Comment composer avec la tragédie survenue à Amqui?
Les cloches de l'église d'Amqui résonneront dans la ville vers 15h cet après-midi. Une messe aura lieu vendredi.
Photo : Radio-Canada / Fabienne Tercaefs
Le drame survenu à Amqui lundi après-midi a fait deux décès et neuf blessés, mais les répercussions de cette tragédie sont beaucoup plus profondes. De nombreux témoins ont assisté aux événements traumatiques survenus sur le boulevard Saint-Benoît Ouest et pourraient avoir besoin d’aide psychosociale, sans compter les proches des victimes et les membres de la communauté.
Le réseau régional de la santé convie toute personne qui en ressent le besoin à communiquer avec le 811 (option 2) afin d’obtenir de l’aide pour faire face à cet événement traumatisant.
La Ville d'Amqui invite également les citoyens à offrir leurs messages de sympathie et de solidarité et à déposer des fleurs ou autres objets à la mémoire des victimes directement à l'hôtel de ville, étant donné que la zone où s'est produit l'accident est interdite au public pour ne pas nuire au travail des policiers.
Ceux qui le souhaitent peuvent également offrir leurs condoléances via le site web de la municipalité.
Par ailleurs, les cloches de l'église de la ville de la communauté de quelque 6300 habitants sonneront tous les jours à 15 h 05 jusqu'à vendredi. Une messe aura également lieu vendredi à 19 h.
Le prêtre d'Amqui, Kindé Cosme Arouko, indique qu'il a reçu de nombreux appels depuis mardi après-midi et qu'il apporte tout le soutien spirituel et moral possible à la communauté.
« On soutient la population en général parce que c'est un traumatisme qui a touché tout le monde. Tout le monde est en désarroi et désemparé. »
De l'aide pour les témoins
Des représentants du CISSS
du Bas-Saint-Laurent sont déjà allés à la rencontre des témoins ainsi que des personnes présentes dans le secteur où s’est déroulée l’attaque au camion-bélier qui aurait été délibérément commise par Steeve Gagnon lundi. Les coordonnées de ces témoins ont été prises en note par les intervenants sur les lieux.On va faire des rappels au cours des prochaines heures, des prochains jours, pour s’assurer de comment se portent les gens
, confirme Gilles Turmel, conseiller aux relations médias pour le CISSS . Du personnel a d'ailleurs été ajouté en renfort afin de soutenir la population.
« Sur le coup, on peut tous réagir de façon différente. Ça peut être dans les jours subséquents qu’effectivement, on aura des ressacs de ces événements-là qui peuvent créer beaucoup d’anxiété, beaucoup de stress. »
De nombreuses personnes, par exemple des proches des victimes, sont susceptibles d’être sous le choc, précise quant à lui Pierre-Paul Malenfant, président de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec.
Il indique que les équipes psychosociales seront responsables de dispenser des services qui répondront aux besoins des personnes qui ont vécu ces événements de près ou de loin. Ça va être différent si ce sont des enfants, des personnes âgées ou des adultes.
Du soutien individuel, du soutien de couple ainsi que du soutien communautaire sont offerts. Il ne faut pas forcer la main aux gens. Les gens ne réagiront pas tous de la même façon. Il y en a qui ne seront pas capables d’en parler tout de suite, il y en a qui vont avoir besoin d’en parler tout de suite
, rappelle Christine Grou, présidente de l’Ordre des psychologues du Québec.
Les équipes sont par ailleurs à pied d'œuvre depuis lundi dans le but d'offrir des services dans chaque établissement du Centre de services scolaire (CSS) Monts-et-Marées. Les élèves et les membres du personnel qui en exprimeront le besoin pourront être accompagnés par des professionnels.
« C’est une situation organique qui évolue. On essaie de s’adapter, d’aider et d’être prêts. »
L’école primaire Sainte-Ursule et l’école secondaire Armand-Saint-Onge d'Amqui ont été fermées mardi, notamment parce que le corridor de marche de leurs élèves traverse le périmètre qui a été établi par la Sûreté du Québec. Ceux qui sont demeurés à la maison pourront recevoir de l'aide dès leur retour en classe.
On interviendra où on aura des besoins, là où on sera sollicités. Ça va s’étendre sur quelques jours
, assure M. Marion.
Quelques pistes pour mieux composer avec les événements
Il faut vraiment, pour le moment, s’informer comme il faut de la situation mais faire attention pour éviter de se surexposer aux images […] qui roulent en boucle dans les médias
, conseille d'emblée Pierre-Paul Malenfant. Celui-ci estime que la vigilance est notamment de mise en ce qui a trait aux enfants.
Quand il y a un événement comme ça, il va marquer beaucoup plus que tout le beau ou tout le bon autour de nous
, précise de son côté Christine Grou, qui indique que de l’anxiété, voire de l’hypervigilance, peut en découler.
M. Malenfant conseille également aux résidents d’Amqui ainsi qu’à toutes les personnes touchées par la tragédie de bien s’entourer. Il ne faut pas hésiter à se confier aux personnes de notre entourage sur ce qu’on vit, les difficultés.
Ce professionnel invite la population à faire preuve d’ouverture et à respecter la façon dont les gens réagissent aux événements.
« Il y a des gens qui ont besoin de parler, il y a des gens qui ont besoin de se retirer, de s’isoler, de se retrouver dans leur cocon, dans leur milieu. […] Ce sont des réactions qui sont normales dans un événement qui, lui, est à tout à fait anormal. »
Les réactions inhabituelles qui perdurent devraient quant à elles faire l’objet de consultations pour éviter que ça conduise à des problèmes d’adaptation majeurs sur le plan psychologique
.
Christine Grou est d'avis que le fait que toute une petite communauté tissée serré soit entièrement frappée par un drame facilitera la suite des choses. Ça n’enlève pas la tristesse, mais ça reste aidant par rapport à un événement où on aurait été complètement seul dans un contexte pareil
, souligne-t-elle.
La psychologue rappelle qu’il est normal de tenter de trouver du sens dans des événements comme ceux qui se sont produits à Amqui. Elle invite toutefois la population à garder en tête que les proches du suspect sont aussi des victimes collatérales
.
Des élus locaux en renfort
Plusieurs élus ont convergé vers Amqui afin de soutenir les personnes éprouvées. À l'instar de très nombreux résidents, ils ressentent de l’incompréhension au lendemain de cette attaque.
C'est complètement triste, tragique
, a commenté la députée responsable du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine, Maïté Blanchette Vézina, au lendemain des événements.
Mes premiers mots vont aux gens qui ont répondu présent pour aider les gens sur les lieux et aussi aux familles qui ont été touchées par ce drame-là et à l'ensemble de la communauté
, a dit Mme Blanchette Vézina.
« Avant de tirer des conclusions sur les motifs, il faut laisser le deuil se faire. »
À l'émission Bon pied, bonne heure!, le député provincial de Matane-Matapédia, Pascal Bérubé, a admis que la journée de lundi a été une des plus éprouvantes de sa carrière. Je remercie tous les témoignages de solidarité qu'on reçoit de partout au Québec. Ça fait chaud au cœur.
C'est important de se tenir serrés
, croit pour sa part la préfète de la MRC de La Matapédia, Chantale Lavoie.
La députée fédérale d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia, Kristina Michaud, une native d'Amqui, reconnaît se sentir impuissante.
« C'est le genre d'événement qu'on n'espère jamais vivre dans un mandat. »
La députée du Bloc québécois affirme que son rôle sera de représenter, de rassurer et d'informer la population au cours des prochains jours.
Avec la collaboration de Shanelle Guérin et les informations d'Isabelle Lévesque