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Viser la jambe d’un suspect est contraire à la formation des policiers, selon des experts

Une voiture du Service de police de Winnipeg en stationnement dans la ville

Le 27 septembre dernier, le Service de police de Winnipeg a perquisitionné un logement de la rue Barber dans le quartier de Point Douglas, dans le centre-ville de la capitale manitobaine, afin de trouver un homme qui était recherché.

Photo : Radio-Canada / Jeff Stapleton

Radio-Canada

Un policier de la Ville de Winnipeg qui a tiré une balle dans la jambe d’un suspect armé d’un couteau a agi de manière contraire à sa formation, selon des experts. La semaine dernière, l’Unité d’enquête indépendante (UEI) a indiqué qu’aucune accusation ne serait portée contre l’agent.

L’incident s’est déroulé le 27 septembre dernier. Le policier, seul, a ouvert le feu après qu’un homme recherché armé d’un couteau avançait vers lui. Avant d’utiliser son arme de service, il avait tenté d’utiliser une arme à impulsion électrique, sans succès.

[L’agent] a écrit qu’il avait pris la décision [en une] fraction de seconde de viser et de tirer deux balles de son arme de service dans les jambes [du suspect], avec l’intention de tirer plus de balles sur son centre de masse [la partie haute du corps, NDLR], si ces premiers coups de feu étaient inefficaces, indique le rapport de l’UEI, qui a blanchi le policier.

Le professeur de criminologie à l’Université de Winnipeg Michael Weinrath trouve que cette histoire est surprenante. Il note qu’il est commun, après que la police abat une personne, que des membres de la communauté ou de la famille se demandent pourquoi les agents n'ont pas visé la jambe ou pourquoi ils n'ont pas tiré de coup de semonce.

Cela ne serait pas la procédure normale, dit le professeur. Si vous pensez que votre vie est en danger et que quelqu’un s'approche de vous avec un couteau, vous êtes censé viser le centre de masse, dans la poitrine, pour les arrêter, c’est la procédure normale à ma connaissance.

Il note que l’agent a pris un certain risque en visant ailleurs, mais est satisfait que la situation ait été résolue sans qu’une personne ne meure.

Plus proche d’Hollywood que de la réalité

Le sociologue spécialiste de la police à l’Université de Brandon, au Manitoba, Christopher Schneider affirme qu'il est toujours horrible de voir la police obligée d'utiliser la force. Il s’agit de la première fois qu’il entend un policier témoigner qu'il a visé les jambes d’un suspect.

C’est incompatible avec la formation de policiers. Lorsque la police utilise de la force meurtrière, notamment en tirant sur un suspect, c’est pour neutraliser, éliminer une menace, explique-t-il.

Il est particulièrement difficile de viser avec une arme de poing, selon Christopher Schneider. Les jambes sont une plus petite cible que le centre de masse et il y a moins de chances qu’une blessure à la jambe arrête un suspect.

L’idée d’un agent qui vise le genou, la jambe, le bras, cela correspond plutôt au divertissement de Hollywood, à la manière dont Hollywood représente le travail des policiers, avec cette [idée fictive] qu’ils visent autre chose que le centre de masse, ajoute M. Schneider, dont les recherches portent souvent sur le lien entre les médias et la police. Il note qu’un incident de ce genre est susceptible de déformer la perspective du public, en laissant croire qu’il est réaliste que les policiers tirent pour handicaper, plutôt que pour neutraliser (et, souvent, tuer).

Tirer pour arrêter la menace

Le porte-parole du Service de police de Winnipeg, Jay Murray, affirme que les agents utilisent leurs armes de service lorsqu’ils font face à une menace pour leur vie ou celle d’un autre.

Dans ces situations, notre but ultime est d’arrêter la menace de force létale dirigée vers le membre ou une autre personne, peu importe s’il en résulte une blessure critique, indique-t-il.

Le policier ajoute que le sens du terme centre de masse est souvent mal interprété. Il ne désigne pas toujours le tronc de l’individu. Il s’agit plutôt du centre de masse de la cible qui est présente.

Par exemple, cette cible peut changer en fonction de l’environnement (la présence de personnes en arrière-plan), un abri que la personne utilise (tel qu’un véhicule) où si elle porte des vêtements potentiellement protecteurs (tels qu’un gilet pare-balles), précise-t-il.

Dans le cas du policier qui a ouvert le feu le 27 septembre, celui-ci a différencié sa cible – les jambes du suspect – de son centre de masse, selon le rapport de l’UEI.

Les enquêteurs ont tout de même jugé qu’il s’agissait d’un usage de la force potentiellement meurtrière. Le directeur de l’UEI, Zane Tessler, a conclu que la force potentiellement létale utilisée par [l’agent] était autorisée et justifiée par la loi, selon le rapport.

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