L’essor des énergies renouvelables n’enchante pas tous les Albertains
Des éoliennes dans le parc Blackspring Ridge, dans le sud de l'Alberta.
Photo : Radio-Canada / Laurence Martin
Chat échaudé craint l'eau froide. Ce proverbe reflète bien l'état d'esprit de certains Albertains devant l'essor des énergies renouvelables dans leur province.
C'est le cas de Jason Schneider, le préfet du comté de Vulcan.
À l'instar de plusieurs dirigeants en zone rurale, M. Schneider se souvient que les municipalités avaient grandement souffert de la chute des prix pétroliers il y a une décennie. De nombreuses entreprises en faillite avaient laissé des milliards de dollars en factures impayées.
À Vulcan, des centaines de puits sans propriétaires s'étendaient à perte de vue. Tous avaient besoin d'être nettoyés. Le montant des taxes municipales dues dépassait les 9 millions de dollars.
Aujourd'hui, M. Schneider ne saute pas de joie lorsqu'il regarde les parcs éoliens ou les panneaux solaires qui se multiplient. Il craint une future crise énergétique et se demande qui paiera pour les pots cassés la prochaine fois.
« Ce sont d'importants développements industriels. Les coûts de remise en état seront substantiels. On voit déjà les signes avant-coureurs, mais nous sommes ignorés. »
Dans toute l'Alberta rurale, les conséquences à long terme de l'essor des énergies renouvelables dans la province soulèvent les inquiétudes.
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Un rythme soutenu
L'Alberta a longtemps dépendu presque uniquement du charbon pour produire son électricité. Aujourd'hui, les installations éoliennes et solaires ont une telle capacité que la province pourrait dépasser son souhait de produire 30 % de son électricité par des sources renouvelables d'ici 2030.
Par exemple, dans le comté de Vulcan, où sont situés le plus grand parc solaire du pays et l'un des plus grands parcs éoliens de l'ouest du Canada, les producteurs d'énergie renouvelable comptent pour plus de 40 % de l'assiette fiscale locale, délogeant les entreprises pétrolières et gazières comme principale source de revenus du gouvernement municipal.
Si d'une part, nombreux sont ceux qui accueillent chaudement ces nouveaux revenus, d'autres lancent déjà un signal d'alarme.
Par exemple, l'Association des municipalités rurales de l'Alberta a récemment adopté une résolution demandant au gouvernement provincial de protéger les contribuables contre les coûts associés au démantèlement des infrastructures d'énergie renouvelable.
Plus précisément, elle souhaite que le gouvernement demande aux promoteurs de payer d'avance pour la future remise en état d'une propriété. De cette façon, les municipalités n'auront pas à payer la facture si une entreprise devient insolvable et ferme ses portes.
« Les Albertains ont bien appris que la façon la moins coûteuse de ne pas payer pour une réhabilitation d'un terrain, c'est de faire faillite. »
En Alberta, il existe une association financée par l'industrie pétrolière qui paie pour démanteler les infrastructures pétrolières et gazières et réhabiliter un terrain.
Toutefois, il n'existe pas d'équivalent pour le secteur des énergies renouvelables. Les entreprises éoliennes et solaires doivent cependant présenter un aperçu sur la manière dont elles comptent remettre en état une propriété avant d'obtenir le feu vert pour leur projet.
Sara Hastings-Simon, une experte de l'Université de Calgary, dit comprendre les inquiétudes des municipalités.
Elle juge pourtant bizarre que l'on souhaite une nouvelle réglementation pour le secteur des énergies renouvelables alors que le problème des puits abandonnés démontre que le système régissant l'énergie pétrolière et gazière a besoin d'une bonne révision.