse le rêve de devenir enseignante au primaire. Cependant, au début de la vingtaine, intimidée par des études universitaires alors qu’elle fonde sa petite famille, elle opte plutôt pour le cégep et devient infirmière auxiliaire.

Puis elle apprend que l’Université du Québec à Montréal (UQAM) a commencé à offrir le baccalauréat en éducation préscolaire et enseignement primaire à temps partiel, en tous points identique à celui à temps plein, mais avec un cheminement plus lent, constitué de cours de soir et la fin de semaine. 

La formule est mieux adaptée à sa vie de famille et à ses besoins financiers. L’aventure lui prendra six ans au lieu de quatre, mais qu’importe : elle saute dans le train. Je voulais montrer à mes enfants que tout était possible, dit-elle.

Elle fait donc cohabiter ses études avec de la suppléance au primaire à Valleyfield et son boulot quotidien de mère de trois enfants de moins de 5 ans.

Vanessa Schmidt, elle, opte aussi pour ce programme, tout en continuant son travail comme éducatrice spécialisée et en élevant ses jeunes enfants. Elle donne naissance à son deuxième enfant pendant sa session d’automne, mais termine tout de même avec succès ses cours. Je ne pensais pas être capable de tout mener de front. C’est quelque chose qui me rend fière.

Clélie Jourde-Provost est mère de quatre enfants. Elle était éducatrice à la petite enfance, mais elle a toujours souhaité enseigner. Le cheminement à temps partiel lui a donné la motivation nécessaire pour se lancer, à 40 ans, dans cette réorientation. J’adore ça, les cours sont très intéressants. J’ai même commencé à faire un peu de suppléance! dit-elle avec entrain.

La mère et ses quatre jeunes enfants dans leur cuisine.

Clélie Jourde-Provost souhaite depuis longtemps devenir enseignante au primaire et, avec quatre jeunes enfants à la maison, l'aide financière de la bourse Perspective Québec serait la bienvenue.

Photo : Gracieuseté : Clélie Jourde-Provost

À l’automne 2022, toutes trois apprennent que les bourses Perspective Québec seront versées à tous les étudiants inscrits à temps plein dans un programme d’études qui mène à un domaine touché par une pénurie de main-d’œuvre, comme l’enseignement. Leur bac fait partie des programmes ciblés.

Les étudiants à temps partiel sont exclus du programme de bourses Perspective Québec (PBPQ), mais elles devraient pouvoir demeurer admissibles à cette aide financière. En effet, le fait qu’elles soient enceintes ou qu’elles vivent avec au moins un enfant de moins de 6 ans leur permet de profiter d’une exception et d’obtenir le statut d’étudiantes réputées à temps plein.

Un ping-pong bureaucratique

C’est au moment de déposer leur demande de bourse que les choses se corsent. Elles sont toutes rejetées. Votre programme d’études ne fait pas partie de la liste de programmes admissibles, invoque-t-on dans la lettre de refus.

Il semble que seul le cheminement à temps plein ait été inscrit comme parcours admissible pour les bourses. Cela fait en sorte d’exclure de cette aide financière tous les étudiants réputés à temps plein dans ce bac à temps partiel.

Malgré un emploi du temps plus que chargé, avec un nouveau-né à la maison, Catherine Gariépy entreprend rapidement des démarches pour faire valoir son droit.

« On répond à tous les critères, alors pourquoi on est bloquées? Il y a quelqu’un qui a fait une erreur bureaucratique là-dedans. Ce n’est pas normal qu’on tombe entre deux chaises! »

— Une citation de  Catherine Gariépy, étudiante au baccalauréat en éducation préscolaire et enseignement primaire à l'UQAM

Elle contacte le registrariat de l’UQAM, puis le ministère de l’Enseignement supérieur (MES), puis sa députée locale. Le registrariat de l’UQAM et le MES se renvoient la balle.

Dans un courriel, un employé du MES lui indique que pour qu’une situation réputée à temps plein soit admissible au PBPQ, l’établissement [d’enseignement] doit avoir déclaré ce programme au préalable. On lui recommande de communiquer avec le registraire de l’UQAM. Ce dernier lui répond que le choix des programmes semblait être une prérogative des ministères impliqués dans l’opération main-d’œuvre.

Catherine se tourne donc vers sa députée, qui, après quelques démarches, lui affirme qu’elle devrait être admissible à la bourse et lui recommande de remplir une demande de révision à l’Aide financière aux études. La jeune mère s’empresse de déposer cette contestation, mais, près d’un mois plus tard, elle est toujours sans réponse. Tout le monde se renvoie la balle, c’est épuisant, fait remarquer la femme de 26 ans.

Vanessa Schmidt fait de son côté des démarches très semblables à la suite du refus de sa demande initiale. Le MES rejette la faute sur l’UQAM et lui recommande de contacter le bureau d’aide financière de son université. Ce dernier la réfère au registrariat de l’UQAM, qui, à son tour, lui indique que c’est le Ministère qui avait refusé d’ajouter le bac à temps partiel dans les programmes admissibles, nous dit-elle. Elle attend elle aussi le résultat de sa demande de révision.

Vanessa, son conjoint et ses deux enfants sourient dans leur salon, décoré pour Noël.

Vanessa Schmidt et sa petite famille

Photo : Gracieuseté : Vanessa Schmidt

Fatiguées de se battre

Les demandeurs de la bourse Perspective Québec reçoivent généralement une réponse et un premier versement très rapidement, en seulement quelques jours. Catherine et Vanessa trouvent l’imbroglio dans lequel elles sont plongées très frustrant.

 Ça fait presque deux mois qu’on se bat pour avoir la bourse, alors que c’est notre droit de la recevoir, dit la première en soupirant. Avec des enfants en bas âge, on n’a pas l’énergie de se battre comme ça! renchérit la seconde. Malgré tout, elles ne jettent pas l'éponge et espèrent avoir bientôt gain de cause.

Les trois mères de jeunes familles ne sont par ailleurs pas les seules dans cette situation : un groupe d’étudiantes dans la même situation se rassemblent. Nous sommes au moins 10 dans notre situation seulement dans notre cohorte, précise Vanessa Schmidt.

Ensemble, dans un groupe privé sur les réseaux sociaux, elles témoignent de l’évolution de leurs démarches et s’encouragent les unes les autres.

« J’ai l'impression qu’on nous a fait une fausse promesse. Ça n’a aucun sens; on veut encourager les gens à se tourner vers des métiers en pénurie de main-d'œuvre, mais on nous met des bâtons dans les roues. »

— Une citation de  Vanessa Schmidt, étudiante au baccalauréat en éducation préscolaire et enseignement primaire à l'UQAM

Quand elle a essuyé un premier refus, Clélie a tout d’abord pensé abandonner ses démarches et faire le deuil de cette aide financière. On retourne aux études, même si on a des enfants, même si on a un travail, mais finalement, on se sent oubliées et ignorées par le gouvernement, dit-elle.

Aujourd'hui, elle a repris espoir. Au début, j’avais abandonné. Mais quand j’ai vu Catherine et Vanessa se démener, je me suis dit qu’il ne fallait pas lâcher le morceau!

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