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Pérou : le gouvernement ordonne le déblocage des routes par la police et l’armée

Des manifestants autour d'un feu au milieu d'une rue, la nuit

Les autorités ont recensé jeudi 88 barricades sur des routes dans 8 des 25 régions du Pérou.

Photo : Getty Images / AFP/LUCAS AGUAYO

Agence France-Presse

Le gouvernement péruvien a ordonné l'intervention de la police et de l'armée pour dégager, dans les prochaines heures, les dizaines de barrages routiers dressés dans le pays par les manifestants qui réclament la démission de la présidente Dina Boluarte.

La police nationale du Pérou, avec l'appui des forces armées, va effectuer le déblocage des routes du réseau national, ont annoncé jeudi soir les ministères de l'Intérieur et de la Défense dans un communiqué.

Les autorités ont recensé jeudi 88 barricades sur des routes dans 8 des 25 régions du Pérou. Ces barrages entraînent des pénuries de produits de base et de carburants, font grimper les prix et, selon le gouvernement, compliquent l'accès aux soins et l'arrivée des médicaments dans plusieurs zones du pays.

L'autoroute centrale qui relie les Andes et constitue la principale voie d'importation de produits alimentaires vers Lima a notamment été fermée. Des centaines de camions sont bloqués.

Le gouvernement a accusé les barrages d'être directement à l'origine de 10 décès, dont ceux de trois enfants qui n'ont pu, selon lui, recevoir à temps les soins critiques dont ils avaient besoin.

À cette date, 10 Péruviens innocents ont perdu la vie à cause de cet acte illégal, ont dénoncé les deux ministères dans leur communiqué.

Le droit de manifester ne comprend pas le blocage des voies, et peut encore moins prendre le dessus sur le droit à la vie des personnes qui ont besoin d'être transportées pour recevoir des traitements [...] ou qui ont besoin que l'oxygène ou les médicaments arrivent dans leurs régions pour pouvoir continuer à vivre, ont-ils ajouté.

Les manifestations se poursuivent

Les affrontements entre forces de sécurité et manifestants pro-Castillo, qui exigent la démission de Mme Boluarte et des élections immédiates, ont fait au moins 46 morts en six semaines.

Un manifestant fait face à une rangée de policiers.

Un manifestant affronte des policiers à Lima. (Photo d'archives)

Photo : afp via getty images / ERNESTO BENAVIDES

Dina Boluarte, ancienne vice-présidente et colistière de M. Castillo aux élections de 2021 et aux mêmes origines modestes et andines que lui, l'a remplacé conformément à la Constitution. Mais elle est considérée comme une traîtresse par les manifestants.

Cette crise reflète surtout l'énorme fossé entre la capitale et les provinces pauvres, notamment la région andine du Sud, qui soutenaient M. Castillo et voyaient son élection comme une revanche sur ce qu'elles considèrent être le mépris de Lima.

Jeudi dans la capitale, plusieurs centaines de personnes se sont encore rassemblées dans le calme sur la place Dos de Mayo. Nous luttons contre la dictature de Dina Boluarte, a déclaré à l'AFP Eduardo Vazquez, un manifestant, en distribuant aux autres protestataires des rations de cau cau, un plat typique à base de tripes de bœuf.

Des affrontements entre manifestants et policiers ont cependant éclaté dans le centre historique de la capitale. Les uns ont lancé des pierres et des pétards, et les autres ont riposté avec des balles en caoutchouc et de gaz lacrymogènes.

Répression sans précédent

À Juliaca, ville minière de la région de Puno (sud), les proches de victimes des manifestations ont demandé jeudi justice au gouvernement de Dina Boluarte.

Une officière au-devant d'un rang de policiers tient une arme longue.

Une police antiémeute pointe une arme vers les manifestants, à Lima, le 19 janvier 2023. (Photo d'archives)

Photo : Getty Images / Agence France-Presse / Ernesto Benavides

Je ne demande que justice. Je vous demande de nous aider parce que personne ne me rendra mon frère, s'est exclamée, en larmes, María Samillán, sœur du médecin Marco Antonio Samillán, 31 ans, tué par balle lors d'une manifestation à Juliaca.

Dans cette région pauvre du sud des Andes, un affrontement avec les forces de l'ordre lors d'une tentative de prise de contrôle de l'aéroport le 9 janvier a fait 18 morts, dont un policier brûlé vif.

Chaque jour, j'ai l'impression de mourir moi aussi. Je ne peux plus vivre, a déclaré Mme Samillán lors d'une conférence de presse avec le Comité national de coordination des droits de la personne (CNDDHH).

Après avoir présenté un rapport intitulé Cinquante jours de répression au Pérou, violations des droits de l'homme, le coordinateur national des droits de la personne au Pérou a appelé à la fin des violences policières lors des manifestations dans différentes régions.

Nous sommes à des niveaux de répression sans précédent dans la démocratie péruvienne. Il s'agit de 57 personnes tuées depuis que Dina Boluarte a pris ses fonctions, et parmi elles, 46 l'ont été dans des exécutions extrajudiciaires par la police et l'armée, a déclaré à l'AFP l'avocat Mar Pérez.

Les villes de Juliaca et de Puno, à plus de 1350 km au sud de la capitale, ont été le théâtre des manifestations les plus violentes.

L'heure des pénuries

No hay, pas de... : à Cuzco, capitale touristique du Pérou, les pénuries se généralisent du fait de blocages par des manifestants, sept semaines après le début de troubles.

Étalages d'un marchand de fruits

Des étalages peu fournis dans la ville d'Arequipa dans le sud du Pérou. (Photo d'archives)

Photo : afp via getty images / DIEGO RAMOS

Pas d'essence, pas de gaz, pas de départs de la gare routière. Les panneaux ont fleuri en ville. Au marché, il n'y pas d'arrivage de Lima, donc plus de fruits ou presque. Et pas de touristes, ou en tout cas très peu, au grand désespoir des professionnels.

Nichée à 3400 mètres d'altitude, la cité andine est désormais coupée de tout et doit vivre sur ses réserves.

Le Pérou est en proie à une grave crise politique depuis la destitution et l'arrestation le 7 décembre du président socialiste Pedro Castillo, accusé de tentative de coup d'État pour avoir voulu dissoudre le Parlement qui s'apprêtait à le chasser du pouvoir.

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