Cri d’alarme sur la situation en protection de la jeunesse

Le manque de main-d'œuvre touche aussi les services de protection à l'enfance. (Photo d'archives)
Photo : iStock / Katarzyna Bialasiewicz
Climat de travail toxique, détresse psychologique, démotivation et stress bouleversent les travailleurs de la protection de la jeunesse en Gaspésie et aux Îles, selon l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), qui les représente.
Nos intervenants sont épuisés, à bout de souffle. Ils nous mentionnent qu'ils vivent avec la crainte d’échapper des dossiers et avec un manque de temps pour faire les suivis nécessaires. C'est une charge de travail qui est immense
, raconte Jenny Tardif, représentante nationale de l'APTS en Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine.
Cette situation s'explique notamment par le manque chronique de personnel. En Haute-Gaspésie par exemple, ce sont seulement 7 des 15 postes d'intervenants qui sont pourvus, selon le syndicat. Aux Îles-de-la-Madeleine, 40 % des postes n'ont pas de titulaire.
Dans la Baie-des-Chaleurs, près d’un tiers des postes sont maintenant vacants, après le départ dans les dernières semaines de trois employés. De semaine en semaine, on voit que la situation se dégrade
, constate Jenny Tardif.
Selon elle, ce sont des situations qui perdurent, notamment dans les centres jeunesse.
Elle note que des postes sont affichés plusieurs fois avant qu'un candidat soit recruté. On peut donc constater qu’il y a très peu d’intérêt pour aller travailler en centre jeunesse. L’ancienneté moyenne pour les centres jeunesse en Gaspésie est à peu près de deux ans
, indique-t-elle.
« Ce sont de très jeunes ressources qui vivent un stress immense. »
Des recommandations encore à mettre en place
Un peu moins de deux ans après le dépôt du rapport de la Commission Laurent, l'APTS dit constater que les recommandations du rapport tardent à être appliquées dans la région. Les solutions ne sont pas mises en place. La situation ne s’est que peu améliorée
, déplore Jenny Tardif.
Le rapport de la Commission Laurent demandait notamment au gouvernement d’ajouter des intervenantes pour répondre au volume de la demande et de les délester de certaines tâches administratives.
Jenny Tardif demande par exemple que la charge de travail exigée des intervenants puisse être accomplie dans une semaine de 35 heures.
Selon elle, les déplacements des intervenantes ainsi que les différents niveaux de complexité de chacun des dossiers devraient être mieux calculés.
Il demeure aussi nécessaire, selon elle, de revaloriser la profession d’intervenant en centre jeunesse par des mesures d’attraction spécifiquement pour ces centres.
Réponse du CISSS
Note aux lecteurs
Cet article a été modifié puisque le CISSS
de la Gaspésie n'avait pas répondu à nos questions au moment de publier ces lignes. L'organisation nous a fait parvenir ses commentaires par la suite que nous avons résumés.Le CISSS
se dit au fait des défis des équipes de la protection de la jeunesse et reconnaît que des équipes fonctionnent avec du personnel réduit.Le CISSSNous considérons que les personnes sont en place au sein de notre équipe aux Îles-de-la-Madeleine
, écrit le porte-parole du CISSS .
Le CISSS
indique qu’une nouvelle directrice du programme jeunesse, Sylvie Desrosiers, est en poste depuis quelques semaines.Cette dernière devrait effectuer le tour des installations et rencontrer les équipes afin de cerner les enjeux et d’apporter des solutions. Du travail de recrutement est en cours, entre autres grâce à un programme de bourses pour certains professionnels qui travaillent dans ces services.
Le CISSS
ajoute que plusieurs recommandations du rapport Laurent sont en cours de réalisation dont le rehaussement du programme de qualification des jeunes avec l'ajout d'un intervenant, le lancement du programme agir tôt, l'embauche d'un chargé de projet en programmation des milieux de vie et le projet de coparentalité.