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Triple meurtre de la rue Sicard : un des tueurs veut pouvoir visiter sa famille

Un périmètre de sécurité a été érigé sur la rue Sicard dans le secteur Trois-Rivières Ouest.

Trois personnes ont perdu la vie en février 2014 dans le secteur Trois-Rivières-Ouest. (Photos d'archives)

Photo : Radio-Canada

Cédric Bouchard, l’un des deux auteurs du triple meurtre de la rue Sicard survenu il y a neuf ans à Trois-Rivières, était de passage lundi avant-midi devant la Commission des libérations conditionnelles du Canada pour tenter d’obtenir le droit à des sorties supervisées. Les autorités carcérales ainsi que les proches des victimes s'opposent à sa requête, alors que le meurtrier juge important de pouvoir visiter sa famille.

Le jeune homme était âgé de 17 ans lorsqu’il a fait irruption avec Kaven Sirois dans la résidence de Trois-Rivières et tué par balle deux sœurs et l’ami de cœur de l’une d’elles. Cédric Bouchard ne connaissait aucune des victimes. Son complice Kaven Sirois souhaitait se venger après avoir été rejeté par la plus jeune sœur de laquelle il était amoureux.

En tout début d’audience, Cédric Bouchard, vêtu d’une chemise bleue et les cheveux attachés à l’arrière de la tête, s’est dit anxieux et pas très bien.

L'audience a pris fin vers 11 h 30 sans qu'une décision ne soit rendue, car le dossier est jugé incomplet par les commissaires. Une évaluation communautaire du lieu de résidence de la sœur de Cédric Bouchard, où il souhaite se rendre, doit être effectuée. Habituellement, l’audience est reportée lorsqu’un dossier est incomplet, mais dans ce cas-ci, les témoignages avaient déjà été amorcés, donc la Commission a poursuivi la démarche, par respect pour les proches des victimes.

Des témoignages émotifs

En tout, six proches des victimes assistaient à l’audience virtuelle. Deux d’entre eux ont pris la parole, soit le père et la mère de l’adolescent tué en même temps que les deux sœurs.

La mère a livré un témoignage poignant : Qu’on subvienne à ses besoins essentiels, bof, mais qu’on lui fasse cadeau de sorties familiales, ça ne passe pas.

Je fais quoi, moi, quand j’ai envie de voir mon fils, a-t-elle lancé. Mon enfant, mon bébé, celui que j’ai mis tant de soins à tenir loin des dangers.

La femme explique vivre encore aujourd’hui avec un stress post-traumatique, des crises d’anxiété, une perte de foi en la vie ainsi qu’une perte de confiance en la justice.

Elle a raconté ne pas avoir dormi une nuit complète depuis neuf ans et avoir été incapable de travailler une seule journée complète.

« Pour moi, la vie en rose, c’est fini. La vie a une teinte de gris pour toujours. Il m’a infligé un mal infini qui va se terminer à ma mort. »

— Une citation de  Mère d'une des victimes

Elle a souligné le fait que les meurtres avaient été prémédités pendant six mois, des meurtres gratuits d’une pure méchanceté. Je serai toujours en désaccord [avec sa libération] parce que c’est immoral, insiste la femme.

Pour elle, cette demande de Cédric Bouchard à la Commission des libérations conditionnelles, c’est un coup de poignard droit à mon cœur de maman. Elle a qualifié sa vie depuis le meurtre de son fils et de sa belle-fille qu’elle adorait, de film d’horreur qui ne se termine jamais.

Son seul réconfort est de savoir que les deux meurtriers sont en prison et elle demande donc à la commission de lui refuser ce droit de sortie.

Le père s’est dit inquiet et a demandé à la commission de prendre en considération la douleur des pertes qu’il a infligée et de rejeter sa demande de sorties.

Il a souligné la facilité et le hasard avec lequel Cédric Bouchard était prêt à tirer à bout portant sur des personnes qu’il n’avait jamais vues de sa vie. Il estime donc que Cédric Bouchard est un danger pour la société et qu’il ne devrait jamais être autorisé à sortir.

