La microbrasserie Étienne Brûlé ferme définitivement ses portes

La microbrasserie Étienne Brûlé ferme définitivement ses portes.
Photo : Radio-Canada / Frédéric Pepin
Environ huit ans après son ouverture, la microbrasserie Étienne Brûlé, située à Embrun dans l’Est ontarien, ferme définitivement ses portes, mardi soir.
Il y a tant d’obstacles, de circonstances et de défis que…c’est avec un cœur triste et brisé que je me vois devoir fermer la brasserie Étienne Brûlé Brewery…désolé
, a écrit Richard Ménard dans une vidéo diffusée sur la page Facebook de la microbrasserie, lundi.
Un véritable coup dur pour M. Ménard qui explique qu’en 2020, il a voulu acheter l’immeuble situé au 893 rue Notre-Dame à Embrun , qui était à l'époque une propriété de la municipalité de Russell.
La Municipalité lui avait alors demandé plus de 400 000 dollars.
Or,[à cause de la pandémie] je n’ai pas été capable d’aller chercher du financement [pour acheter le bâtiment]
, a expliqué M. Ménard en entrevue avec Radio-Canada.
En janvier 2022, la Municipalité a finalement mis en vente l'édifice, mais entre-temps, le prix demandé avait doublé, rendant l’acquisition plus difficile, ajoute M. Ménard.
Je n’avais pas espoir de l’acheter au prix demandé
, dit-il.
Finalement, selon un communiqué publié par le maire de Russell, Pierre Leroux, le 13 mars dernier, le conseil municipal a vendu l’immeuble au prix de 750 000 dollars.
Le bail du locataire actuel se terminait en décembre 2020 et la municipalité a tenté à plusieurs reprises de trouver des conditions mutuellement acceptables. Malheureusement, le fossé était trop grand et irréalisable ; par conséquent, dans le meilleur intérêt de nos résidents, le Conseil a pris cette décision
, explique le maire dans son communiqué.
M. Leroux se dit également heureux que l'établissement continue d'être exploité en tant que restaurant, offrant à nos résidents un lieu de rencontre et de socialisation autour d'un verre ou d'un repas.
Concurrence déloyale et augmentation du coût de la vie
La hausse des prix de biens de première nécessité et essentiels au fonctionnement de la microbrasserie, qui fait également office de restaurant, a été une autre difficulté à laquelle M. Ménard a dû faire face.
Nous autres, on est pris entre le pourvoyeur et le client que la marge n’est plus là
, continue M. Ménard.
Nicolas Malboeuf, qui est le propriétaire de la brasserie Tuque de Broue, à Embrun, trouve également que la réalité économique fragilise les microbrasseries.
M. Malboeuf se souvient avoir ouvert son commerce à Embrun, à peine une semaine après M. Ménard.
Ce n’était pas la compétition
, assure-t-il.
Mais y régnait un véritable esprit d’entraide au sein de la communauté, affirme M. Malboeuf.
Aujourd’hui il regrette, entre autres, la concurrence déloyale que mènent les grandes entreprises aux microbrasseries locales.
En ce moment c’est assez rock’n’roll d’être un brasseur. Les produits primaires ont tous augmenté en flèche. (Les frais d’expéditions) n’ont aucun bon sens. Puis moi si je monte ma bière de 10 cents, 3 % ou 4% ça a une grande conséquence sur le client final. [...] c’est nous qui absorbons cette différence. C’est très difficile. [...] les gens doivent faire des choix, est-ce qu’on ferme ? On continue?
déplore-t-il.
Les marchés [grandes entreprises] amènent de l’argent pour le marketing, pour le support, tout ça. Ce n’est pas nous autres
, surenchérit-il.
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Grand vide dans la communauté
M. Malboeuf en est certain, le départ de la brasserie Étienne Brûlé laissera un très grand vide au sein de la communauté, une fermeture qui sera difficile à combler.
Étienne Brûlé est une grande place pour la francophonie à Embrun. [...] Ça va être un grand coup pour la communauté à Embrun et la communauté brassicole
, partage-t-il.
Même son de cloche du côté du député fédéral de Glengarry-Prescott-Russell, Francis Drouin.
Étienne Brûlé était quand même un fleuron dans notre communauté
, commente-t-il.
Pourtant, M. Ménard en est certain, en vendant l’immeuble, la Municipalité a planté le dernier clou dans le cercueil de son entreprise brassicole.
Je me suis tassé, débattu pour essayer de continuer. Il n’y a personne qui est là pour aider. Moi c’est fini et je laisse la chance aux autres
, a-t-il dit.
La Chambre de commerce de Prescott-Russell a refusé la demande d'entrevue de Radio-Canada.
Avec les informations de Frédéric Pepin et Mohamed Tiené