Mieux encadrer les travailleurs étrangers temporaires, « un pas dans la bonne direction »

Les inspections seront plus nombreuses, a indiqué le ministre du Travail, Jean Boulet.
Photo : La Presse canadienne / Graham Hughes
Devant les cas d'abus qui ont fait la manchette ces derniers mois, Québec souhaite mieux protéger et informer les travailleurs étrangers temporaires, qui sont de plus en plus nombreux dans la province. Ce souhait est très bien accueilli par plusieurs acteurs de la région.
En ce sens, le ministre du Travail, Jean Boulet, a annoncé mercredi que les actions de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST
) auprès de cette main-d’œuvre, de ses représentants et de ses employeurs seront renforcées.Les inspections seront plus nombreuses, a indiqué M. Boulet. De plus, l'Escouade de prévention auprès des travailleurs étrangers temporaires devient permanente. Une vingtaine d’agents auront le mandat de sillonner le Québec pour vérifier si les conditions des travailleurs respectent les règles québécoises.
Ça ne règle pas tout, mais c’est certainement un pas dans la bonne direction
, se félicite Manon Brunelle, coordonnatrice de l’organisme Illusion emploi de l’Estrie
, en entrevue avec Radio-Canada Estrie.
« Ce qu’on a fait comme pressions politiques au cours des dernières années a porté ses fruits. [...] Peut-être qu’enfin le politique va se mouiller un peu plus pour protéger les travailleurs. »
Elle concède que les récents scandales concernant les travailleurs étrangers temporaires, comme notre enquête qui révélait que des Mexicains étaient payés quatre fois moins que les Québécois chez l’entreprise BRP, ont pu faire pencher la balance. C’est sûr que ça a pu influencer Québec. Mais c’est le résultat qui compte. Et on voit qu’il y a un début de volonté politique d’essayer de mieux encadrer ce programme-là
, poursuit-elle.
Hausse marquée ces dernières années
Avec la pénurie de main-d’œuvre, les travailleurs temporaires étrangers sont de plus en plus nombreux à venir travailler au Québec. En 2022, la province en a accueilli 38 500, alors que ce nombre s'élevait à 23 300 en 2019. En trois ans, la hausse a été de 15 200 travailleurs.
La pénurie a pu influencer la décision de Québec, croit Manon Brunelle. Mais ça ne règle pas le problème du permis. Depuis plusieurs années, on demande des permis de travail ouverts. S’il arrive des cas d’abus, le travailleur est rattaché à son seul et unique employeur et il ne peut pas faire de démarches pour quitter son emploi. C’est une grave lacune
, indique-t-elle.
« Ils n’ont pas non plus facilement accès à la résidence permanente alors qu'ils font partie prenante de notre communauté. »
L’avocate spécialisée en immigration Yasmine Guillaume salue elle aussi la position du ministre du Travail. Elle dit d’ailleurs recevoir actuellement un nombre élevé de demandes d’aide en provenance de travailleurs étrangers. Il était temps qu’il y ait une annonce en ce sens. Il y a beaucoup d’abus lorsqu’il y a des recrutements massifs de travailleurs à l’étranger
, indique-t-elle.
On n’a pas idée du nombre de travailleurs étrangers qu’il y a dans notre région. L’immigration est une réalité ici aussi, dans des régions qui sont éloignées des centres où se trouvent les organismes qui font la surveillance. Augmenter le nombre de brigades sur le terrain, ça va être très bon pour les travailleurs
, croit quant à lui Jasmin Chabot, chargé de projet pour Actions interculturelles, à Sherbrooke.
Avec les informations de Thomas Deshaies