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La faillite de LA Renaissance des Îles devrait être déclarée jeudi

Une usine en bordure du quai de Grande-Entrée en hiver.

LA Renaissance des Îles est un transformateur de produits marins d'importance dans l'archipel. L'entreprise exploite deux usines, à Gros-Cap et Grande-Entrée. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose

Tout indique que LA Renaissance des Îles, qui traîne une dette globale de près de 20 millions de dollars, déclarera faillite jeudi, lors de l’assemblée des créanciers. Un nombre suffisant de homardiers madelinots se sont déjà prononcés contre la proposition aux créanciers.

L’Office des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine et le syndic de faillite de LA Renaissance ont tous deux confirmé à Radio-Canada qu’au moins 54 des 67 homardiers concernés avaient déjà voté par anticipation contre la proposition présentée aux créanciers à la mi-janvier.

À eux seuls, les pêcheurs de homards sont assez nombreux pour faire dérailler le plan de relance de l’entreprise qui transforme près du quart des fruits de mer pêchés dans l’archipel. La majorité d'entre eux devait approuver la proposition pour qu'elle puisse aller de l'avant.

Catégories de votants

Pour être acceptée, la proposition aux créanciers doit être approuvée par deux catégories distinctes de créanciers non garantis :

1) l’ensemble des créanciers non garantis ;
2) les 41 pêcheurs de homard qui ont des déductions à la source impayées par LA Renaissance des Îles.

Dans ces deux catégories, deux conditions devaient être respectées :

1) que la majorité (50 % +1) accepte la proposition ;
2) que la valeur des créances de ceux-ci représente les deux tiers des montants dus par LA Renaissance des Îles.

Ainsi, si tous les homardiers concernés se prévalent de leur droit de vote, au moins 34 d'entre eux doivent approuver la proposition pour qu'elle soit acceptée, ce qui n'est pas le cas actuellement.

Les pêcheurs de homard ont plutôt voté massivement contre l’offre de LA Renaissance des Îles.

« En date de ce jour, la proposition ne serait pas acceptée, et il va y avoir une faillite présumée jeudi lors de l’assemblée de créanciers. »

— Une citation de  José Roberge, président du syndic en insolvabilité Roy Métivier Roberge

LA Renaissance embauche quelque 300 employés dans ses deux usines de transformation de Gros-Cap et de Grande-Entrée. Elle transforme entre 20 et 25 % des fruits de mer pêchés au large des îles de la Madeleine et est la seule entreprise madelinienne à commercialiser la chair de homard congelée à grande échelle.

Un revirement de situation encore possible, mais improbable

La seule chose qui pourrait changer la donne, c’est si l’Office des pêcheurs nous arrive avec des amendements à la proposition qui pourraient faire en sorte qu’ils changent le votre contre pour un vote pour, mais s’il n’y a pas de nouvelle entente avec la débitrice, il y aura faillite jeudi, explique José Roberge.

Le syndic affirme qu'il a tenté, sans succès, d’entrer en contact avec des représentants de l’Office pour savoir si les pêcheurs avaient l’intention de présenter une contre-offre.

Le président de l’Office des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine a aussi indiqué à Radio-Canada qu’il n’y avait, à sa connaissance, aucune démarche en cours pour amender la proposition actuelle.

Pour le moment, il n’y a pas de discussions pour amendement qui sont en cours, affirme le président du syndic de faillite, José Roberge. À l’heure où on se parle, j'ai annulé tous mes rendez-vous avec les comptables, les avocats, les fiscalistes, les gouvernements et les institutions financières qui regardaient pour relancer les opérations dans ce dossier-là. Maintenant, on parle d’un syndic qui liquiderait les actifs.

Le bâtiment industriel a aussi un petit commerce à l'avant pour vendre ses produits.

LA Renaissance cumule une dette de 9,2 M$ auprès de 325 créanciers non garantis qui pourraient tout perdre dans l'aventure. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose

Un lien de confiance rompu entre les pêcheurs et LA Renaissance

Selon l'avocat des pêcheurs, Me Serge Petit, plusieurs conditions préalables à l'acceptation de la proposition, dont l'obtention d’une nouvelle entente de financement avec une banque et d’une aide financière gouvernementale, n'étaient pas encore respectées. Les pêcheurs ne croyaient pas que c'était viable, dit Me Petit.

Le président de l’Office des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine, Rolland Turbide, estime que Lynn Albert, la présidente-directrice générale et seule actionnaire de LA Renaissance des Îles, a perdu la confiance de tous ses pêcheurs.

