Le propriétaire des foyers de soins fermés de force est visé par plusieurs poursuites
Le ministère du Développement social a annoncé cette semaine la révocation des permis d’exploitation de la Villa Neguac et du Foyer Saint-Bernard.

En 2014, Amarjeet Jatana a rencontré des politiciens lors du lancement de son entreprise à l'Île-du-Prince-Édouard. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / CBC
Le propriétaire des deux foyers de Neguac fermés de force par le gouvernement, Amarjeet Singh Jatana, est visé par plusieurs poursuites au civil. Des anciens partenaires d’affaires, des consultants et même le gouvernement du Nouveau-Brunswick lui réclament des centaines de milliers de dollars.
Le ministère du Développement social du Nouveau-Brunswick a annoncé mardi la révocation des permis d’exploitation de la Villa Neguac et du Foyer Saint-Bernard.
Il a donné très peu de détails sur ce qui l’a poussé à adopter cette mesure de dernier recours
, mais a indiqué que ces foyers de soins spéciaux faisaient face à des défis liés au fonctionnement
.
Des préposées aux soins de la Villa Neguac allèguent que l’établissement était sans direction depuis l’automne dernier et qu’elles devaient gérer les opérations elles-mêmes.
Selon des documents juridiques obtenus par Radio-Canada Acadie, le propriétaire des deux foyers, Amarjeet Singh Jatana, n’en est pas à ses premiers déboires. Il est en effet visé par plusieurs poursuites judiciaires.
Deux jugements par défaut à l’Île-du-Prince-Édouard
En 2016, un investisseur a déposé une poursuite au civil à l’Île-du-Prince-Édouard contre la société Canadian National Producers, Amarjeet Singh Jatana et Germant Grewal.
Le plaignant, Rajeev Chauhan, allègue qu’il a versé 100 000 $ aux deux entrepreneurs afin de développer et d’opérer un verger de pommes sur un terrain de 10 acres à l’Île-du-Prince-Édouard.
Il allègue que l'argent n'a pas été utilisé aux fins prévues et qu’il n’a pas réussi à obtenir de remboursement.
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M. Singh et M. Grewal n’ont pas présenté de défense dans cette affaire. Un jugement par défaut a été rendu contre eux en juillet 2017. Le tribunal leur a ordonné de verser 101 162 $ au plaignant.
Germant Grewal a porté ce jugement en appel et a été débouté le 11 mai 2022 en Cour suprême de l’Île-du-Prince-Édouard.
Trois investisseurs poursuivent une entreprise d'Amarjeet Singh Jatana
À la fin de 2021 et au début de 2022, trois sociétés à numéro néo-brunswickoises — détenues par des personnes du Grand Moncton — ont intenté des poursuites en Cour du Banc du Roi contre Canadian National Growers, une entreprise d’Amarjeet Singh Jatana.
Les plaignants allèguent tous qu’ils ont conclu une entente avec cette société en décembre 2019 afin qu'elle développe et opère des vergers de pommiers sur des terrains situés à Sainte-Anne-de-Kent.
Ils disent lui avoir versé de 225 000 $ à 250 000 $ chacun en échange de retours garantis sur leur investissement.
Ils allèguent qu’ils ont seulement reçu 15 000 $, alors qu’ils attendaient des versements de 40 000 $ en 2020 et de 80 000 $ en 2021. Ils réclament un remboursement de leur investissement.
Dans des documents déposés en Cour du Banc du Roi, Amarjeet Singh Jatana conteste la version des faits des plaignants. Il reconnaît qu’il leur a vendu des terrains et qu’il s’est entendu avec les propriétaires de ces sociétés à numéro pour développer et opérer des vergers de pommes. Il dit que c’est ce qu’il a fait pendant trois ans.
M. Jatana se défend en affirmant que la sécheresse de l’été 2020, la pandémie, la pénurie de main-d'œuvre et d’autres facteurs ont eu un impact sur les vergers. Il accuse aussi les plaignants de ne pas avoir acheté d'assurance-récolte.
Allégations de 72 000 $ en salaires, honoraires et commissions impayés
Une firme d’experts-conseils de Moncton, NuFocus, a elle aussi intenté des démarches devant les tribunaux. Elle a déposé deux requêtes — factures à l’appui — en Cour des petites créances en novembre 2022.
Elle allègue qu’elle a fourni des conseils à M. Jatana pour une valeur de 52 130 $ et qu’elle n’a pas été payée pour ces services. NuFocus demande la somme maximale permise par la Cour des petites créances, soit 20 000 $ par réclamation, pour un total de 40 000 $.
De plus, on apprend dans un autre document que Canadian National Growers devrait de l’argent à un autre ancien collaborateur. Il s’agit de Neil Boucher, ancien vice-recteur de l’Université de Moncton.
Un certificat signé par une haute fonctionnaire a été déposé en Cour du Banc de la Reine en novembre 2022 en vertu de la Loi sur les normes d’emploi. Il a aussi été déposé dans le registre foncier du Nouveau-Brunswick.
On peut y lire que cette fonctionnaire sait ou a des raisons de croire que l’employeur [Canadian National Growers, NDLR ] est insolvable ou qu’il est sur le point d’être insolvable
et que la somme de 22 854 $ semble être due à Neil Boucher.
Un virement accidentel de 21 679 $ qui n’aurait pas été remboursé
Le dossier le plus récent sort tout à fait du lot et implique le gouvernement du Nouveau-Brunswick. C’est ce que l’on apprend dans des documents déposés en Cour des petites créances le 22 décembre 2022.
Dans une demande, la Société d’inclusion économique et sociale (une société de la Couronne) allègue qu’en août 2021, elle a demandé à Service Nouveau-Brunswick de faire un virement de 21 679$ à la CBDC Chaleur.
Le virement aurait été effectué par erreur à Chaleur College Inc., une entreprise qui était détenue à l’époque par Amarjeet Singh Jatana (qui a été dissoute depuis et qui porte aujourd’hui le nom de Canadian National Institute of Learning).
La Société d’inclusion économique et sociale allègue qu’elle a tenté de récupérer son argent, sans succès.
Service Nouveau-Brunswick et la Société d’Inclusion économique et sociale demandent donc à la Cour des petites créances d’ordonner à Amarjeet Singh Jatana et à Chaleur College Inc. de lui verser 20 000 $ (soit le maximum qui peut être accordé par ce tribunal).
Radio-Canada Acadie a tenté d’obtenir une entrevue avec Amarjeet Singh Jatana, sans succès. Il n’a pas encore présenté de défense dans le cadre des démarches intentées en Cour des petites créances.