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La construction du train léger cause des maux de tête à Orléans

Robert Charbonneau montre une zone des fondations de sa maison.

Robert Charbonneau montre une zone des fondations de sa maison, au sous-sol, où une mince fissure s'étend sur quelques mètres. Ce qui semble une tache d'eau entoure la fissure.

Photo : Radio-Canada / Jean Delisle

Radio-Canada

Fissures dans les fondations de leur maison, présence de rats et nuits sans sommeil : des résidents du quartier d’Orléans estiment que la construction du train léger d’Ottawa a eu de fâcheuses conséquences sur leur vie pendant plus de deux ans.

C'est un véritable supplice, a résumé Amanda Wilkinson.

C’est comme avoir un mauvais voisin, a illustré Sharon Peeler. C’est le stress de ne pas avoir le contrôle sur votre vie.

Plusieurs résidents ont raconté à CBC avoir rencontré une série de problèmes avec les travaux du train léger : présence de rongeurs, articles ménagers qui se brisent à cause des vibrations, obligation de se séparer d’arbres dans leur cour, sans oublier les tremblements et vrombissements quotidiens.

Bien que le bruit des travaux de construction varie tout au long de l’année, les résidents ont mentionné avoir eu du mal à dormir pendant des périodes d’une semaine lorsque de grosses machines et de gros camions se sont mis à creuser, transporter, couler, forer, paver ou niveler pendant la nuit.

Les résidents disent avoir le sentiment que leurs plaintes et réclamations ont été ignorées par l'administration de la Ville.

Jim Watson et Doug Ford tout sourire lors de l'annonce du financement provincial pour le prolongement du train léger.

Le premier ministre Doug Ford s'était engagé à investir 1,2 milliard dans la phase 2 du train léger, le 22 mars 2019. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada

La phase 2 de la construction du train léger, le long du milieu de la route 174 en direction du chemin Trim, a commencé en 2019 et devrait être pratiquement achevée en 2024, pour devenir pleinement opérationnelle en 2025, selon la récente mise à jour de la Municipalité.

Cette dernière affirme que toutes les réclamations pour dommages liés à la construction sont transmises à ses entrepreneurs. Jusqu'à présent, aucune somme n'a été versée à titre de règlement.

Sharon Peeler vit à côté de l'autoroute, près de la future station du train léger de la place d’Orléans. Elle a raconté que ses problèmes ont commencé par une base de toilette qui fuyait. Ensuite, le calfeutrage de sa douche a dû être refait deux fois en quelques mois. Elle a ajouté avoir perdu jusqu’à huit nuits de sommeil, en plus de subir une perte d’audition.

C'est aussi fort que cela. C'est comme si vous dormiez avec un marteau-piqueur.

Sharon Peeler montre l'endroit sous sa toilette à l'étage, où il y a eu une fuite.

Sharon Peeler a peint par-dessus la fuite pour couvrir la tache d'eau.

Photo : Radio-Canada / Jean Delisle

Mme Peeler a voulu montrer à CBC l’étendue de ses tentatives de communication avec le personnel de la Ville d’Ottawa. Elle a saisi sa tablette pour faire défiler une cinquantaine de courriels.

Ils s’en fichent. [Ils ont dit que] ça fait partie de la construction, a-t-elle déploré.

Pour atténuer une partie du bruit, la Ville a approuvé la construction d'écrans acoustiques le long de l'autoroute.

Les ouvriers ont commencé à construire un mur antibruit derrière la propriété de Mme Peeler, en 2021.

Aujourd'hui, de grands poteaux métalliques sortent du sol, mais la Ville indique que l'achèvement de ce mur prend plus de temps que prévu initialement en raison d'un substrat rocheux très dur et d'un accès limité au site.

Elle poursuit en disant que les équipes termineront la construction du mur de soutènement au début de l'année 2023, puis installeront les panneaux du mur antibruit.

Ils continuent à laisser notre mur pour faire d'autres murs. Ils ont toujours eu une excuse, juge Mme Peeler.

Un montage montrant la construction du mur antibruit.

Sur la photo du haut, ces poteaux métalliques deviendront un jour un mur antibruit. En dessous, une photo de la maison de Sharon Peeler, qui se trouve juste à côté du mur antibruit promis.

Photo : Radio-Canada / Jean Delisle

L'année dernière, le personnel de la Ville a transmis les problèmes de Mme Peeler à Kiewit-Eurovia-Vinci (KEV), l'équipe d'entrepreneurs engagée pour prolonger la Ligne de la Confédération jusqu'à Orléans, afin d'entamer un processus de réclamation, ce qui n’a toujours pas été fait.

Fondation fissurée, réclamation rejetée

Robert Charbonneau habite à environ sept maisons du chantier de construction de l’autoroute, près de la station Jeanne d’Arc, toujours en construction.

Il a découvert, au printemps 2021, une fissure dans sa fondation. La réparation lui a coûté 3616 $. Il est l'un des nombreux résidents qui ont fait part à CBC de leurs préoccupations concernant les dommages aux fondations.

M. Charbonneau a montré une fissure le long des fondations de son sous-sol qui semblait s'étendre jusqu'au sol, avec ce qui semblait des taches d'eau autour.

Nous ne pouvions que l'associer à la construction. Nous avions déposé deux plaintes pour de fortes vibrations où la vaisselle, les lits et les meubles [s'entrechoquaient] et nous avions l'impression que ces vibrations étaient trop intenses.

La Ville a également transmis le dossier de M. Charbonneau à KEV, une démarche qu'il conteste. Après un an et demi d'échanges, la compagnie d'assurances de l'entrepreneur lui a envoyé une lettre rejetant sa demande d'indemnisation, en décembre.

