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« Bénévoler » pour aider les autres, mais aussi soi-même

À l’hôpital, à l’école ou dans les centres communautaires, les bénévoles sont présents partout. Ils se fondent dans le décor, côtoyant les professionnels. Peu importe leur motivation, leurs actes sont utiles et leur rôle est crucial.

Consuelo Vásquez.

Consuelo Vásquez, professeure au Département de communication sociale et publique, UQAM

Photo : Radio-Canada / Karim Ouadia

Cuisiner pour les itinérants, préparer des paniers de denrées alimentaires pour ceux qui ont du mal à joindre les deux bouts, rendre visite aux malades pour briser l’isolement et monter des spectacles de musique au profit de différents organismes de charité… L’action bénévole prend d’innombrables formes et est présente à tous les niveaux de la société.

Le bénévolat pourrait s’exprimer par un don de soi, de son temps, de ses compétences et de son énergie à la société, explique Consuelo Vásquez, professeure au Département de communication sociale et publique de l'UQAM.

Mais attention, fait remarquer celle qui coordonne le programme Le Bénévolat en mouvement. Le don ne va pas à sens unique et il y a plusieurs raisons qui motivent les gens à bénévoler, au-delà de l’altruisme.

Mme Vásquez adhère à la théorie du don/contre-don, prônée par le sociologue et anthropologue français Marcel Mauss, fondée sur l’idée d’un contrat social basé sur la réciprocité.

Oui, il y a le don de sa personne et de son temps, mais il y a toujours une dimension relationnelle qui est extrêmement forte, dit-elle.

« On donne à autrui et on en reçoit en même temps. »

— Une citation de  Consuelo Vásquez, professeure au Département de communication sociale et publique, UQAM

Vous remarquerez que beaucoup de bénévoles diront : "Je reçois plus que ce que je donne", rappelle Mme Vásquez.

Donner en faisant ce qu’on aime

Le Dr Guy Parizeau, un pédiatre, est membre du Doc Show, un groupe de 14 personnes comprenant une douzaine de médecins musiciens qui montent sur scène pour amasser des fonds pour différentes causes. Il confie trouver dans l’action bénévole le moyen égoïste de jouer utilement de la musique avec ses collègues et confrères.

« C’est du bénévolat qui rend service non seulement aux gens qui vont recevoir des sous, mais en grande partie à nous aussi. »

— Une citation de  Dr Guy Parizeau, pédiatre membre du Doc Show
Le Doc Show.

Le Doc Show sur scène

Photo : André Ouellet

Rencontré à Moisson Montréal, un organisme de bienfaisance qui récupère des dons de nourriture et de produits essentiels pour les redistribuer gratuitement à des organismes communautaires, Marc Hubert est un bénévole régulier. Il y vient travailler quatre jours par semaine.

« Cela fait trois ans et demi que je viens ici. Je suis à la retraite et j’ai décidé que c’était le moment de redonner un peu à la communauté. »

— Une citation de  Marc Hubert, bénévole, Moisson Montréal
Marc Hubert.

Marc Hubert, bénévole, Moisson Montréal

Photo : Radio-Canada / Karim Ouadia

Ancien cadre dans plusieurs entreprises, il avait visité les lieux voilà une dizaine d’années. L’ambiance lui avait alors plu et, surtout, l'avait convaincu d’offrir un peu de son temps. Il met également à profit son expérience pour former les jeunes bénévoles.

Il y a comme un sentiment de faire quelque chose de bon, ajoute-t-il.

Donner pour apprendre

Ici, on a une soixantaine de bénévoles qui viennent tous les jours pour nous aider à distribuer les denrées, explique Natalie Clairoux, agente de soutien, expérience client à Moisson Montréal.

Bénévoles de Moisson Montréal.

Les bénévoles de Moisson Montréal sont de différentes origines.

Photo : Radio-Canada / Karim Ouadia

La majorité de ces bénévoles proviennent soit de groupes corporatifs ou de groupes scolaires.

Par exemple, pendant la semaine de relâche, on a eu beaucoup d’enfants accompagnés de leurs parents qui veulent leur apprendre les valeurs de la société : redonner au prochain, dit-elle.

