Trois pesticides enfin éliminés de l’air autour des Grands Lacs

Un pygargue à tête blanche. (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Richard Lam
Trois pesticides bannis en vertu de la convention de Stockholm sur les polluants seraient enfin éliminés dans la région des Grands Lacs.
Une nouvelle étude publiée le mois dernier dans la publication Environmental Science and Technology démontre que leur concentration a atteint un niveau pratiquement indétectable autour de cinq stations d’échantillonnage.
« Cette étude est une bonne façon de démontrer que les politiques concernant la pollution fonctionnent, mais qu’elles prennent du temps à prendre effet. »
L’endosulfan, l’alpha-HCH et le lindane sont maintenant considérés comme imperceptibles.
D’après des spécialistes de l’environnement, il s’agit d’une bonne nouvelle pour l’ensemble du Canada.
Ces résultats s’appliquent probablement à toutes les régions où ces produits chimiques ont été utilisés, puis bannis
, estime Marta Venier, chimiste de l’environnement à l’Université de l’Indiana et co-auteure de l’étude.
Tout comme le fameux DDT, ces produits chimiques font partie de la liste des “Dirty Dozen”, composés de pesticides connus et difficiles à éliminer de l’environnement, de même que de la faune.
L’exposition prolongée peut provoquer des problèmes neurologiques et un dérèglement des hormones chez les animaux. Ils sont également considérés comme cancérigènes selon le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé.
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Une lente disparition des écosystèmes
Si vous pouvez éliminer ou limiter l'utilisation de quelque chose de nocif, vous verrez éventuellement une réduction de sa présence dans l’environnement
, explique James Longstaffe, professeur associé en chimie environnementale à l’Université de Guelph.
Puisque les composés retrouvés dans plusieurs pesticides sont stables et résistants, le secteur agricole et les villes s’en sont servis pendant des décennies avant qu’on ne réalise les dégâts qu’ils peuvent causer et qu’on les bannisse.
Ce n’est pas pour rien que ces produits chimiques font partie de la douzaine
, rappelle Mme Venier. Ils ont un impact important sur l’environnement.
Ces pesticides peuvent être absorbés pour une durée indéterminée par les cellules graisseuses des animaux qui les ingèrent, un phénomène appelé bioaccumulation.
Avec une consommation suffisante, il est possible d’atteindre des niveaux d’accumulation toxiques, voire dangereux, et de transmettre le tout au prochain dans la chaîne alimentaire.
Santé Canada ignore les effets que pourraient avoir l’exposition à ces produits sur les humains. Cependant, des liens avec certaines maladies ont déjà été établis.
Les pygargues à tête blanche, les abeilles et plusieurs espèces aquatiques font partie des nombreuses à avoir subi les effets nocifs des pesticides au fil des décennies.
Heureusement, la population de pygargues croît à nouveau, mais lentement, dans certains secteurs autour des Grands Lacs.
D’autres pesticides toujours présents
Si trois sortes de pesticides sont éliminés, les niveaux de concentration d’autres produits comme le DDT et le chlordane baissent, mais demeurent importants dans certaines régions.
Le taux de HCB, un composé cancérigène, ne chute pas du tout, notamment parce qu’il est toujours émis inconsciemment lors de la fabrication de produits, indique Mme Venier.
Quand vous pensez aux pesticides qui ont été utilisés par le secteur agricole, la terre est constamment en mouvement chaque saison ou chaque année
, explique-t-elle. Cela fait en sorte que ces substances se retrouvent dans l’air plus rapidement.
Dans un milieu urbain, Mme Venier est d’avis que la terre devient un réservoir à pesticides puisqu’elle est très peu dérangée.
M. Longstaffe indique qu’il s’agit d’une hypothèse très forte
. Il ajoute que les différences en matière de composantes dans le sol peuvent également avoir un effet sur la rapidité du processus, mais il faudrait tester cette théorie.
Les composés sont souvent éliminés à l’aide de microbes trouvés profondément dans le sol. Une fois dans l’air, les composantes chimiques sont détruites par une réaction causée par la lumière du soleil.
C’est dans l’Arctique où se retrouveront ultimement la plupart des contaminants
, révèle-t-il. Ils sont envoyés dans l’air puis ils sont poussés par le vent.
Même si le DDT n’est plus utilisé en Amérique du Nord depuis près d’un demi-siècle, les chercheurs prédisent qu’il faudra attendre encore quelques décennies pour que ses traces disparaissent complètement.
Avec les informations de Darius Mahdavi de CBC