L’achalandage toujours en baisse de 30 % dans le pont-tunnel Louis-H.-La Fontaine

L'achalandage a reculé de 32 % depuis le début des travaux majeurs dans le pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine.
Photo : Radio-Canada / Simon-Marc Charron
Trois mois après le début des travaux majeurs dans le pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine, lien crucial entre l'île de Montréal et la Rive-Sud, on est loin de l'apocalypse tant redoutée. La circulation automobile y a même chuté du tiers depuis l'automne dernier, montrent les données du ministère des Transports du Québec (MTQ).
Si les temps de parcours ont fortement grimpé en direction sud, ils sont demeurés stables en direction nord. En outre, il n'y a pas plus d'automobilistes qui empruntent les autres ponts enjambant le fleuve Saint-Laurent.
Le nombre de passages quotidiens dans le pont-tunnel est passé de 85 000 en septembre à 58 000 en novembre, après la fermeture de trois des six voies de circulation. Cette baisse d'achalandage de 32 % se maintient.
Le ministère aime croire que le message a passé. On a parlé de plan B pendant le mois d'octobre et novembre en disant : il y a une navette fluviale, il y a des autobus gratuits, il y a le métro, il y a le train, il y a le covoiturage
, avance le porte-parole du MTQ , Gilles Payer.
« Tout le monde a convenu d'une nouvelle façon de vivre ça, à savoir peut-être télétravailler un peu plus. »

On craignait que la fermeture partielle du tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine ait un effet catastrophique sur la circulation dans le Grand Montréal. Le pire n'est pas arrivé : les gens ont répondu à l'appel et changé leurs habitudes. Le reportage d'Olivier Bachand.
De nombreux automobilistes ont en effet décidé de modifier leurs habitudes pour éviter de rester pris dans les bouchons de circulation. C'est le cas d'Isabelle Rainville, une résidente de l'est de Montréal qui travaille à Boucherville. Depuis l'automne dernier, elle demeure trois jours par semaine chez son conjoint, sur la Rive-Sud, puis rentre chez elle pour faire du télétravail le reste de la semaine.
Souvent, je quitte le lundi matin pour le travail et je reviens chez moi à Montréal le mercredi soir. Ça m'évite d'avoir à prendre le tunnel trois matins
, explique-t-elle. Règle générale, elle emprunte donc le pont-tunnel seulement deux fois par semaine.
Nous avons fait le trajet avec elle mercredi soir dernier, du parc industriel de Boucherville jusqu'au quartier montréalais de Tétreaultville, dans l'arrondissement de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve. À moins d'un événement, d'un incident, rentrer à Montréal prend environ 30 minutes, du travail jusqu'à la maison. Avant, c'était 20 minutes
, dit-elle.
« C'est moins pire que ce à quoi je m'attendais. »
Des trajets plus longs en direction sud
Alors qu'une seule voie de circulation est ouverte en direction sud dans le pont-tunnel, les temps de parcours moyens ont considérablement augmenté dans cet axe depuis le début des travaux majeurs.
Selon le MTQ
, ils ont plus que doublé lors de l'heure de pointe du matin, passant de 11 à 25 minutes entre la sortie Beaubien, au sud de l'échangeur Anjou, et l'entrée du pont-tunnel. C'est encore pire à l'heure de pointe du soir, alors qu'ils ont grimpé de 7 à 38 minutes, un trajet cinq fois plus long qu'auparavant.À un moment donné, on parlait de deux à trois heures d'attente pour traverser, c'était comme un peu l'apocalypse. Finalement, c'est mieux que ce à quoi on s'attendait, mais c'est quand même dans les 40-50 minutes d'attente. C'est pas toujours évident
, indique le chroniqueur à la circulation de Radio-Canada, Yves Désautels.
C'est une tout autre histoire en direction nord, où deux voies de circulation sont ouvertes. Les temps de parcours demeurent inchangés matin et soir : il faut de 8 à 10 minutes pour parcourir le trajet entre le viaduc de Mortagne, à Boucherville, et la fin du pont-tunnel, du côté de Montréal.
On attendait quelque chose de beaucoup plus sévère
, admet le PDG de l'Association du camionnage du Québec, Marc Cadieux. On peut dire que le bilan est quand même très acceptable. Les mesures de mitigation mises en place par la ministre et son ministère ont donné leur effet.
En raison des travaux dans le pont-tunnel, le port de Montréal ouvre maintenant à 5 h, soit une heure plus tôt qu'auparavant, pour accueillir les camions avant l'heure de pointe. Certains transporteurs ont aussi revu leurs horaires et leurs routes de livraison, pour éviter la congestion.
Il y a évidemment une diminution des usagers de la route conventionnels, mais il y a aussi une redistribution de notre industrie sur d'autres infrastructures
, indique Marc Cadieux.
Un impact plutôt timide sur les autres ponts
Depuis la fermeture de la moitié des voies de circulation dans le pont-tunnel, le 31 octobre dernier, l'achalandage a globalement baissé sur les autres ponts qui relient Montréal et la Rive-Sud, ce qui peut paraître surprenant.
S'il est normal que le congé des Fêtes entraîne une diminution des passages en décembre et en janvier, les données pour les mois d'octobre et de novembre montrent que la fermeture partielle du pont-tunnel n'a eu aucun impact sur les ponts Jacques-Cartier et Samuel-De Champlain.
Pendant cette période, l'achalandage a baissé en direction nord sur les deux ouvrages et est demeuré stable en direction sud. C'est plutôt au printemps dernier que la circulation avait augmenté de façon substantielle sur les deux ponts.
L'impact s'est fait sentir à partir du mois d'avril, au moment où le consortium responsable des travaux au tunnel La Fontaine a fermé une voie sur la 25 sud vers le tunnel, donc de Montréal vers la Rive-Sud
, explique Martin Chamberland, le directeur des opérations du Groupe Signature sur le Saint-Laurent, le gestionnaire du pont Samuel-De Champlain.
Selon l'entreprise, cette fermeture a fait bondir l'achalandage de 5 à 6 % en direction sud sur le pont qui relie Brossard à la métropole. S'il n'y a pas eu de répercussions supplémentaires cet automne, la congestion s'est tout de même alourdie.
Avant les travaux au tunnel La Fontaine, l'heure de pointe commençait vers 15 h-15 h 30. Là, elle commence une heure plus tôt, vers 14 h 30, et les files d'attente sont plus longues. Une file d'attente typique était jusqu'à La Vérendrye, Atwater. Maintenant, ce n'est pas anormal que ça se rende à l'échangeur Turcot », explique M. Chamberland.
« Les impacts sont, somme toute, acceptables et gérables. »
Si les passages en direction sud ont aussi grimpé le printemps dernier sur le pont Jacques-Cartier, l'organisme fédéral qui gère l'ouvrage est incapable de dire si les premières entraves dans l'axe du pont-tunnel sont en cause. On observait au même moment une hausse de la circulation liée à l'amélioration de la situation sanitaire.
Il y en a qui ont changé leurs itinéraires, sauf que c'est Jacques-Cartier qui écope à ce moment-là et les rues également de la ville de Montréal, comme Sherbrooke, Notre-Dame, Ontario, ce n'est pas évident
, estime pour sa part le chroniqueur Yves Désautels.
L'administration Plante s'inquiète d'ailleurs de l'augmentation de la circulation de transit dans certains quartiers du Centre-Sud et de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve, et réclame l'installation de radars photo supplémentaires. Les radars photo, oui, ça fait partie des choses que je regarde, je pense que c'est un moyen qui peut être efficace
, a répondu la ministre des Transports du Québec, Geneviève Guilbault.