Doug Ford promet un budget prudent, mais sans coupes
Le gouvernement ontarien exclut les compressions budgétaires et parle de mesures ciblées pour aider les familles et les entreprises face aux turbulences économiques.
Le premier ministre Doug Ford participe à l'assemblage d'un drain d'îlot dans une manufacture d'Oakville, en compagnie du ministre des Finances, Peter Bethlenfalvy, en prévision du dépôt du budget 2023.
Photo : The Canadian Press / Nathan Denette
« Incertitude économique », « période difficile », « instabilité ». Les expressions employées par le ministre des Finances de l'Ontario évoquent le besoin de prudence, alors qu'il doit déposer jeudi son budget pour l'année 2023. Le gouvernement Ford assure cependant que le besoin de « modération » ne se traduira pas par des coupes budgétaires. Une vision qui semble s'accorder avec celle de plusieurs économistes.
En visite dans une usine de pièces de plomberie à Oakville, dans le contexte de leur tournée prébudgétaire, le premier ministre Ford et son ministre des Finances ont martelé le même message : l'incertitude économique actuelle les force à la prudence. Même si les revenus de la province ont été plus importants qu'espérés dans les derniers mois.
Les progressistes-conservateurs ne sont pas connus pour les dépenses extravagantes; ils devraient encore une fois emprunter le chemin de la prudence fiscale
. Une prudence qui ne signifie pas nécessairement rigueur ou austérité. Peter Bethlenfalvy semble avoir écarté la possibilité de compressions budgétaires. Je ne pense pas qu'on peut créer de la prospérité en coupant dans les programmes
, a-t-il répondu en point de presse, sans hésitation, lorsqu'il a été questionné sur le contenu de son budget.
Les indices dévoilés par le ministre jusqu'ici laissent d'ailleurs présager que la création d'emplois et les investissements en infrastructures, deux thèmes de prédilection du gouvernement, se retrouveront encore une fois à l'avant-plan du budget.
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Pour alléger le fardeau des familles et des entreprises devant l'inflation galopante et les aléas de l'économie, le ministre Bethlenfalvy a aussi parlé d’investissements ciblés, sans donner davantage de détails.
Le mois dernier, la province a révélé que le déficit anticipé pour l'année en cours a fondu à 6,5 milliards au cours du troisième trimestre. Il s'agissait d'une baisse de 6,4 milliards par rapport à ce qui était prévu au trimestre précédent. La force de l'économie a aussi propulsé les revenus de la province dans les derniers mois. La province a ainsi modifié ses prévisions, en hausse de 9,6 milliards de dollars.
« Le plan de notre gouvernement est le bon plan pour relever ces défis et il donne déjà des résultats. »
S'il est vrai que l'économie ontarienne a été jusqu'ici résiliente, avec des revenus en croissance ainsi qu'un niveau record de création d'emplois, la province n'est pas non plus à l'abri des secousses économiques, préviennent des observateurs, dont Marc Desormeaux, économiste principal chez Desjardins.
Je dirais qu'il faut être prudent parce qu'on ne sait pas encore la sévérité du ralentissement économique et dans le cas de l'Ontario, on voit des signes de faiblesse dans l'économie
, indique-t-il.
Les récentes données sur la consommation des ménages ontariens représentent un signe avant-coureur d'un ralentissement majeur, selon Desjardins. Marc Desormeaux anticipe d'ailleurs une récession pour la deuxième moitié de l'année 2023 à l'échelle du pays, mais plus sévère en Ontario en raison de la vulnérabilité de son marché immobilier.
Le Bureau de la responsabilité financière (BRF), un chien de garde des finances provinciales, ne dresse cependant pas un portrait aussi sombre. Le BRF
anticipe un ralentissement économique, mais évite d'utiliser le mot récession.Pour le moment, l'économie est croissante. Il y a de l'argent
, souligne le directeur du Bureau, Peter Weltman. Il admet cependant que la situation actuelle exige la recherche d’un équilibre entre la stimulation de l'économie et la rigueur. C'est toujours un équilibre entre, est-ce qu'on garde les dépenses [comme elles sont] ou on fait de grands investissements.
Et qu'en est-il de réductions d'impôts, une grande promesse électorale de Doug Ford qui remonte à 2018, mais qui ne s'est jamais matérialisée? Le budget ontarien offrira-t-il un répit aux contribuables, comme l'a annoncé le gouvernement Legault plus tôt cette semaine? Les économistes en doutent.
Ce sera plus facile de soutenir les ménages et les entreprises si on garde la situation financière assez prudente et assez conservatrice pour qu'il y ait de l'espace financier pour adresser les grands enjeux économiques de la province
, pense Marc Desormeaux.
Un crédit d'impôt et de l'argent pour former la main-d'œuvre
Le premier ministre Ford a profité de sa tournée prébudgétaire pour annoncer, en primeur, la création d'un crédit d'impôt pour les entreprises manufacturières. Elles seront admissibles à une aide pouvant atteindre deux millions de dollars par année, si elles investissent dans la machinerie et l'équipement. Le gouvernement prévoit ainsi dépenser 780 millions de dollars sur trois ans.
« Ce programme aidera les entreprises manufacturières locales à croître, à innover et, surtout, à créer des emplois rémunérés. »
Mardi, le gouvernement a aussi dévoilé un investissement de 224 millions de dollars pour construire ou moderniser des centres de formation de la main-d'œuvre. Il vise particulièrement les secteurs de l'électricité, de la soudure et de la mécanique.