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À Sainte-Anne, la Villa Youville relève les défis du vieillissement

Bastion de la francophonie à Sainte-Anne, la Villa Youville fait face à de nombreux défis.

La Villa Youville en hiver.

La Villa Youville a été créée en 1964 par des francophones de Sainte-Anne pour répondre aux besoins des aînés à faible revenu.

Photo : Radio-Canada / Mathilde Gautier

Située au cœur du village de Sainte-Anne, au Manitoba, la Villa Youville a été créée en 1964 par le père Montpetit et des Soeurs grises afin de répondre aux besoins des aînés francophones à faible revenu dans la région.

L’établissement à but non lucratif s’est ensuite développé jusque dans les années 1990. Il dispose de trois bâtiments, appelés motels, constitués de 108 appartements pour résidents indépendants et semi-indépendants.

Il offre aussi 66 logements faisant partie du nursing pour des résidents ayant besoin de soins de longue durée.

Pour pouvoir en bénéficier, il faut être un aîné, ne pas gagner plus de 53 000 $ par an et vouloir recevoir des soins en français.

Deux mannequins qui représentent des religieuses dans une vitrine. Derrière, un long couloir.

La Villa Youville est restée très proche de la religion catholique depuis son ouverture officielle en 1965.

Photo : Radio-Canada / Mathilde Gautier

La Villa Youville se présente comme un organisme francophone unique en son genre au Manitoba, qui propose différents types de résidence à différentes étapes de la vieillesse.

Pour les aînés qui se sont rendus à un passage de la vie où il y a beaucoup d'inconnues, beaucoup de questions, on permet un passage plus clair vers la fin de leurs jours, explique le directeur général de la Villa Youville, Yann Boissonneault.

Le plus grand atout de la Villa Youville, c'est que tous les services aux aînés se trouvent sous le même toit, ce qui facilite la vie des résidents.

Une tablée de personnes qui rient.

La Villa a un budget de 27 000 $ pour des repas communautaires. Les bénéficiaires ont droit à un repas et demi par jour.

Photo : Radio-Canada / Mathilde Gautier

Souvent, d’ailleurs, des personnes nées à Sainte-Anne et ayant vécu à Winnipeg reviennent au village pour y finir leur vie.

« C’est notre force d’avoir tout sous un même toit, dans un esprit familial, d'accueil chaleureux, francophone. »

— Une citation de  Yann Boissonneault, directeur général de la Villa Youville

Je suis née ici, je suis allée à l'école ici et, par la suite, j'ai déménagé. Puis, je ne pensais pas revenir. On a vécu 22 ans en ville dans un condo. Puis, la santé a laissé à désirer. Alors on est allé visiter plusieurs endroits et on a trouvé que c’était ici le mieux. Mon mari est au nursing, puis c'est plus facile, c'est dans le même bâtiment, confie une des résidentes, Élizabeth Fillion.

La Villa Youville, un des bastions de la francophonie au Manitoba

Pour le directeur général, il est essentiel de pouvoir vieillir dans sa langue maternelle.

Au Manitoba, on a une forte population francophone, surtout au sud-est, à Sainte-Anne, Lorette. C'est important pour eux de pouvoir demeurer dans leur communauté et de pouvoir recevoir des soins en français, explique Yann Boissonneault, qui constate par ailleurs une diminution de la population francophone.

On reconnaît que la population francophone diminue et il y a aussi beaucoup plus de familles exogames, alors on les accueille aussi. Mais on ne deviendra pas un établissement anglophone, affirme Yann Boissonneault.

« Cela fait 60 ans que la Villa Youville est là et qu’on prend soin en français de nos oncles, de nos tantes, les grands-parents, nos amis. Ce sont aussi 3 à 4 générations qui ont travaillé ici. Ma mère a travaillé ici, puis maintenant, elle vit ici. »

— Une citation de  Yann Boissonneault, directeur général de la Villa Youville

Il s’agit là d’ailleurs d’un point de friction avec la communauté anglophone, qui critique le fait que les services sont en français.

Mon petit discours pour tous les anglophones qui veulent venir vivre ici parce qu’ils ont leur épouse francophone à la Villa, c'est qu’ils veulent venir vivre ici parce qu’ils célèbrent la culture francophone et la langue française, explique Yann Boissonneault.

Homme souriant.

Yann Boissonneault est le directeur de la Villa Youville depuis juillet 2022.

Photo : Radio-Canada / Mathilde Gautier

Il souhaite que le français reste la langue majoritaire à la Villa Youville, même si les messages importants sont traduits en anglais.

Quand je leur dis ça [aux anglophones], ils se sentent insultés, car c'est leur Villa. Mais je leur rappelle que c'est un petit groupe de francophones qui ont vu il y a longtemps les besoins et se sont organisés pour y répondre, poursuit-il.

Des partenariats pour former du personnel en français

Yann Boissonneault estime que les francophones se distinguent aussi par leur capacité à innover.

Maintenant que je suis dans mon petit cercle de directeurs généraux francophones, je vois qu'on est plus fonceurs. Et puis, on se questionne davantage, constate Yann Boissonneault.

