La Chine se serait immiscée dans les dernières élections municipales à Vancouver
Le premier maire d'origine asiatique de Vancouver, Ken Sim, soutient avoir travaillé d’arrache-pied pour remporter les élections.

Selon le Globe and Mail, le consulat chinois de Vancouver se serait immiscé dans les élections municipales de 2022. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Kevin Mcintyre-Tor
Le consulat général de Chine à Vancouver se serait immiscé dans les élections municipales de 2022, selon un rapport du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) que le Globe and Mail a pu consulter.
D’après le rapport daté du 10 janvier 2022, la consule générale de Chine de l'époque, Tong Xiaoling, aurait projeté de faire élire des politiciens pro-Pékin au conseil municipal lors des élections municipales d'octobre 2022, à l’issue desquelles le maire sortant Kennedy Stewart a été battu par Ken Sim.
Le Globe and Mail (Nouvelle fenêtre) rapporte que les documents du SCRS expliquent qu’à la mi-novembre 2021, Tong Xiaoling aurait parlé d’orchestrer l’élection d’un nouveau maire et d’un certain conseiller municipal – qui n’est pas nommé – en faisant appel au vote des membres de la diaspora chinoise.
Selon le Globe and Mail, elle aurait aussi abordé le mentorat de politiciens municipaux sino-canadiens à des postes plus élevés, en politique provinciale ou fédérale, afin de promouvoir les intérêts de Pékin.
Kennedy Stewart a eu une rencontre avec le SCRS
Kennedy Stewart, maire de Vancouver de 2018 à 2022, a déclaré au Globe and Mail qu'il pensait avoir été la cible d'une ingérence du gouvernement chinois lors de l'élection municipale de 2022. Il n’attribue toutefois pas sa défaite électorale à l’ingérence présumée, puisque 37 000 voix le séparaient de son opposant Ken Sim.
Lors d’une entrevue accordée à l’émission de CBCPower and Politics, il a confirmé avoir eu des relations tendues avec Tong Xiaoling en raison de sa position prodémocratie, de son opposition aux violations des droits de l'homme du gouvernement chinois et de son soutien à l'indépendance de Taïwan.
Kennedy Stewart a aussi indiqué avoir eu un entretien, à la fin du mois de mai 2022, avec des responsables du SCRS , dont un spécialiste de la Chine, au sujet de l’ingérence étrangère dans la politique municipale.
Ceux-ci, dit-il, lui ont posé une tonne de questions
sur ses observations et, lorsqu’il leur a demandé pourquoi ils s’y intéressaient, ils ont répondu avoir envoyé des rapports plus haut
auxquels personne n’a porté attention. Ils ont pensé que quelqu’un devait savoir
, a affirmé Kennedy Stewart.
D'après lui, les allégations du SCRSpersonnes sur le terrain
.
Des insinuations décevantes
, dit Ken Sim
Le maire actuel de Vancouver, Ken Sim, a soutenu, lors d’un point de presse, avoir travaillé d’arrache-pied avec son équipe pour remporter les dernières élections municipales. Ken Sim est le premier maire d’origine asiatique de Vancouver.
Des groupes font des insinuations sur la façon dont nous en sommes arrivés là et, franchement, je les trouve incroyablement décevantes
, a-t-il affirmé.
« Si j'étais un homme blanc, nous n'aurions pas cette conversation. »
S'il existe une preuve d'ingérence étrangère dans nos élections, je veux le savoir parce que je suis Canadien, je suis né ici [...] j'ai choisi d'être ici
, a-t-il insisté.
De son côté, l'agence Elections BC a déclaré que son rôle est d'administrer les règles de financement des campagnes électorales et que l’examen des déclarations de la campagne de 2022 est toujours en cours.
Si nous avons connaissance d'éléments prouvant l'existence de contributions électorales étrangères ou provenant de l'extérieur de la province, nous mènerons une enquête
, a écrit l’organisme dans un courriel.
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Des personnes ciblées de façon injuste, selon un ancien conseiller
Lors d’une entrevue accordée à CBC
, l’ancien conseiller municipal de Vancouver Kerry Jang se montre critique face aux allégations du SCRS rapportées par le Globe and Mail.Il s'agit d’allégations sérieuses. S'immiscer dans nos élections est vraiment une chose horrible. Et si c'était vraiment vrai, pourquoi n'ont-ils pas accusé quelqu'un, pourquoi n'ont-ils pas expulsé quelqu'un? Pour l'instant [...] il ne s'agit que d'insinuations
, a-t-il affirmé.
Selon Kerry Jang, de telles allégations sans action de la part de l’agence de renseignement canadienne peuvent conduire à une suspicion injustifiée à l’égard de certaines personnes sur la seule base de leur appartenance ethnique.
Réactions à Ottawa
Au fédéral, le chef du Bloc québécois (BQ), Yves-François Blanchet, a lui aussi appelé à la prudence : Nous devons être très prudents avant d'affirmer que le résultat d'une élection pourrait être compromis, car le message envoyé à la population est très grave.
Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, a maintenu que l'idée qu'un gouvernement étranger puisse influencer nos élections municipales est très préoccupante. Cela ne devrait pas se produire. C'est pourquoi nous demandons à nouveau une enquête publique
.
Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé mercredi la nomination de l'ancien gouverneur général du Canada David Johnston au poste de rapporteur spécial indépendant, chargé de déterminer si, oui ou non, une commission d'enquête doit être créée pour examiner les allégations d'ingérence étrangère dans les deux dernières élections fédérales.
Les partis d'opposition, eux, appellent Justin Trudeau à lancer une enquête publique depuis plusieurs semaines.
Au moment de publier ces lignes, le consulat général de Chine à Vancouver n’avait pas retourné les demandes de commentaires de CBC
/Radio-Canada.NDLR : Suite à une demande d'informations de Radio-Canada, le SCRS a répondu, le 17 mars, qu'il ne peut confirmer ni infirmer l’authenticité des informations de cet article [du Globe and Mail]
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