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Pierre Poilievre à la conquête des communautés culturelles du Grand Toronto

Le chef conservateur cherche à répéter l’exploit de Stephen Harper en 2011, qui avait été élu à la tête d'un gouvernement majoritaire en reconquérant les sièges dans les banlieues multiculturelles torontoises.

Un joueur de cricket s'apprête à s'élancer dans une cage de frappeur.

À Brampton, dans le Grand Toronto, le cricket est une occasion de rassemblement pour plusieurs personnes d'origine pakistanaise ou indienne.

Photo : Radio-Canada / Christian Larivière

À l’intérieur du centre sportif Yashi, à Brampton, les coups de bâton résonnent entre les murs de béton. Les sacs d’équipement jonchent le sol entre les bancs. On entend des joueurs éclater de rire.

C'est une soirée de cricket, comme toutes les semaines, entre amis d’origine pakistanaise ou indienne. Les coéquipiers partagent leurs affinités et leurs préoccupations. Au sommet de la liste, l’inflation et le coût de la vie.

Les gens sont anxieux, explique Saddar Zubair, un homme d’affaires de Brampton. L’économie ralentit et tout coûte plus cher, c’est inquiétant.

Son ami Sikandar renchérit : C’est dur de payer l’épicerie, la voiture, les assurances, l'hypothèque. On se croise les doigts et on espère que ça va arrêter bientôt.

Les prix augmentent, mais pas les salaires, ajoute un autre coéquipier, Sultan Mubasher, un consultant en informatique.

Des parents prennent un deuxième boulot pour faire vivre leur famille. Que fait le gouvernement pour nous aider à joindre les deux bouts?

Une citation de Sultan Mubasher, consultant en informatique

Cette question fait écho à celle que répète le chef conservateur depuis plusieurs mois. Pierre Poilievre martèle que les problèmes économiques sont le fait de ce qu'il appelle la justinflation et des politiques du gouvernement libéral.

De toute évidence, son message économique atteint sa cible dans les banlieues torontoises, une région riche en votes, où Pierre Poilievre espère frapper un grand coup lors des prochaines élections.

Près de trois Canadiens sur quatre trouvent que le gouvernement Trudeau ne se préoccupe pas assez de la hausse du coût de la vie, selon la firme de sondages Abacus. Plus de la moitié des Canadiens pense qu’il est temps de changer de gouvernement.

Les témoignages des joueurs de cricket rencontrés à Brampton semblent confirmer cette fatigue qui s’installe envers le gouvernement libéral.

Peut-être que les libéraux ont fait leur temps, affirme Saddar. Il faudra peut-être qu’on choisisse quelqu’un d’autre que Justin Trudeau la prochaine fois. Peut-être. Il faut voir.

Une région en pleine transition

Dave Tatla parle au micro dans un studio.

Dave Tatla anime une émission à l'antenne d'une radio communautaire torontoise.

Photo : Radio-Canada / Christian Larivière

Dans les studios d’une radio communautaire torontoise, la chanson-thème de l’émission en pendjabi retentit à tue-tête. Derrière la console, Dave Tatla prend les commandes d’une tribune téléphonique. L’animateur fait ce métier depuis 30 ans. Il a le doigt sur le pouls de sa communauté.

Les gens sont prêts à écouter ce que Pierre Poilievre a à dire, explique M. Tatla. Ils sont curieux de mieux connaître le nouveau chef conservateur.

Justement, durant l’émission, un de ses auditeurs vante les qualités d’orateur de Pierre Poilievre et affirme qu’il peut gagner les prochaines élections. Il est très intelligent, confie cette personne au téléphone. J’aime la façon dont il explique simplement les problèmes complexes.

Une opinion, dit Dave Tatla, qui résonne de plus en plus dans sa tribune radiophonique.

La lune de miel de Justin Trudeau est terminée. Il semble trop détaché des préoccupations du vrai monde.

Une citation de Dave Tatla, animateur de radio

Les libéraux, selon Dave Tatla, ne peuvent plus tenir les banlieues torontoises pour acquises. Il y a, selon lui, un désir de changement qui prend naissance dans la région après sept ans de gouvernement libéral.

Pierre Poilievre le sent. C’est notamment pour cette raison qu’il multiplie les apparitions pendant les rassemblements communautaires et les fêtes religieuses de la grande région torontoise. Mais la partie est loin d’être jouée.

Premier test raté

Le chef conservateur courtise ces communautés culturelles, comme l’ont fait Stephen Harper et Jason Kenney avant lui, afin de recréer les conditions gagnantes pour une victoire conservatrice.

