Un régulateur américain attaque la plateforme Binance
Changpeng Zhao, le patron de Binance
Photo : Reuters / Darrin Zammit Lupi
L'autorité américaine de régulation des produits financiers dérivés, la CFTC, a saisi lundi la justice contre la plus grosse plateforme d'échanges de cryptomonnaies au monde, Binance, ainsi que son patron, Changpeng Zhao, accusés d'avoir volontairement contourné la réglementation américaine.
C'est un nouvel épisode de l'offensive entamée par les régulateurs de l'autorité américaine de régulation des produits dérivés (CFTC) et de la Commission des valeurs mobilières et des changes (SEC) contre les pratiques des acteurs du milieu des cryptomonnaies.
Ils cherchent ainsi à compenser l'absence de législation pour encadrer ce secteur d'activité, même si plusieurs textes sont en cours de discussion au Congrès. Leur offensive s'est accélérée après la faillite, en novembre, de FTX, deuxième plateforme en importance au monde.
Dans le document déposé devant un tribunal fédéral de l'Illinois, la CFTC
réclame notamment que Binance soit interdit d'enregistrement et de vente de certains produits financiers aux États-Unis.Binance a qualifié l'action en justice d'inattendue
et de regrettable
, indiquant collaborer avec la CFTC depuis plus de deux ans
, selon une réaction transmise à l'AFP.
« Nous prévoyons de continuer à travailler avec les régulateurs américains et du monde entier. »
Le régulateur reproche à Binance et à plusieurs de ses dirigeants d'avoir vendu à des clients américains des produits en ne respectant pas la réglementation financière même s'ils s'étaient engagés à ne pas solliciter d'utilisateurs aux États-Unis.
Selon la CFTCsur instruction de Zhao, Binance a recommandé à ses employés et à ses clients de contourner les contrôles en matière de conformité [réglementaire] pour maximiser ses profits
.
Binance a notamment choisi de ne pas demander à ses utilisateurs américains une preuve d'identité, comme le requiert la réglementation financière aux États-Unis, selon le document déposé lundi.
Depuis des années, Binance a travaillé activement à faire tourner son activité et à éviter de se mettre en conformité
avec la réglementation, a commenté le président de la CFTC , Rostin Behnam, cité dans le communiqué.
Selon lui, ceci devrait être perçu comme un avertissement par tous les acteurs du milieu des actifs numériques
.
L'autorité ne tolérera pas d'évitement volontaire de la législation américaine
, a martelé le responsable.
Selon des courriels internes datés de 2019 et mentionnés dans le document déposé lundi, les dirigeants de Binance évaluent à au moins 20 % la part du trafic de la plateforme attribuable à des utilisateurs américains et attribuent la même proportion des revenus du groupe à ces clients.
Binance affirme avoir alloué des moyens supplémentaires pour s'assurer [qu'il n'y avait pas] d'utilisateurs actifs américains sur [la] plateforme
et avoir fait passer les effectifs assignés à la conformité réglementaire de 100 à 750 personnes.
Ce n'est probablement que le début
Le coup porté par la CFTC
à Binance a secoué tout le milieu des cryptomonnaies. Le bitcoin est tombé à son plus bas niveau depuis dix jours, à 26,543 $ US.Quant au Binance Coin (BNB), une cryptomonnaie rattachée à la plateforme Binance et quatrième devise numérique pour ce qui est de la valorisation globale, elle a perdu plus de 6 %.
Tout le monde savait que ce jour allait arriver
, a commenté sur Twitter A. J. Nelson, entrepreneur et créateur de la plateforme Rain. Ce n'est probablement que le début. Tous les regards sont braqués sur cette action en justice
, a écrit Meltem Demirors, de la société d'investissement spécialisée en actifs numériques CoinShares.
Outre Binance et Changpeng Zhao, la CFTC
a également mis en cause le responsable de la conformité, Samuel Lim, et deux filiales irlandaises du groupe.Mi-février, le département des services financiers de l'État de New York avait ordonné à la société Paxos de cesser d'émettre au nom de Binance une cryptomonnaie dite stable ou stablecoin
, le BUSD, un premier coup porté à la plateforme.
La SEC
fait valoir que le BUSD est un titre financier et doit donc être enregistré auprès d'elle et soumis à la réglementation en vigueur.La semaine dernière, la principale plateforme d'échanges américaine, Coinbase, a révélé dans un document déposé auprès de la SEC que l'autorité lui avait signifié qu'elle allait prochainement la poursuivre pour violation de la réglementation sur les valeurs mobilières.