Ce qu’il faut savoir sur la décriminalisation de drogues dures en Colombie-Britannique

Vancouver bénéficiera d'une exemption du gouvernement fédéral pour décriminaliser, le temps d'un projet pilote de trois ans, la possession simple de certaines quantités de drogues sur son territoire.
Photo : iStock / Onandter_sean
À compter de mardi, la possession de petites quantités de drogues dures ne sera plus considérée comme une infraction criminelle en Colombie-Britannique. Santé Canada a approuvé le projet pilote, le 31 mai dernier, pour une durée de trois ans allant du 31 janvier 2023 au 31 janvier 2026. Ottawa évaluera son efficacité et pourrait ajuster le tir en cours de route.
Mis en place à la demande de Victoria, six ans après la déclaration de l’état d’urgence sanitaire en raison d’une crise des surdoses qui a fait plus de 12 000 morts au cours des dix dernières années, l'initiative vise à réduire les barrières et la stigmatisation qui empêchent les gens d’accéder à l’aide et aux services qui pourraient les sauver
.
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Il n'y a pas de solution miracle pour mettre fin à la crise des surdoses, mais la décriminalisation des personnes qui consomment des drogues est essentielle pour endiguer la vague de la crise des drogues toxiques
, a déclaré la ministre provinciale de la Santé mentale et des Dépendances, Sheila Malcolmson, lors de l’annonce du projet pilote.
Voici six choses à savoir pour mieux comprendre les mesures en place.
Quelles sont les drogues décriminalisées?
Quatre types de drogues font l’objet d’une exemption fédérale :
les opioïdes (tels que l'héroïne, la morphine et le fentanyl);
le crack et la cocaïne en poudre;
la méthamphétamine (méthamphétamine en cristaux)
la MDMA (ecstasy).
Les adultes en possession de moins de 2,5 grammes de ces drogues ne seront donc ni arrêtés ni accusés. Leurs drogues ne seront pas saisies.
Dans un rapport publié cet automne, le service du coroner de la Colombie-Britannique affirmait qu’entre 2019 et 2022, le fentanyl était la drogue illicite la plus identifiée dans les cas de surdose (85,8 %), comparativement à la cocaïne (45 %), aux méthamphétamines (42 %) et à d’autres types d'opioïdes (23 %).
Qui peut posséder des drogues illicites?
L'exemption ne couvre que la possession à des fins personnelles par des adultes, âgés de 18 ans ou plus, en Colombie-Britannique.
Les jeunes de 12 à 17 ans sont toujours assujettis à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents s’ils sont en possession de drogues illicites.
La possession de drogues illicites par des membres des Forces armées canadiennes demeure aussi une infraction criminelle.
Où l’exemption s’applique-t-elle?
L’exemption s'applique sur le territoire de la Colombie-Britannique. Les lois existantes demeurent en vigueur dans les autres provinces et territoires. Il demeurera interdit de posséder des drogues illicites dans les endroits suivants :
les écoles primaires et secondaires;
les garderies;
les aéroports;
à bord des navires et des hélicoptères de la Garde côtière canadienne.
Dans les véhicules, les embarcations ou les transports en commun, les drogues ne doivent pas être facilement accessibles pour le conducteur. Dans le cas où celui-ci est âgé de moins de 18 ans, la possession demeure illégale dans le véhicule ou l’embarcation en question pour tous les passagers.
Pourquoi 2,5 grammes?
Le projet pilote permet la possession cumulative de 2,5 grammes au maximum des drogues illégales ciblées.
En novembre 2021, Victoria avait d’abord demandé un seuil de 4,5 grammes. Ottawa l’a réduit à 2,5 grammes, évoquant la rétroaction des forces policières. Ce seuil est toutefois critiqué par des militants et certains observateurs, le jugeant trop bas et inadapté aux réalités des consommateurs.
Selon la ministre fédérale de la Santé mentale et des Dépendances Carolyn Bennett, il s’agit d’un point de départ
qui pourrait être ajusté en cours de route.
Au lieu d'être arrêtés, les individus appréhendés et respectant ce seuil recevront des renseignements sur les services accessibles et pourront obtenir de l’aide s’ils le veulent.
Qu’en est-il de la vente?
La décriminalisation actuelle ne concerne que la possession. L’importation ou l’exportation, la production ou le trafic, ce qui inclut la vente, demeurent interdits et passibles de peines de prison.
La coroner en chef de la Colombie-Britannique, Lisa Lapointe, doute des retombées de ce projet pilote pour cette raison. Selon elle, la seule façon d’empêcher des consommateurs de mourir dans la rue est d’assurer un accès sécuritaire aux drogues dont les consommateurs ont besoin.
Qu'a fait la province pour se préparer à la décriminalisation?
Le gouvernement de la Colombie-Britannique affirme que la décriminalisation n’est qu’une arme de plus dans sa lutte contre la crise des drogues toxiques.
Victoria dit notamment avoir mis en place un approvisionnement plus sécuritaire par ordonnance et ouvert de nouveaux centres de soins d’urgence et primaires offrant du soutien en matière de santé mentale et de lutte contre les dépendances.
Selon la province, 9000 policiers ont également accès à de la formation et de l'information pour les aider à rediriger les utilisateurs de drogues dures vers des aides appropriées.
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Avec des informations de Dominique Lévesque