On a tellement travaillé fort pour tout ce qu'on a acquis en tant que francophones (...) On est un petit groupe, on parle fort, mais c'est pour les bonnes raisons. Et puis, souvent, on est porteurs de bonnes solutions novatrices, soutient-il.

Afin de perpétuer la francophonie à la Villa Youville, Yann Boissonneault a mis en place une nouvelle stratégie pour le recrutement du personnel francophone.

La Villa Youville a maintenant des partenariats avec l'Université de Saint-Boniface, la Division scolaire franco-manitobaine et la Division scolaire Rivière Seine.

L’objectif de ces partenariats est de devenir une académie d’éducation en santé au rural. Les cours seront dispensés à la Villa Youville par l’Université de Saint-Boniface, avec les résidents.

Yann Boissonneault espère que certains étudiants voudront poursuivre leur carrière à la Villa Youville à l’issue de cette formation. Pour nous, c'est une façon d'assurer la succession difficile d'employés en soins de santé francophones, affirme-t-il.

Des problèmes de sécurité liés à la vétusté de l’infrastructure

La Villa Youville fait face à d'autres défis, notamment l'âge de ses infrastructures.

Le premier motel, qui date de 60 ans, a des problèmes de fondation. Ses logements sont trop petits pour les résidents qui ont des besoins différents.

Des tuyaux au sol et des ballons d'eau.

La Villa Youville a fait face à de nombreuses urgences ces derniers mois, dont un problème d'approvisionnement en eau chaude. Des citernes d'eau ont été installées en urgence dans le salon de coiffure.

Photo : Radio-Canada / Mathilde Gautier

La Villa Youville doit donc remplacer le bâtiment et trouver 24 logements abordables pour placer les résidents actuels, qui paient en moyenne un loyer de 400 $ par mois.

Outre ce défi, les motels n’ont pas de système de gicleurs, de protection contre l'incendie, alors que ces bâtiments sont en bois et que des résidents ont des problèmes cognitifs, notamment de mémoire. Cela pourrait conduire à de graves incidents domestiques.

Enfin, l’ascenseur du Motel 3 date de 30 ans et doit être remplacé.

Mais, que faire avec 24 résidents qui vont perdre leur logement et les 20 autres qui n’auront pas accès à leur appartement, faute d’ascenseur?

Yann Boissonneault cherche des solutions pour répondre à ce défi. Il rêve, entre autres, à la construction d'un cinquième nouveau bâtiment de 40 logements multi-usages qui répondrait aux besoins temporaires de déménagement des résidents.

Un des ascenseurs se rattacherait au Motel 3 pour créer un deuxième ascenseur. Donc, il n’y aurait pas besoin de trouver un espace pour 20 résidents, explique Yann Boissonneault.

Cécile Danylchuk-Jolicoeur est assise dans sa chambre.

Les plus petits logements de la Villa Youville sont constitués d'une seule pièce. Il s'agit d'un des trois motels qui nécessitent des travaux de rénovation et d'agrandissement. Cécile Danylchuk-Jolicoeur habite dans l'un de ces logements, qu'elle trouve trop petit pour pouvoir accueillir sa famille qui vient lui rendre visite.

Photo : Radio-Canada / Mathilde Gautier

Ces nouveaux logements permettront de répondre à la demande croissante, notamment avec l’arrivée de la génération des baby-boomers.

20 millions de dollars recherchés pour la Villa Youville

Yann Boissonneault travaille sur une étude de faisabilité qui permettra d'amasser entre 20 et 30 millions de dollars pour réaliser des travaux d’envergure.

Le plus grand défi de la Villa Youville est en réalité d’ordre administratif.

En ce moment, nous sommes en train de faire une recherche des programmes avec le gouvernement fédéral, en particulier pour l'offre de logements, précise Yann Boissonneault.

Je travaille également avec une compagnie de construction locale pour accéder aux fonds parce qu'il y a des fonds pour le genre de logements qu'on veut développer, des logements abordables pour personnes vulnérables au rural, poursuit-il.

Yann Boissonneault espère avoir le soutien de la communauté dans la réalisation de l'étude de faisabilité préalable au financement des travaux.

On voit une volonté des gouvernements pour répondre aux défis de santé et de logement. Mais les programmes sont très difficiles à naviguer et dispendieux pour ceux qui n'ont pas les fonds nécessaires pour avancer une étude de faisabilité. Il y a trop d'obstacles pour les organismes à but non lucratif, déplore-t-il.

Il faut limiter les obstacles parce qu’il y a plein de fonds, il y a des enveloppes d'argent qui ne sont pas dépensées à cause de la difficulté à y accéder, conclut Yann Boissonneault.

Ce reportage est publié dans le cadre d’un partenariat avec des bibliothèques de plusieurs villages francophones au Manitoba. Nos journalistes seront dans diverses bibliothèques entre janvier et mars et animeront, entre autres, des ateliers. N’hésitez pas à les saluer!

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