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Doug Ford retourne à Queen’s Park avec l’urgence de réformer le système de santé

Les députés ontariens reviennent en Chambre mardi après une pause hivernale de plus de deux mois. Voici quelques dossiers à surveiller.

Doug Ford, les bras ouverts, derrière un lutrin.

Le premier ministre Ford en janvier, lors de l'inauguration d'un nouvel espace à l'hôpital Michael Garron, le Thomson Patient Care Centre.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui/CBC

« Le statu quo n’est plus acceptable. Nous devons être audacieux, innovateurs, créatifs. » Cette phrase, le premier ministre Doug Ford et sa ministre de la Santé Sylvia Jones la répètent sur toutes les tribunes. Les progressistes-conservateurs préparent le terrain depuis un moment : la réforme du système de santé sera vraisemblablement leur cheval de bataille en cette rentrée parlementaire.

On a déjà une idée des restructurations à venir : le gouvernement Ford veut notamment faire une plus grande place aux cliniques privées, en augmentant le nombre et la gamme d’interventions médicales qui y sont pratiquées. Son objectif : réduire les temps d’attente et libérer de la capacité dans les hôpitaux débordés. C’est l’un des premiers projets de loi qui seront déposés au retour en Chambre. On s’attend à des débats houleux avec l'opposition.

Doug Ford sait qu’il touche ici une corde sensible. D’ailleurs il n’emploie jamais le mot privé, parlant plutôt de centres de soins indépendants et communautaires. Il y a aussi une autre phrase que Ford et Jones répètent : les Ontariens n’auront jamais à se servir de leur carte de crédit, ce sera toujours leur carte Santé. Autrement dit, on n’essaie pas de créer un système de santé à deux vitesses, tente de rassurer le gouvernement.

Mais les pratiques de vente incitative au privé (upselling) – se faire proposer des services supplémentaires qui ne sont pas couverts par l’assurance maladie – sont avérées en Ontario; la vérificatrice générale l’avait noté dans un rapport (Nouvelle fenêtre). La ministre de la Santé réitère que les patients à qui l'on n’offre pas une option de soins remboursés peuvent porter plainte. Un processus qui n’est pas si simple, comme nous l’avions rapporté. Le gouvernement Ford devra en faire plus pour convaincre à ce chapitre.

Doug Ford, portant un masque, pointant du doigt, entouré de professionnels de la santé.

Le premier ministre Doug Ford veut réformer le système de santé, et martèle que le « statu quo n'est plus acceptable ».

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui/CBC

Bien des questions demeurent aussi sans réponse : combien de nouvelles licences de cliniques privées seront octroyées? Combien de ces centres seront à but lucratif? Le Nord de l’Ontario sera-t-il desservi? Y aura-t-il une liste d’attente centralisée? Et comment éviter un exode des travailleurs de la santé du public au privé? Le diable est dans les détails, il faut attendre le projet de loi.

Dans tous les cas, la pression d’agir est forte pour le gouvernement Ford, souligne la professeure à l’Université d’Ottawa Geneviève Tellier. Les problèmes perdurent, les pénuries de main-d'œuvre, les listes d'attente.

Justement, M. Ford a peut-être choisi le bon moment pour s’ouvrir à la privatisation. On a un peu l'impression au sein de la population qu'on est découragé, note la politologue, et qu'on est prêt à se tourner vers n'importe quel type d'organisation, si c'est pour nous assurer d'avoir des services. Je pense que les gens sont peut-être un petit peu plus ouverts à l'idée de la privatisation qu'ils l'étaient il y a quelques années. Évidemment, ce n'est pas quelque chose qui fait consensus. D'ailleurs, ça reste à être prouvé si c'est la solution.

L'administration Ford a d’autres idées pour améliorer le réseau et s’attaquer à la pénurie de personnel : entre autres, faire venir des travailleurs d’autres provinces et leur permettre de travailler immédiatement. Il doit aussi présenter un projet de loi pour permettre d’affecter temporairement des infirmières, ambulanciers et inhalothérapeutes en dehors du cadre de leurs responsabilités ou milieux habituels.

Ceinture de verdure et liens avec les promoteurs

Le gouvernement Ford avait fait du logement sa priorité l’automne dernier à Queen’s Park, et rappelle encore régulièrement son objectif de construire 1,5 million de nouvelles habitations en dix ans. L’un des moyens d’y arriver : retirer 7400 acres de la ceinture de verdure, une zone protégée dans la région de Toronto, pour y permettre la construction.

Les tensions à ce sujet ne risquent pas de s’apaiser. Ce plan controversé fait déjà l’objet d'enquêtes indépendantes du commissaire à l’intégrité et de la vérificatrice générale. La Police provinciale de l’Ontario examine aussi le dossier.

Les partis d'opposition continuent ici de s'interroger sur les liens entre l’administration Ford et ses amis promoteurs. Ils allèguent que le gouvernement a averti certains promoteurs immobiliers de ses plans, qui bénéficieraient des nouvelles limites.

Une enseigne au bord d'une route dans une zone boisée.

Le gouvernement Ford a modifié les limites de la ceinture de verdure, une décision qui continue de faire réagir.

Photo : The Greenbelt Foundation

De récentes révélations sur des promoteurs invités aux festivités de mariage de l’une des filles du premier ministre ont ajouté de l’eau au moulin. Ça ne sent pas bon, répètent le NPD, les libéraux et les verts.

