Le castor, animal emblématique devenu nuisible
Symbole national du pays, le castor cause bien des maux de tête aux citoyens et aussi à des gestionnaires de voirie publique. Si ce petit animal à fourrure cause parfois d'importants dégâts, des chercheurs explorent de nouvelles avenues pour atténuer les impacts de sa présence dans nos cours d’eau.

Un castor passe beaucoup de temps à ronger du bois.
Photo : Shutterstock
Au début du 20e siècle, un trappeur pouvait obtenir une quinzaine de dollars pour une peau de castor, ce qui équivaut à près de 400 $ aujourd’hui! De nos jours, la fourrure de ce rongeur rapporte aussi peu que 15 $ à 25 $, selon la taille de la bête.
Il ne se prend presque plus de castors, comparé à ce qui se prenait quand l'industrie de la fourrure était plus prospère
, explique Pierre-Yves Collin, trappeur professionnel depuis plus de 40 ans.
La population de castors a donc bondi. Elle serait 10 fois plus importante qu’à l’époque de la Nouvelle-France. Une augmentation stimulée également par l’activité humaine, comme la surexploitation forestière qui a laissé la place aux jeunes feuillus, nourriture idéale du castor.
C’est ce qui explique qu’aujourd’hui ce grand rongeur peut devenir indésirable. Ses barrages peuvent parfois créer des inondations dans les champs de culture ou aux abords d'infrastructures routières.
Si on n’était pas intervenus aujourd’hui, le niveau d’eau aurait fini par atteindre la chaussée
, explique Pierre-Yves Collin. Lui et son collègue Jean-Marc Couture ont été mandatés par le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) et la MRC pour capturer deux castors qui ont construit sept barrages dans un cours d’eau qui traverse un champ de maïs et aussi un ponceau sous une emprise d’autoroute à Lévis.
Si le castor construit tous ces barrages en travers d’un cours d’eau, c'est pour créer un étang qui le protège de ses prédateurs. Ces amoncellements de branches lui servent aussi de garde-manger pour y accumuler ses provisions.
« Si on les laisse faire, je ne pourrai pas cultiver ici l’an prochain! »
Pour capturer les castors, les trappeurs ont utilisé des pièges mortels. Ces pièges en X les tuent instantanément
, explique le trappeur Pierre-Yves Collin. On ne peut pas relocaliser un castor. Il est trop territorial. Si on l'amenait ailleurs et qu’il y a d'autres castors à proximité, ils vont se mutiler. Ils vont tellement se battre qu'ils vont s'infliger des blessures, souvent mortelles. On capture donc ceux qui sont vraiment nuisibles.
Les trappeurs doivent tout de même s’assurer que chaque castor abattu soit récupéré pour la mise en valeur de sa peau et de sa chair. La fourrure, oui, elle vaut moins cher qu'avant, mais on la récupère. Les glandes vont être vendues, la peau va être vendue, on connaît des personnes qui aiment la chair de castor, qui vont la consommer.
« On ne va pas régler le problème uniquement par la capture ou le démantèlement de barrages. »
Gaétan Fournier a été durant plusieurs années responsable de la gestion du castor sur le territoire de la réserve faunique des Laurentides, pour le compte de la Société des établissements de plein air du Québec (Sépaq). Capturer le castor et démanteler ses barrages sont [des mesures] efficaces à court terme, mais ce ne sont pas des solutions durables
, prévient-il.
Dans la réserve faunique des Laurentides, nous avons mis en place des systèmes de prébarrage, qui visent à inciter le castor à construire son barrage sur cette structure. Nous avons pu démontrer qu’il est effectivement possible de cohabiter avec la colonie de castors, tout en s’assurant de maintenir l’écoulement de l’eau, et ainsi éviter d’inonder la route ou d'abîmer l’infrastructure routière en place.
Le principal défi de ces mesures préventives, c’est de favoriser la cohabitation avec le castor en diminuant les coûts et les irritants que sa présence peut entraîner.
Le castor est le seul animal à créer son propre habitat
, rappelle Gaétan Fournier. En plus, un étang de castor contribue de façon significative à accroître la biodiversité du milieu environnant.
Le reportage de Claude Labbé et de Michel Sylvestre est diffusé à l'émission La semaine verte ce samedi à 17 h et dimanche à 12 h 30 sur ICI TÉLÉ. À ICI RDI, ce sera dimanche à 20 h.