On a fait une réunion sur le dossier le 27 janvier et tous les pêcheurs qui sont allés au micro ont dit : "Plus jamais je ne vais livrer du poisson à Lynn Albert" , raconte Rolland Turbide.

En vertu de la proposition soumise aux créanciers, chacun des 325 créanciers non garantis aurait reçu un remboursement de 1000 $. La balance des créances aurait été remboursée à 54 % d’ici sept ans, selon les estimations du syndic.

Rolland Turbide photographié devant une pancarte de l'Office des pêcheurs de homard des Îles-de-la-Madeleine.

Rolland Turbide est président de l'Office des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine. Il qualifie la proposition de «ridicule». (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose

Cette proposition est jugée ridicule par le président de l’Office.

La proposition de payer 54 % sur sept ans, ce n’était pas plausible, c’était impossible. Elle part à moins 9 millions; c’était impossible qu’elle passe à travers ça, les pêcheurs ont préféré voter contre, explique Rolland Turbide.

« Pour qu’elle puisse payer les pêcheurs, ça lui prend du poisson; le poisson, ce sont les pêcheurs qui l’apportent. Est-ce qu’ils vont prendre encore le risque de ramener du poisson sans savoir s’ils vont être payés? »

— Une citation de  Rolland Turbide, président de l’Office des pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine

Les créanciers non garantis risquent de tout perdre

Le syndic de faillite affirme déjà avec conviction qu’aucun des 325 créanciers non garantis ne pourra revoir la couleur de son argent en cas de faillite. La valeur de la dette envers ces créanciers ordinaires s'élève à 9,2 millions de dollars, soit près de la moitié de la dette globale de LA Renaissance.

Ça va être une perte totale pour les créanciers non ordinaires, indique José Roberge. Avec la faillite, c’est clair dans ce dossier-là qu’on n’anticipe aucun dividende pour les créanciers ordinaires; ça, c’est sûr, sûr, sûr. C’est une perte totale pour eux autres.

LA Renaissance des Îles devait environ 3 millions de dollars à 67 homardiers madelinots.

Des dizaines d’entreprises madeliniennes font aussi partie de la liste des créanciers non garantis.

Quelques exemples des montants dus par LA Renaissance à des entreprises madeliniennes :

  • 469 000 $ à la coopérative Cap Dauphin de Grosse-Île;
  • 178 000 $ à Navigation Madeleine;
  • 86 300 $ au Club voyage des Îles;
  • 63 300 $ à Lavages industriels Vigneau;
  • 25 200 $ à Électro-informatique Michaud;
  • 21 200 $ à Gestion CLD.

De nombreux ministères font aussi partie des créanciers non garantis, dont Pêches et Océans Canada, pour une somme de 636 000 $. L'entreprise doit aussi de l'argent à Développement économique Canada (556 000 $) et à l'Agence de revenu du Québec (218 000 $).

Le syndic croit même que Financement agricole Canada, un créancier qui dispose des garanties sur les actifs de LA Renaissance, risque de perdre plusieurs millions de dollars dans une faillite en liquidant les actifs.

Selon les votes déjà compilés par le syndic de faillite dont Radio-Canada a obtenu copie, la majorité des créanciers non garantis qui ne sont pas pêcheurs ont voté en faveur de la proposition des créanciers.

On avait fait une catégorie particulière pour favoriser les pêcheurs et ça n'avait été pas facile à faire passer, parce que les autres créanciers ne comprenaient pas pourquoi on avantageait les pêcheurs dans le cadre du dossier, explique M. Roberge. Ils considérerait que les pêcheurs auraient dû être traités sur le même pied d’égalité. Et c’est finalement les pêcheurs, avec la catégorie spéciale, qui viennent mettre l’entreprise en faillite. C’est assez inusité, par expérience.

Des pêcheurs sur des bateaux remplis de casiers à homard.

Des pêcheurs tenteraient de trouver une solution pour opérer le vivier de LA Renaissance. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose

Un groupe de pêcheurs madelinots songerait à mettre sur pied une coopérative dans le but d'acquérir ou de louer le vivier de LA Renaissance pour conserver le homard vivant lors de la prochaine saison de pêche.

Radio-Canada a joint un représentant du groupe qui n'a pas voulu commenter avant la fin de l'assemblée des créanciers, laquelle se tiendra jeudi au palais de justice de Percé.

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