La relation enseignant-élèves a pâti de l’apprentissage en ligne, alerte une étude

Les participants interrogés enseignent en quasi-totalité dans des milieux scolaires favorisés, voire très favorisés, précise l'étude, mais leur retour d'expériences vient illustrer une situation déjà dénoncée dans l'ensemble du paysage scolaire par la vérificatrice générale du Québec, même s'il manque encore des études exhaustives sur cette pratique.

Les résultats portant sur les écoles primaires et secondaires privées concluent que l’enseignement en ligne en pleine pandémie a détérioré la qualité de la relation pédagogique, tant dans le domaine cognitif, affectif que social.

In fine, avec ces constats, on voit un impact sur la réussite éducative, déplore Stéphane Lapointe, président de la Fédération du personnel de l'enseignement privé (FPEP-CSQ), organisme instigateur de la recherche.

« Ces conclusions démontrent sans détour que l'enseignement en ligne nuit au parcours éducatif des jeunes. »

Nos écoles étaient peut-être plus prêtes [technologiquement] que le secteur public, mais ce n'était pas parce qu'on était plus prêts que les bienfaits de l'enseignement en ligne étaient là, fait valoir M. Lapointe.

La FPEP-CSQ représente une quarantaine d'établissements scolaires privés au Québec.

Les effets négatifs de la dématérialisation des cours sont nombreux, relève l'étude. Derrière un écran, les opportunités d’interagir diminuent, les élèves étant moins enclins à demander de l’aide ou à poser des questions.

Cette situation peut engendrer une perte de motivation, un risque accru de décrochage, une diminution des apprentissages et du bien-être. Pour les enseignants, deux conséquences possibles seraient la perte de sens de leur métier dû au manque de contact avec les élèves [...] et la perte de confiance en leurs compétences, indique aussi l'étude.

Elle vient aussi corroborer une situation déjà dénoncée affectant les élèves en difficulté. Ceux-ci ont davantage souffert de la relation pédagogique en ligne, car les enseignants n’ont pas pu les soutenir de manière aussi personnalisée que ce qu’ils faisaient habituellement en présentiel, observe l'étude universitaire.

Classes dissipées

En outre, le passage des cours en ligne s'est accompagné d'une détérioration de l'encadrement des élèves. En contexte d’enseignement en ligne, les élèves sont moins captifs qu’en présentiel et il leur incombe une plus grande autonomie.

Celle-ci s'est notamment traduite par l'utilisation incontrôlable des médias sociaux pendant les cours en ligne, un problème rapporté par certains sondés.

Les chercheurs ont interrogé un échantillon représentatif de 372 membres du personnel enseignant, 105 membres du personnel de soutien et 20 membres du personnel professionnel. L'enquête portait sur la période entre mars 2020 et mars 2022.

Certains enseignants ont toutefois reconnu des avantages à l'enseignement en ligne, comme le développement de compétences techno-pédagogiques réutilisées ensuite en présentiel, ou encore l'entraide entre les équipes éducatives. Des sondés ont même reconnu le répit temporaire que leur a procuré la gestion en ligne des classes les plus difficiles.

Ces quelques atouts ne rattrapent toutefois pas la pertinence de l'enseignement en ligne, dont la qualité n'est pas au rendez-vous, souligne M. Lapointe. Pour le premier cycle du primaire, l'école virtuelle s'avère tout bonnement catastrophique, ajoute-t-il.

Fin des projets pilotes

Des représentants de la Fédération du personnel de l'enseignement privé ont prévu déposer cette étude au ministère de l'Éducation, mardi, en demandant la fin des projets pilotes qui offrent l'option de cours à distance dans certains établissements depuis l'automne 2021.

Avant d'autoriser des projets pilotes, il faudrait que ça repose sur des fondements pédagogiques, soutient le président de la Fédération du personnel de l'enseignement privé.

En conclusion, les recommandations du rapport insistent sur la prépondérance du souci pédagogique pour justifier le recours à tout enseignement en ligne.

Des considérations marketing (faire valoir l’enseignement en ligne à des fins de recrutement) ou des considérations organisationnelles (dispenser de l’enseignement en ligne par manque de locaux en présentiel) sont insuffisantes pour justifier le recours durable à l’enseignement en ligne [...], conclut l'étude parmi six recommandations émises.

Contacté par Radio-Canada, le cabinet du ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, n'a pas commenté la publication de l'étude.