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Analyse

Roxham : un chemin pavé de bonnes intentions

Freezing rain clings to a 'do not enter' sign at Roxham Road on Jan. 5, 2022. Migrants are being bused near the area from New York City. (Charles Contant/CBC)

Freezing rain clings to a 'do not enter' sign at Roxham Road on Jan. 5, 2022. Migrants are being bused near the area from New York City. (Charles Contant/CBC)

Photo :  (Charles Contant/CBC)

John Lennon a dit un jour « il n’y pas de problèmes, que des solutions ». On serait bien tenté de croire le contraire au sujet du chemin Roxham. Ces derniers jours ont renforcé l’impression d’un jeu à somme nulle, alors que chaque proposition semble entraîner inévitablement de nouvelles difficultés. Entre le statu quo et des barbelés à la frontière, existe-t-il un juste milieu?

Plusieurs l’ont rappelé : derrière chaque demandeur d’asile, il y a un être humain vulnérable. Une femme, un homme ou un enfant, précipité dans un long et fastidieux périple qu’on ne souhaiterait à personne.

Mais il faut quand même admettre que 39 000 migrants au statut précaire qui traversent la frontière en une seule année, et presque tous au Québec, ce n’est pas anodin. La pression sur les services sociaux, le réseau de l’éducation et le logement est considérable.

François Audet, directeur de l'Observatoire canadien sur les crises et l'action humanitaire à l'UQAM, nous rappelle que s’il existe un consensus sur cet enjeu, c’est qu’il ne risque pas de disparaître du jour au lendemain. C’est plutôt le contraire : la pression migratoire devrait s’accentuer au cours des prochaines années, avec la crise climatique.

L’enjeu humanitaire derrière la migration et le chemin Roxham

ÉMISSION ICI PREMIÈRE • Première heure

Une famille de demandeurs d'asile traverse la frontière canadienne.

Un exercice délicat

Dans ce contexte, le mieux qu’on puisse espérer est de trouver un point d’équilibre entre notre devoir d'humanité et notre capacité d'accueil. Ce qui, évidemment, est plus facile à dire qu’à faire.

Le Canada a certainement le devoir d’accueillir les demandeurs d’asile le plus humainement possible. Qui plus est, le pays doit respecter ses engagements en matière de traitement des réfugiés, au regard du droit international.

Ceux qui traversent la frontière ont donc droit à des services et à un soutien de l’État, que personne d’ailleurs ne leur refuse.

Un demandeur d'asile accueilli par deux agents frontaliers.

Une fois la frontière traversée, le périple est loin d’être terminé pour le demandeur d’asile.

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Cela dit, ce n’est pas manquer d’humanité que de rappeler que les ressources de la société d'accueil ne sont pas illimitées. En témoignent les classes modulaires dans lesquelles sont toujours entassés des milliers d’élèves du Québec, ou ces longues heures passées à l’urgence pour avoir accès à un médecin.

Prendre racine, réfugié ou pas

Il faut dire aussi qu’une fois la frontière traversée, le périple est loin d’être terminé pour le demandeur d’asile. C’est en fait le début d’une attente qui pourra durer 4 ou 5 ans, et même davantage. D’abord pour obtenir un permis de travail, ensuite pour obtenir le statut de réfugié.

Et rappelons que tous les demandeurs d’asile ne sont pas des réfugiés. Améliorer son sort économique n’est pas un motif justifiant l’obtention de ce statut. Pour demander la protection du Canada, une personne doit démontrer qu’il serait dangereux pour elle de retourner dans son pays d’origine.

Ce qui pose le problème de l’enracinement. Un demandeur d’asile passe 5 ans à Montréal, il a des enfants qui fréquentent l’école : est-il juste d’expulser cette famille parce qu’elle n’est pas réfugiée au sens de la loi? Ou alors, renversons la question : est-il juste de lui permettre de rester même si sa demande d’asile n’était pas valable au départ ?

Fermer ou non le chemin Roxham

Après s’être adressé directement à son homologue fédéral, le premier ministre François Legault a voulu expliquer au Canada anglais il y a quelques jours, dans les pages du Globe and Mail, pourquoi il faut fermer le chemin Roxham et faire respecter la frontière canadienne.

Jusqu’à maintenant, le Québec était à peu près le seul à demander l’intervention d’Ottawa. Mais le vent tourne. Des inquiétudes se font entendre en Ontario, et le conservateur Pierre Poilievre demande lui aussi la fermeture de cette voie de passage.

Fermer Roxham Road, c’est ce que nous voulons tous. Mais il n’y a pas de solution simpliste là-dedans, a déclaré mercredi Justin Trudeau. Il maintient que la solution passe par la renégociation de l’entente sur les tiers pays sûrs, même si Washington n’est pas pressé d’en discuter.

François Audet lui donne raison : fermer Roxham maintenant ne ferait que transférer le problème ailleurs. La pression migratoire ne cessera pas avec la fermeture du point d’entrée, puisque les demandeurs d’asile pourraient trouver une autre voie de passage.

II n’est pas interdit de se demander si la solution, sans être parfaite, ne serait pourtant pas dans l’intérêt du Québec. Après tout, il s’agit peut-être de la seule façon de forcer, à court terme, une répartition plus équitable des responsabilités dans la fédération.

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