Pour Geneviève Tellier, les enquêtes en cours n’empêcheront probablement pas le développement immobilier, mais toute cette affaire peut porter atteinte à la crédibilité du premier ministre. Ce n'est pas à négliger, ça pourrait lui causer des dommages sur sa réputation et le soutien public pourrait s'effriter.

Les libéraux ont été pénalisés – puis c'est peut-être en partie à cause de ça qu'ils ont perdu la dernière fois l'élection de 2018 – après des allégations de copinage, rappelle-t-elle. On disait : on sait bien, les politiciens, le gouvernement au pouvoir, récompensent leurs amis et ne pensent pas au bien du public.

Partis d’opposition

Cette rentrée parlementaire marque aussi l’entrée en scène de Marit Stiles à titre de cheffe de l’opposition officielle. La nouvelle leader du NPD doit encore clarifier la vision qu’elle a pour son parti, et la manière dont elle se distinguera de sa prédécesseure Andrea Horwath. Pour l'instant, elle a promis d’être « à l’écoute ». Son entrée en poste garantit au moins un peu plus de stabilité face au gouvernement Ford.

Marit Stiles, debout derrière un podium orange, entourée de deux membres de son caucus.

La nouvelle cheffe du NPD Marit Stiles, lors d'une réunion du caucus quelques jours avant cette rentrée parlementaire.

Photo : Radio-Canada

Le Parti libéral, de son côté, n’était pas pressé de tenir une course à la chefferie. Il a tout de même prévu de préciser les modalités de cette élection lors de son assemblée annuelle début mars.

Plusieurs candidatures potentielles se dessinent : les députés fédéraux Nate Erskine-Smith et Yasir Naqvi et les provinciaux Mitzie Hunter et Ted Hsu sont parmi les noms qui circulent… ainsi qu’un certain Mike Schreiner? Le chef du Parti vert de l’Ontario, directement courtisé par certains libéraux, songe-t-il vraiment à se lancer dans cette course? Il a déclaré qu’il voulait prendre le temps d’y penser. Il aura au moins bénéficié d’un boost d’estime.

Impact de l’affaire Tory?

La démission-choc du maire de Toronto survient dans un contexte particulier : John Tory venait tout juste d’obtenir de nouveaux pouvoirs de maire fort de la part de la province, qu’il a lui-même réclamés et qui lui permettent de prendre certaines décisions avec l'appui d’un tiers seulement du conseil.

Doug Ford avait dit oui à Tory parce qu’il voyait en lui un allié, capable de porter les priorités des progressistes-conservateurs à l’hôtel de ville. Mais si un maire d’une autre sensibilité politique est élu pour lui succéder, cela risque de compliquer le portrait.

Le prochain maire de Toronto pourrait être quelqu'un qui serait moins enclin à collaborer avec M. Ford, notamment en termes de développement rapide du logement ou du transport en commun, note Geneviève Tellier, qui rappelle que le maire d’Ottawa, lui, a refusé d’utiliser les super-pouvoirs que la province lui a aussi offerts.

Le premier ministre ontarien Doug Ford et le maire John Tory lors d'un rassemblement en hommage aux victimes d'une fusillade à Toronto.

Doug Ford regrette le départ de John Tory, qu'il voyait comme un allié.

Photo : La Presse canadienne / Chris Young

Doug Ford n’a pas caché ses craintes : Si un maire de gauche arrive, on est foutus, ce serait un désastre, selon moi, disait-il la semaine dernière.

Par ailleurs, on pourrait voir un rebrassage de cartes à Queen’s Park si des députés provinciaux décident de se présenter à la mairie. Le politologue Peter Graefe ne serait pas surpris de voir Michael Ford, le neveu de Doug Ford, se lancer dans la mêlée.

À surveiller aussi – en rafale :

  • Le budget de l’Ontario doit normalement être déposé avant le 31 mars. Le ministre des Finances arrivera-t-il à équilibrer les livres? Peter Bethlenfalvy a déjà indiqué que la situation s’était améliorée depuis la mise à jour économique de l’automne dernier, malgré « l’incertitude économique et géopolitique ». Il faudra surveiller en particulier le budget de la santé et ce qui découlera des négociations bilatérales entre Ottawa et l'Ontario.
  • Une élection partielle est prévue le 16 mars dans Hamilton Centre pour combler l’ancien siège d’Andrea Horwath : un premier test pour le NPD sous le leadership de Marit Stiles.
  • Les négociations collectives avec les enseignants se poursuivent. Aux dernières nouvelles, ils étaient encore loin d’une entente. Mais le gouvernement Ford a certainement tiré des leçons de son automne explosif avec les travailleurs de l’éducation, et le ministre de l’Éducation Stephen Lecce a promis des négociations « de bonne foi ».
  • Le gouvernement Ford a décidé de porter en appel une décision d’un juge de la Cour supérieure, qui a déclaré que la loi 124 était invalide. Cette loi limite à 1 % les augmentations salariales dans le secteur public, et ses critiques disent qu’elle a accentué les problèmes d’embauche et de rétention de personnel. Si l’appel de la province est débouté, elle devra débourser des milliards de dollars en paiements rétroactifs.

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