Le réalisateur iranien Jafar Panahi entame une grève de la faim

Jafar Panahi a été arrêté le 11 juillet dernier et a été contraint de purger une peine de six ans de prison pour «propagande contre le système».
Photo : Getty Images / ATTA KENARE
Le réalisateur iranien primé Jafar Panahi, emprisonné à Téhéran depuis six mois, affirme avoir entamé une grève de la faim pour protester contre les conditions de sa détention, selon une déclaration publiée jeudi par sa femme.
Jafar Panahi, dont les films ont été primés dans plusieurs festivals de cinéma européens, a été arrêté en juillet avant même le début de la vague d'actions de protestation qui secoue le régime iranien depuis le mois de septembre.
Malgré des espoirs pour sa libération le mois dernier, Jafar Pahani reste détenu à la prison d'Evin, dans la capitale iranienne.
Aujourd'hui, comme beaucoup de personnes piégées en Iran, je n'ai d'autre choix que de protester contre ce comportement inhumain avec ce que j'ai de plus cher : ma vie
, a-t-il déclaré.
Je refuserai de manger et de boire et de prendre tout médicament jusqu'à ma libération
, a ajouté le cinéaste, dont la grève de la faim a commencé le 1er février.
« Je resterai dans cet état jusqu'à ce que, peut-être, mon corps sans vie soit libéré de prison. »
Condamné pour propagande
Âgé de 62 ans, Jafar Panahi a été arrêté le 11 juillet dernier et a été contraint de purger une peine de six ans de prison, prononcée en 2010, pour propagande contre le système
.
Le 15 octobre, la Cour suprême a toutefois annulé la condamnation et ordonné un nouveau procès, laissant naître chez son équipe un espoir de libération.
Jafar Panahi a gagné un Lion d'or à la Mostra de Venise en 2000 pour son film Le cercle. En 2015, il a été récompensé d'un Ours d'or à Berlin pour Taxi Téhéran et, en 2018, il a remporté le prix du meilleur scénario pour Trois visages au Festival de Cannes.
Ce cri pour la Liberté nous oblige collectivement
, ont par ailleurs souligné l'ARP et la SRF, deux collectifs de cinéastes français.
Nous sommes solidaires des Iraniens et Iraniennes qui combattent pour leurs droits, condamnons cette arrestation et appelons à sa libération
, a écrit de son côté le Festival international du film de Berlin sur Twitter.
Le dernier film de Jafar Panahi, Aucun ours, qui, comme la plupart de ses œuvres récentes, le met directement en scène, a été projeté en 2022 à la Mostra de Venise alors qu'il était déjà emprisonné. Le film y a remporté le prix spécial du jury.
Son arrestation en juillet est intervenue après qu'il eut assisté à l'audience au tribunal d'un autre réalisateur, Mohammad Rasoulof, interpellé quelques jours auparavant.
Ce dernier a été libéré de prison le 7 janvier après avoir bénéficié d'une permission de deux semaines pour raisons de santé.
Des milliers d’arrestations
Des personnalités du monde du cinéma figurent parmi les milliers de personnes arrêtées en Iran dans le contexte de la répression des manifestations déclenchées par la mort, en détention, de Mahsa Amini, une jeune Kurde iranienne arrêtée pour avoir prétendument enfreint le code vestimentaire strict imposé aux femmes.
L'actrice Taraneh Alidoosti, qui a diffusé des images d'elle ne portant pas de voile islamique, faisait partie des détenues avant d'être libérée, au début du mois de janvier, après presque trois semaines de détention.
Signe des dangers encourus par les grévistes de la faim, des activistes ont rendu publiques, jeudi, des photos du corps émacié du militant et médecin Farhad Meysami, condamné à cinq ans de prison et qui refuse de s'alimenter.
Cette image douloureuse est un symbole de la lutte non violente du peuple iranien pour obtenir les droits fondamentaux de la personne
, a déclaré Mahmood Amiry Moghaddam, le directeur de l'ONG Iran Human Rights, qui a son siège en Norvège, soulignant que Farhad Meysami était en grève de la faim depuis le mois d'octobre.