Vol de données de Desjardins : un vendeur d’assurance était sur écoute
L’un des suspects, Nicolas Fecteau-Tincau, faisait l’objet d'écoutes électroniques par le Service de police de la Ville de Québec (SPVQ) pour voie de fait grave. Ses conversations auraient dévoilé son intérêt pour les clients de Desjardins.
L’enseigne de Desjardins, à l’extérieur du Complexe du même nom, à Montréal.
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
Depuis le début de l’enquête de la Sûreté du Québec sur la fuite massive de données au Mouvement Desjardins en 2019, une liste d’une vingtaine d’individus et d'entreprises, œuvrant principalement dans le domaine de la finance, sont soupçonnés de s'être partagé les informations personnelles des clients de l’institution financière.
À ce jour, aucun d'entre eux ne fait l'objet d'accusations.
Cependant, des documents rendus publics par le tribunal mercredi à la demande de Radio-Canada et d’autres médias, dévoilent de nouveaux détails sur l’enquête menée par les policiers auprès d’un ex-vendeur d’assurance de personnes, Nicolas Fecteau-Tincau.
En juillet 2019, une sergente-détective de la Sûreté du Québec dans le dossier de vols de données chez Desjardins apprend que Nicolas Fecteau-Tincau fait l’objet d'écoutes électroniques dans le cadre d’un dossier de voies de fait graves dans la région de Québec.
Cette écoute aurait notamment révélé que M. Fecteau-Tincau a eu des discussions au sujet de Desjardins
et qu’il a des échanges avec des sujets (individus) visés dans le projet Portier
, le nom de l’enquête de la SQ sur Desjardins.
L’écoute électronique a permis entre autres de constater que [...] les clients rencontrés par Nicolas Fecteau-Tincau possèdent souvent une assurance-vie chez Desjardins [et qu’il] reçoit les coordonnées de la personne, le montant d’assurance et la prime payée par mois. L’objectif est de vendre de l’assurance à coût moindre que celle déjà détenue par le client
, peut-on lire.
Ces passages se retrouvent notamment dans une dénonciation en vue d'obtenir un mandat de perquisition visant à obtenir, auprès du Mouvement Desjardins, les originaux ou la copie conforme des documents nécessaires à l’enquête policière sur la fuite de données de clients et de membres Desjardins en lien avec l’enquête interne chez Desjardins.
De son côté, le SPVQ a procédé à l’arrestation de M. Fecteau-Tincau en mai 2019 pour voie de fait grave et menace de mort. Ils ont également procédé à la perquisition de sa résidence permettant de saisir divers items, dont un téléphone cellulaire et ordinateur lui appartenant
. Ce dernier a plaidé non coupable à des accusations d’avoir proféré des menaces de mort et d’avoir détruit ou endommagé des biens meubles ou immeubles. Des accusations qui ont par la suite été retirées.
Par ailleurs, Nicolas Fecteau-Tincau s’est vu refuser par l’Autorité des marchés financiers (AMF) en octobre 2022 le renouvellement de son certificat dans la discipline de l’assurance de personnes.
D’autres suspects dans le dossier Desjardins ont également fait l’objet d’interventions de l’AMF depuis trois ans.
C'est une transaction suspecte survenue à Laval en décembre 2018 qui a éveillé les soupçons de Desjardins, qui a porté plainte auprès du Service de police de Laval.
L'enquête de la SQ a commencé en juin 2019. Elle porte sur de possibles infractions de vol d'identité, de trafic de renseignements identificateurs, de fraude de plus de 5000 $ et d'infraction au profit d'une organisation criminelle.
Un ex-employé de Desjardins est soupçonné d’avoir volé les données de millions de clients, mais il ne fait encore face à aucune accusation.
Un règlement à l’amiable de 200 millions de dollars est intervenu en décembre 2021 à la suite d'actions collectives entreprises après la fuite de renseignements personnels qui a touché plus de 9 millions de membres ou clients de Desjardins. Les premiers versements doivent avoir lieu cette année.