Surdose de fentanyl : un Ontarien écope de 8 ans de prison pour homicide involontaire
Derrick Adams avait fourni la drogue à une adolescente de 17 ans qui est morte en 2021 à la suite d'une transaction avec le trafiquant.

Le jugement de la Cour de justice de l'Ontario avait confirmé que tout trafiquant de fentanyl peut être coupable d'homicide involontaire si la victime meurt d'une surdose.
Photo : iStock
Au tribunal de Simcoe, Derrick Adams est condamné à 8 ans de prison pour homicide involontaire relativement à la mort par surdose d'une adolescente. La jeune fille de 17 ans est décédée à l'hôpital de Simcoe, près de Port Dover, dans le sud de l'Ontario, en 2021.
Derrick Adams avait été reconnu coupable en novembre dernier de trafic de fentanyl, d'homicide involontaire et de négligence criminelle ayant causé la mort à l'issue de son procès l'automne dernier.
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Dans son verdict, la juge Aubrey Danielle Hilliard, de la Cour de justice de l'Ontario, avait statué à l'époque que toute personne raisonnable aurait dû connaître les risques que comportait une transaction de fentanyl.
Rachel (la victime ne peut être identifiée que par son prénom, NDLR), est morte d'une surdose le 27 août 2021. La juge a d'ailleurs tenu compte du jeune âge de l'adolescente dans sa sentence.
L'individu de 42 ans, qui a un lourd passé criminel, était de retour mardi matin devant le tribunal de Simcoe pour connaître sa peine. L'audience, très brève, s'est déroulée par visioconférence.
Vêtu d'une tenue de prisonnier orange, l'homme chauve est apparu masqué dans la salle du Centre de détention de Hamilton-Wentworth réservée aux comparutions virtuelles.
La magistrate a juste pris le temps de citer le nombre d'années qu'il reçoit pour chaque accusation pour laquelle il a été condamné et le nombre d'années qu'elle lui a accordées pour le temps qu'il a passé en détention préventive depuis son arrestation en septembre 2021.
Derrick Adams n'aura donc plus que cinq ans et demi à purger en détention, grâce à un crédit de 786 jours.
Avant de conclure l'audience, la juge s'est adressée à l'individu de vive voix. J'espère que c'est la fin de votre parcours dans notre système de justice pénale
, lui a-t-elle dit.
Victoire des 2 procureurs
Il s'agit d'une victoire sur toute la ligne pour la Couronne.
Le procureur de l'Ontario réclamait huit ans pour l'accusation d'homicide involontaire et de négligence criminelle ayant causé la mort.
Son homologue du fédéral exigeait une peine de six ans pour l'inculpation de trafic. Les deux peines devront être purgées de façon concomitante.
La défense demandait quant à elle une peine de cinq à six ans de détention pour l'ensemble des accusations.
Elle avait soumis lors de l'audience sur la détermination de la peine le mois dernier une lettre de son client qu'elle avait lue à la cour. Son client y exprimait des remords pour ce qui est arrivé à Rachel.
La magistrate note toutefois qu'il a néanmoins reporté une partie du blâme sur Rachel et des membres de la famille de la victime, en semblant minimiser son rôle dans la disparition prématurée de l'adolescente
.
Dans sa décision écrite, dont Radio-Canada a obtenu copie, la juge relève d'abord le lourd casier judiciaire de l'individu qui a été condamné dans le passé pour des délits de violence et plusieurs violations d'ordonnances judiciaires.
Une jurisprudence récente
La magistrate ajoute que la jurisprudence sur les surdoses de fentanyl est toujours en train de changer au pays, parce que le phénomène est relativement nouveau.
Elle écrit en revanche qu'il ne peut y avoir aucun argument au sujet des risques pour la santé que représente le fentanyl et que cette cause démontre les conséquences dévastatrices que le fentanyl pose aux utilisateurs
.
La juge souligne que l'objectif de toute condamnation pénale est de protéger la communauté, de contribuer à y faire respecter les lois et de maintenir une société juste, paisible et sécuritaire.
« Dans une tentative d'atteindre cet objectif, je dois imposer des sanctions qui tiennent compte de principes traditionnels comme la dénonciation, la dissuasion et la réinsertion, et promouvoir le sens des responsabilités chez les délinquants et la reconnaissance du préjudice qu'ils ont causé à la communauté. »
Elle affirme qu'il y a très peu de facteurs atténuants, sinon aucun, dans la conduite du prévenu.
Elle note par exemple qu'il n'existe aucune preuve selon laquelle M. Adams a enduré de pénibles moments en prison durant la pandémie au sujet, par exemple, du temps qu'il a passé en confinement cellulaire.
Une jeunesse tourmentée
Le jugement donne par ailleurs un aperçu de la vie du prévenu. Derrick Adams a choisi de vivre avec son père à l'âge de 12 ans lorsque ses parents ont divorcé.
Son père, qui était camionneur de métier et alcoolique, n'a toutefois pas passé beaucoup de temps avec lui à cause de son travail.
Le jeune Derrick a quitté l'école après une huitième année. Il a commencé à consommer de la méthamphétamine en cristaux à 17 ans.
Il n’a que 19 ans quand sa mère déménage à Winnipeg. Cette dernière succombe à un cancer en 2015. Son père, lui-même toxicomane, meurt quatre ans plus tard en 2019.
M. Adams souffre de dépression et de trouble déficitaire de l'attention pour lesquels il est maintenant traité en prison.
L'individu avait par ailleurs indiqué dans sa déclaration qu'il n'utiliserait ni ne toucherait plus jamais au fentanyl après sa remise en liberté.
Si M. Adams est en mesure de respecter cet engagement, ses perspectives pour une réinsertion sociale et une réadaptation au sujet de sa toxicomanie seront meilleures
, conclut la magistrate.