Il n’y aura pas moyen d'élire un gouvernement conservateur sans gagner une majorité de sièges dans la banlieue torontoise, avance le stratège conservateur Karim Jivraj.

Karim Jivraj dans une rue bordée de commerces.

L'homme d'affaires Karim Jivraj est un ancien candidat conservateur devenu stratège.

Photo : Radio-Canada / Christian Larivière

Cet homme d’affaires et ancien candidat conservateur estime que Pierre Poilievre a échoué à son premier test dans la région lors d'une élection partielle cet hiver dans Mississauga-Lakeshore.

Il y a beaucoup de gens comme moi qui pensaient que M. Poilievre allait montrer sa force à Toronto. Mais il n'a pas su transformer les anxiétés économiques en victoire.

Une citation de Karim Jivraj, stratège conservateur

Selon Karim Jivraj, deux messages de Pierre Poilievre font mouche dans les communautés culturelles torontoises : la crise économique et la montée de la criminalité.

La flambée de violence dans le métro de Toronto et la crise des vols de voitures dans les banlieues comme Brampton génèrent, selon lui, beaucoup d’anxiété que tente d’exploiter le chef conservateur.

Personnalité pitbull

Un des grands obstacles que doit surmonter Pierre Poilievre dans son opération de séduction des banlieues torontoises, c’est l’image qu’il projette de lui-même, estime la politologue Stéphanie Chouinard.

Il doit adoucir son image de pitbull, croit cette professeure de science politique au Collège militaire royal de Kingston.

Ses critiques de Justin Trudeau sont très acerbes et peu nuancées. Ces attaques gratuites ne résonnent pas trop comme discours dans les zones urbaines comme la grande région de Toronto.

Une citation de Stéphanie Chouinard, professeure agrégée de science politique au Collège militaire royal de Kingston

Sans compter, ajoute-t-elle, que son appui au convoi de manifestants à Ottawa l'hiver dernier continue de lui nuire dans les mêmes régions. Cela contribue au fait, selon elle, que la majorité des Canadiens ont une opinion négative de Pierre Poilievre. C’est rare qu’un chef de l’opposition parte si rapidement avec une image négative, observe-t-elle.

Nasir Mahmood regarde un écran d'ordinateur dans un magasin où on aperçoit des gants et des bâtons de cricket.

Nasir Mahmood est propriétaire d'un magasin d'équipement de cricket.

Photo : Radio-Canada / Christian Larivière

Au magasin de cricket local, on vend de l’équipement tout neuf. Mais le propriétaire, Nasir Mahmood, ne partage pas l'idée de Pierre Poilievre selon laquelle le Canada est « brisé ».

De mon point de vue, dit-il, le Canada va bien. C’est injuste de dire que le pays est brisé.

Plusieurs de ses clients sont d'accord avec lui. Le Canada n’est pas brisé, soutient Saddar Zubair. En fait, il s’en tire très bien comparativement à d’autres pays dans le monde.

Pierre Poilievre a encore beaucoup de travail à faire pour gagner ma confiance, ajoute Sikandar. Ce n’est pas gagné d’avance, ni pour lui ni pour Justin Trudeau.

Attrait chez les jeunes

Ali Cheema met son casque de cricket.

Ali Cheema est agent immobilier.

Photo : Radio-Canada / Christian Larivière

Ali Cheema attache ses jambières et ajuste ses gants. Il se prépare pour la prochaine manche de cricket. C’est son tour au bâton.

J’aimais bien Justin Trudeau, confie cet agent immobilier de 32 ans. Mais il s’apprête à changer son fusil d’épaule.

Je ne suis pas conservateur, mais j’ai beaucoup d’espoir envers Pierre Poilievre. J’aime son style et ses propositions.

Une citation de Ali Cheema, agent immobilier

Le jeune homme et sa fiancée souhaitent fonder une famille, mais ils s'inquiètent de l’avenir en raison du climat économique actuel. Ali blâme les libéraux pour la situation difficile et est convaincu que Pierre Poilievre réglera ces problèmes.

Le vote des banlieues torontoises est crucial pour remporter les élections fédérales. Une circonscription sur six au Canada est située dans cette région. Les communautés qui y vivent ne sont pas homogènes, mais elles votent souvent en bloc.

Un jour, c’est libéral, puis le vent souffle et les conservateurs passent au pouvoir, fait remarquer Sultan.

Pour Justin Trudeau ou Pierre Poilievre, la partie est loin d’être gagnée d’avance.

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