Robert Charbonneau brandit une lettre de refus.

Robert Charbonneau a reçu cette lettre en décembre 2022 de la compagnie d'assurances de KEV, selon laquelle elle ne peut pas l'indemniser pour les dommages causés à sa fondation.

Photo : Radio-Canada / Jean Delisle

La compagnie d'assurances de KEV affirme qu'elle ne peut pas l'indemniser pour les dommages causés à sa fondation, car sa maison se trouve en dehors de la zone d'influence de la construction. KEV soutient que les vibrations mesurées au plus près de la maison de M. Charbonneau sont restées en dessous de la tolérance de conception.

Nous sommes plutôt frustrés que personne ne couvre nos arrières, que nous soyons seuls dans cette situation, a déclaré le résident.

Rats et impacts sur la santé mentale

La cour arrière d’Amanda Wilkinson fait face à la construction de la future station Convent Glen. Elle a raconté que des rats couraient dans sa cour et entraient dans sa maison par le garage.

C’est vraiment dégoûtant, a-t-elle dit.

Mme Wilkinson et ses voisins perdent également une partie de leur cour arrière au profit de la Ville. Des marqueurs rouges indiquent à quelle distance la Ville prévoit de déplacer la limite pour des raisons de construction.

Mais pour elle, c’est le bruit perturbant son sommeil qui a le plus affecté sa santé physique et mentale. Elle a dit avoir subi deux opérations chirurgicales majeures, en 2021 et en 2022. Les deux fois, la récupération a été difficile.

Il était presque impossible de dormir, vous savez, la nuit ou pendant la journée. Je suis toujours en manque de sommeil. Ça finit par jouer sur votre santé mentale.

Un pommier de plusieurs décennies planté dans la cour d'un résident d'Orléans.

Ce pommier de plusieurs décennies planté dans la cour d'un résident d'Orléans qui habite près de la route 174 sera déraciné pour faire place à la construction. Le marqueur rouge indique à quelle distance la Ville prévoit de déplacer la cour du propriétaire.

Photo : Radio-Canada / Priscilla Hwang

La construction du mur antibruit derrière sa maison devrait commencer en 2023, selon la Ville. Amanda Wilkinson demande un peu de répit la nuit, alors que la construction se poursuit cette année.

Ce n'est pas nécessaire qu'ils travaillent toute la nuit.

Amanda Wilkinson a envoyé plusieurs courriels à la Ville et à des élus municipaux. Selon elle, ils ne font que se renvoyer la balle.

Un conseiller exhorte les résidents à être persévérants

Les limites des quartiers d’Orléans ont changé lors des dernières élections municipales, en octobre.

La conseillère municipale qui représente maintenant les résidents dans cette histoire est Laura Dudas, d’Orléans-Ouest-Innes. Elle a refusé la demande d’entrevue de CBC.

Auparavant, c’était le conseiller Matthew Luloff qui les représentait. L’élu d’Orléans-Est-Cumberland a répondu que les résidents touchés devraient demander une compensation par le biais d'un processus de réclamation.

Bien qu'aucune demande d'indemnisation n'ait été versée jusqu'à présent, il encourage les gens à continuer à persévérer, car le processus peut prendre un certain temps.

Soyez persévérants, car si votre maison est endommagée à cause de cette construction, vous ne devriez pas avoir à payer de votre poche pour cela, a-t-il déclaré.

Matthew Luloff pendant le conseil.

Matthew Luloff et Laura Dudas ont tour à tour eu à représenter ces résidents. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Jean Delisle

La Ville d’Ottawa a refusé une demande d’entrevue à CBC, laissant tout de même un porte-parole faire une déclaration par courriel. La Municipalité a mentionné avoir reçu 102 demandes d’indemnisation liées au projet de construction de la phase 2 du train léger depuis mars 2019. La majorité de ces demandes concernent des dommages matériels et des véhicules.

Six de ces demandes ont été ouvertes pour une enquête plus approfondie, dont deux qui font l'objet d'une procédure judiciaire, a précisé la Ville. Mais à ce jour, il n'y a pas eu de règlement versé sur ces dossiers, a écrit le porte-parole.

La Ville affirme que toutes les réclamations ont été transmises aux entrepreneurs de la phase 2, à savoir KEV pour le prolongement est-ouest de la ligne et SNC-Lavalin pour le prolongement sud.

KEV a aussi refusé la demande d’entrevue de CBC, mais un représentant a écrit dans un courriel qu'il ne ferait pas de commentaires sur son programme d'assurance robuste, mandaté par le contrat pour les réclamations relatives aux dommages causés par le train léger, car il s'agit de questions juridiques.

CBC a également demandé à la Ville d’Ottawa quelle était son obligation envers les résidents en ce qui concerne les dommages, celle-ci l'a redirigée vers sa page web (Nouvelle fenêtre) qui explique que, lorsque la Ville conclut des contrats avec des entreprises, les accords exigent de ces entrepreneurs qu'ils répondent à toute demande de dommages-intérêts de la part du public.

Les exemptions de bruit permettent de réaliser certains travaux de nuit.

En 2023, les résidents peuvent s'attendre à moins de travaux de nuit que les années précédentes, a cependant mentionné le directeur municipal du programme de construction du train léger, Michael Morgan.

Il a terminé en disant que bien qu'une partie importante de ces travaux puisse avoir lieu pendant la journée, il y aura toujours des travaux de nuit et de week-end sur l'ensemble de l'extension est.

Avec les informations de Priscilla Ki Sun Hwang, de CBC News

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