Les meilleures hockeyeuses du Nouveau-Brunswick contraintes à s’exiler

Alyson Blanchard de Caraquet a déménagé a des centaines de kilomètres de chez elle pour jouer à un niveau élite.
Photo : Gracieuseté : Jeff Urquhart
Par faute d’occasions dans la province, de nombreuses joueuses de hockey du Nouveau-Brunswick doivent déménager pour poursuivre leur rêve.
C’est le cas d’Alyson Blanchard de Caraquet qui, pour trouver une équipe de son niveau, a dû déménager dans la région de Saint-Jean. Elle porte désormais les couleurs du Kraken de Fundy M18 dans la ligue élite des Maritimes, faute d’équipe féminine dans sa région.
C'était dur pour moi de faire une équipe AAA [masculin] parce que c’était ça que je voulais faire, jouer dans du haut calibre. Donc je tombais AA ou récréatif, mais à la place ça me tentait d’être AAA [féminin] et jouer dans les gros niveaux
, affirme celle qui a toujours joué dans des équipes masculines jusqu'à cette année.
Les trois équipes élites de niveau M18 au Nouveau-Brunswick se trouvent toutes dans le sud de la province. Ce qui rend la tâche difficile pour les joueuses du nord selon Alyson Blanchard.
« Pour les jeunes filles qui veulent jouer dans des hauts niveaux et qui sont dans la Péninsule acadienne, il faut qu’elles montrent leur talent et qu’elles trouvent une manière de se rendre ici parce qu'il n'y a pas d’équipe dans la Péninsule. »
La hockeyeuse de tout juste 15 ans avoue que quitter sa famille a été une décision difficile à prendre. Mes parents m’ont parlé de ça et je trouvais que c’était une bonne idée, j’aimerais ça. Mais ça serait un peu dur de changer de Caraquet à Saint-Jean, sans mes parents, sans ma sœur, sans ma famille
.
La jeune gardienne adore toutefois son nouvel environnement et sa nouvelle famille d'accueil.
C’est le fun, c'est différent que de tout le temps être avec des gars. T’es la seule fille et tu te sens laissée de côté parce que t’es pas pareille. Mais là, avec les filles, c’est un grand groupe, on est toutes des amies
, affirme la gardienne qui a fait face à plus de 1000 tirs lors de la difficile saison du Kraken.
Du Nouveau-Brunswick au Québec
Elle n’est pas la seule joueuse du nord du Nouveau-Brunswick à prendre ce parcours. Audrey Clavette d’Edmundston a également quitté sa famille pour évoluer avec l’équipe élite de Fredericton.
« Si je voulais jouer à un niveau plus haut, il fallait que je déménage à Fredericton. Je dirais que c’est la différence entre venir du Nouveau-Brunswick ou du Québec. Au Québec c’est sur que tu pourrais te trouver une équipe plus forte plus proche. »
Aujourd’hui, elle joue en banlieue de Montréal au Cégep André Laurendeau. Une décision qu’elle a prise pour parfaire son jeu avant le niveau universitaire.
On dirait qu'il n'y a pas le step entre U18, que je jouais l’année passée, et universitaire. Tandis qu’ici j’ai deux ans que je peux continuer de m’améliorer pour que quand j'arrive universitaire, je peux avoir ma place dans l’équipe et pas juste être une fille de 4e ligne
, argumente-t-elle. Elle ajoute que l’encadrement est bien supérieur dans son nouvel environnement.
Le rêve américain
Certaines joueuses vivent également le rêve américain. Quelques-unes prennent le chemin des universités de la NCAAPrinceton.
comme Dominique Cormier de Sainte-Marie-de-Kent. Elle étudie et joue maintenant pour la prestigieuse UniversitéElle s’est fait courtiser par une demi-douzaine d'universités avant de se retrouver au New Jersey. Je savais que je voulais jouer universitaire, mais je pensais juste au Canada. Ça aurait été une bonne décision aussi, mais mon parcours m’a amené ici
, retrace Dominique Cormier.
Et son chemin l'a aussi menée au Québec, où elle a passé quelques années au Collège Stanstead.
Et ce parcours a visiblement porté ses fruits. En deux saisons à Princeton, elle compte 20 points en 55 matchs. Tout ça en tentant de concilier hockey et sa charge de cours de cette école de la Ivy League.
C’est vrai que c’est vraiment spécial, c’est pas mal à ça que je m’attendais et plus. L’école c’est difficile, mais ça va être worth it à la fin
, avoue-t-elle.
La décision de quitter le Nouveau-Brunswick n’a non plus été facile pour elle, qui vit loin de sa famille depuis plusieurs années maintenant.
Son parcours a fait en sorte qu’elle est apparue sur le radar de Hockey Canada. Elle participe à des camps de l’équipe nationale depuis quelques années. C’est vraiment une expérience inoubliable. Ça fait quatre ans que je vais au camp et c’est toujours un honneur de se faire inviter.
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Un contrat historique qui donne de l'espoir
Le parcours de ces joueuses s’arrête souvent au niveau universitaire, faute de perspectives d'avenir viables pour les femmes.
Mais la situation semble s'améliorer. De nouvelles ligues se créent et des contrats historiques comme celui de 200 000 dollars par année attribués à Daryl Watts du Six de Toronto apportent une lueur d’espoir.
Ça donne beaucoup de motivation à moi et beaucoup d’autres filles de continuer à jouer au hockey et d’avoir un but pour se rendre loin. Ça nous donne plus d'espoir pour le futur
, affirme Dominique Cormier qui rêve aussi de jouer en Europe.
C’est nice de voir que le hockey féminin peut maintenant avoir une place plus importante
, ajoute Audrey Clavette.
Et qui sait, peut-être que l’une d’entre elles va briser encore plus ce plafond de verre qui plane au-dessus du hockey féminin.