Pour ce qui est des groupes corporatifs, ce sont souvent des gens qui vont être payés par leur entreprise pour venir faire du bénévolat, poursuit Mme Clairoux.

Natalie Clairoux.

Natalie Clairoux, agente de soutien, expérience client à Moisson Montréal

Photo : Radio-Canada / Karim Ouadia

Donner pour mieux s’intégrer

En plus du don de soi, le bénévole pourrait y trouver son compte en allant à la recherche d’une meilleure insertion dans son milieu. C’est notamment le cas de personnes immigrantes pour qui faire du bénévolat permet de mieux connaître la société d’accueil, d’établir des relations et de socialiser, explique Consuelo Vásquez.

Les bénévoles reçus à Moisson Montréal sont de tous les âges et de toutes origines. Certains sont même entrés au pays par le chemin Roxham, à la frontière entre le Canada et les États-Unis. En attendant que les autorités se prononcent sur leur cas, ils viennent passer la journée avec nous […] C’est un don de soi incroyable, raconte Mme Clairoux.

« C’est un lieu de socialisation qui permet de sortir de sa coquille. »

— Une citation de  Natalie Clairoux, agente de soutien, expérience client, Moisson Montréal

Doudou Sow, sociologue de formation et auteur de plusieurs livres sur l’intégration et la régionalisation de l’immigration, met l’accent sur l’importance du bénévolat pour le nouvel arrivant. Il y voit une fenêtre par laquelle s’offrent des opportunités d’emploi.

Originaire d’Afrique et engagé depuis son jeune âge, il admet que l’expérience bénévole lui a été utile dans une entrevue d’embauche au Québec.

Doudou Sow.

Doudou Sow, sociologue, auteur et conférencier

Photo : Radio-Canada / Karim Ouadia

Au-delà du perfectionnement de ses compétences, le bénévolat permet au nouvel arrivant d’apprendre, de développer et de valider de nouvelles connaissances.

Le bénévolat devrait être ciblé en fonction d’une cause, d’une carrière ou des valeurs qui vous tiennent à cœur, insiste-t-il dans son livre Intégration : une responsabilité partagée entre la société d’accueil et la personne immigrante.

« Le bénévolat permet aussi de comprendre les codes culturels en étant en contact avec les membres de la société d’accueil et de valider s’il y a un besoin d’une réorientation professionnelle. »

— Une citation de  Doudou Sow, sociologue, auteur et conférencier

Il donne l’exemple de l’enseignant qui pourrait commencer par l’aide aux devoirs dans l’école de son quartier.

Développer la culture du bénévolat chez les jeunes

Il faut impliquer plus de jeunes à l’action bénévole […] il faut encourager la réflexion sur le bénévolat assez tôt, c’est très important, plaide Wendy Reid, professeure honoraire au Département de management à HEC Montréal.

Il faut développer la culture du bénévolat. Cela passe également par des programmes dans les écoles pour intéresser ces jeunes, insiste-t-elle.

C’est aussi l’avis de Mohamed Noredine Mimoun, coordonnateur du forum jeunesse de Saint-Michel à Montréal, qui est constamment sur le terrain avec les jeunes qu’il encadre.

Mohamed Noredine Mimoun.

Mohamed Noredine Mimoun, coordonnateur du forum jeunesse de Saint-Michel

Photo : Radio-Canada / Karim Ouadia

Souvent, ces bénévoles viennent de milieux modestes et parfois difficiles, mais l’action bénévole les maintient accrochés au fil de la vie. Chaque samedi, ils se retrouvent dans la cuisine pour préparer des repas au profit des itinérants.

L’exercice ne vise pas uniquement le sentiment d’avoir donné au prochain. Il permet également aux jeunes de développer des compétences, de gagner en autonomie et d’être exposés au travail d’équipe. Il s’agit aussi de savoir gérer son temps et ses priorités en découvrant des causes, insiste M. Mimoun.

« Je mets les jeunes au milieu de l’action. Au lieu d’être ceux qui reçoivent de l’aide, ils deviennent ceux qui donnent, qui contribuent à la solidarité au sein de la société. »

— Une citation de  Mohamed Noredine Mimoun, coordonnateur du forum jeunesse de Saint-Michel
Jeunes bénévoles.

