L’intimidation de Google ne vaincra pas le projet de loi C-18, dit Pablo Rodriguez

Le ministre du Patrimoine, Pablo Rodriguez.
Photo : La Presse canadienne / Adrian Wyld
Google devra expliquer lundi aux membres du Comité permanent du patrimoine de la Chambre des communes pourquoi l’entreprise a récemment coupé l’accès aux nouvelles à des milliers d’internautes canadiens.
Les députés ont convoqué la directrice nationale de Google, Sabrina Geremia, et son gestionnaire des politiques publiques, Jason J. Kee, à témoigner.
Les dirigeants devront fournir la liste de tous les médias affectés par ce blocage de cinq semaines. Ils devront aussi dévoiler le contenu des communications détaillant les mesures envisagées par l'entreprise à l’approche de l’adoption du projet de loi C-18.
La législation vise à forcer les plateformes numériques à négocier avec les entreprises de presse une compensation pour la republication de leur contenu journalistique.
La manœuvre du géant numérique constitue un geste d’intimidation, selon le ministre fédéral du Patrimoine. C'est vraiment prendre les Canadiens en otage
, s’est exclamé Pablo Rodriguez dans une entrevue aux Coulisses du pouvoir.
Facebook avait eu recours à pareil stratagème en Australie en 2021, alors que le Parlement s’apprêtait à adopter une loi dont s’inspire aujourd’hui le Canada.
Google, principal canal d’information
Selon le ministre du Patrimoine, les trois quarts des Canadiens puisent leurs nouvelles en ligne. De cette proportion, 9 internautes sur 10 utilisent le moteur de recherche de Google pour s’informer.
Avec l’effritement des revenus publicitaires, des journaux et des stations de radio et de télévision ont dû cesser leurs activités. La situation est critique sur le plan des médias : 460 salles de nouvelles, [et même] un peu plus, ont fermé leurs portes au cours des dernières années
, ajoute M. Rodriguez.
Le réseau Global a annoncé une série de mises à pied la semaine dernière dans ses stations en Alberta et dans l’est du pays. Le Groupe TVA a supprimé 240 postes en février, mettant en cause le contexte économique difficile. Il réclamait sans tarder l’adoption de C-18 afin que l'utilisation de nos contenus d'information soit reconnue et rémunérée à leur juste valeur par les géants numériques
.
Google affirme que le projet de loi risque de modifier fondamentalement la façon dont les usagers surfent sur Internet parce qu’il limitera la capacité de passer librement d’un site web à l’autre.
Des millions de dollars
Si elle est adoptée, la loi obligera les géants numériques à entamer des négociations avec les médias, petits et grands, pour la publication de contenu journalistique en échange d’un dédommagement. Le ministre Rodriguez n’est pas en mesure de déterminer le montant des compensations, mais il est question de millions de dollars.
C'est de l'argent qui s'en va aux salles de nouvelles parce que, dans le projet de loi, on s’est assurés que l'argent aille pour la création de contenu, de nouvelles et non pas à enrichir les poches de l'un ou l'autre des propriétaires de ces médias.
Le ministre Rodriguez affirme que malgré les tentatives de Google de dissuader le gouvernement de légiférer en la matière, Ottawa est plus déterminé que jamais à agir pour assurer la survie de médias neutres et indépendants.
La démocratie est en train de s'affaiblir
Il en va de la santé de notre démocratie, selon lui. Les médias jouent un rôle fondamental au sein de notre démocratie, ici, dans les autres grandes démocraties, à travers ces médias-là neutres, non partisans, indépendants qui disparaissent graduellement. Alors notre démocratie n'est pas en train de se renforcer, elle est en train de s'affaiblir.
Le ministre du Patrimoine canadien a bon espoir que le projet de loi sera adopté au Parlement prochainement, puisqu’il compte déjà sur l’appui des deux tiers des députés de la Chambre des communes.