Le père a rappelé que Cédric Bouchard s’était comporté au tribunal comme s’il appréciait l’attention portée sur lui. Il souriait au point où les familles des victimes étaient agacées.

Cédric Bouchard appelé à s'expliquer

Cédric Bouchard a été invité par les commissaires à expliquer à quel besoin répondait la planification des meurtres. Il a indiqué que les différents scénarios lui permettaient d’évacuer les pensées violentes qu’il avait à l’intérieur de lui.

« Toute ma vie, j’ai été battu et intimidé à l’école et à la maison. »

— Une citation de  Cédric Bouchard

Il dit avoir songé trois fois au fil des mois à ne pas mettre le plan à exécution, mais qu’après avoir consommé de la drogue, il est tout de même passé à l’acte.

Tout ce que je voulais, c’était mourir, a-t-il expliqué aux deux commissaires. Je ne voulais pas voir les conséquences, j’étais centré sur moi. Cédric Bouchard mentionne qu'à cette époque, il consommait de la drogue tous les jours.

Le deuxième accusé du triple meurtre, Cédric Bouchard, lors de son interrogatoire en février 2014

Le deuxième accusé du triple meurtre, Cédric Bouchard, lors de son interrogatoire en février 2014. (Photo d'archives)

Photo : Preuve présentée en cour

Il a reconnu qu’après les meurtres, il a vécu dans le déni total et qu’ensuite, il a rejeté sur les autres la responsabilité de ses actes : sur son complice qui lui donnait de la drogue, sur son ex-conjointe qu’il qualifie de toxique et sur sa famille qui le maltraitait.

J’ai blâmé le monde entier, reconnaît-il, j’arrivais pas à faire face à ce que j’ai fait.

Il dit qu’il a mis trois ans et demi avant de prendre conscience de la gravité des gestes commis et qu’il en prend maintenant la pleine responsabilité. Le jeune homme dit être enclin à des crises de panique et à de la difficulté à faire confiance.

Cédric Bouchard dit vouloir se rendre chez sa sœur avec une escorte pour avoir une discussion avec elle et sa mère sur des événements traumatiques familiaux vécus dans le passé. Il dit être quand même sensible à la demande des victimes de ne pas faire de sorties, mais renchérit qu’il a besoin d’avoir des discussions en personne avec sa mère et sa sœur; des types de discussions qu’il soutient ne pas pouvoir tenir lors de leurs visites à la prison.

Les commissaires qualifient cette demande d’inquiétante compte tenu de la réaction difficile qu’une telle conversation risque d’engendrer.

Cédric Bouchard dit avoir fait cette demande de visites pour faire le point et savoir quoi faire pour s’améliorer et pour que ses efforts soient reconnus. Il affirme avoir l’impression qu’on le laisse pourrir en prison.

Cédric Bouchard est admissible à une semi-liberté depuis février 2022 et sera admissible à une liberté conditionnelle à partir de février 2024.

Le complice de Cédric Bouchard, Kaven Sirois, a aussi écopé d’une peine de prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 10 ans. Il sera donc lui aussi admissible à une demande de libération conditionnelle en 2024.

Les autorités carcérales s'opposent à sa requête

Le service carcéral recommande que la commission n'accorde pas de droits de sortie avec escorte à Cédric Bouchard qui est jugé trop instable.

Une représentante du centre de détention, qu'on ne peut nommer, a décrit Cédric Bouchard comme une personne avec une fragilité dans la sphère émotive, celles des fréquentations et de la consommation.

Il a d’ailleurs fait une rechute de consommation de haschisch en septembre dernier et une tentative de suicide après une rupture amoureuse. Il doit faire l’objet d’une nouvelle évaluation au cours des prochaines semaines, mais sa plus récente évaluation établit que son niveau de dangerosité pour la population est élevé.

Si la commission acquiesce à la demande de Cédric Bouchard, la représentante du centre de détention recommande qu'il fasse l'objet d'une surveillance directe, en tout temps.

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