Les jeunes bénévoles préparent des repas pour les itinérants.

Photo : Mohamed Mimoun

Formaliser le bénévolat, mais pas trop

Au Québec, le bénévolat est formalisé, organisé : il existe des centres d’actions bénévoles, la Fédération des actions bénévoles, et des structures mises en place pour la promotion et la sensibilisation du bénévolat. Cette forme d'engagement est aussi mise de l’avant comme étant une plus-value pour les jeunes, pour bonifier leur curriculum vitae, précise Mme Vásquez.

Ça passe aussi par l’encadrement des bénévoles, estime Jean-François Dubé, chargé des communications à Moisson Montréal. C’est difficile, dit-il, de montrer à quelqu’un qui est ici pour une journée comment bien faire le travail pour qu’on puisse continuer à fonctionner normalement.

Jean-François Dubé.

Jean-François Dubé, chargé des communications à Moisson Montréal.

Photo : Radio-Canada

Mais attention, s’il y a des avantages à formaliser le bénévolat, il ne faut pas non plus aller trop loin, estime Mme Vásquez.

Il y a une tendance très lourde dans les pays occidentaux à professionnaliser le bénévolat, indique-t-elle, évoquant des procédures pour standardiser le recrutement et la gestion des bénévoles.

On est dans une logique managériale, comme pour gérer une entreprise. On y parle même de ressources humaines bénévoles, explique la professeure Vásquez.

« Quand on a une hyper professionnalisation des actions de bénévolat, il y a une partie de la nature même de l’acte comme la spontanéité et de la socialisation qui se perd. »

— Une citation de  Consuelo Vásquez, professeure au Département de communication sociale et publique, UQAM

L’importance du bénévolat au Québec

Moisson Montréal.

Les locaux de Moisson Montréal

Photo : Radio-Canada / Karim Ouadia

Peu importe les motivations des bénévoles, ces derniers sont essentiels pour le fonctionnement de nombreux organismes.

Chez nous, à Moisson Montréal, les bénévoles qui viennent chaque jour, c’est l’équivalent de 30 employés payés à temps plein. Ce qui nous permet comme organisme de ne pas avoir à payer le salaire de 30 personnes. C’est vrai que c’est une valeur monétaire, affirme Natalie Clairoux.

Sans l’apport de ces bénévoles, je pense qu’on ne pourrait pas fonctionner. Ça représente tellement de salaires que ce serait pratiquement impossible, enchaîne pour sa part Jean-François Dubé, chargé des communications à Moisson Montréal.

Des bénévoles de Moisson Montréal.

Des bénévoles dans la section de tri des aliments.

Photo : Radio-Canada / Karim Ouadia

Selon le Réseau de l’action bénévole, 80 % de Québécois et Québécoises s’impliquent bénévolement auprès d’un organisme ou d’individus. Quelque 41 % d’entre eux le font par plaisir ou par intérêt, alors que 37 % donnent de leur temps dans le secteur de la culture et des loisirs, y compris le sport et le plein air. Se basant sur des chiffres datant de 2018, le RABQ compte 268 millions d'heures effectuées auprès d’organismes.

Si vous pensez uniquement au troisième secteur [de l’économie], tout ce qui est organismes communautaires et milieux associatifs, vous allez trouver qu’ils sont constitués de 20 % d’employés et de 80 % de bénévoles. Une grande partie des services sociaux, de santé, est prise en charge par le troisième secteur. Parce que l’État a rapetissé et l’on voit cette délégation au troisième secteur qui s’appuie grandement sur le travail bénévole, dit encore Consuelo Vásquez.

L’exemple du monde des sports est frappant, fait-elle remarquer. Les membres du comité d’administration sont des bénévoles, les entraîneurs souvent dans les ligues mineures sont des parents bénévoles, ceux qui assurent les déplacements des équipes sont des bénévoles, en plus des associations sportives qui dépendent grandement des bénévoles.

À l’hôpital, à l’école ou dans les centres communautaires… Demandez à n’importe quel organisme : sans bénévoles, il ne pourrait pas réaliser sa mission.

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