12 actions « majeures » pour lutter contre la pénurie de logements à Rimouski
Crédits de taxes foncières, assouplissements aux règles de zonage, rédaction d’une politique d’habitation… La Ville de Rimouski met les bouchées doubles pour accélérer la mise en chantier d’unités résidentielles.

En 2021, le taux d'inoccupation des logements s'élevait à 0,2 % à Rimouski, soit le quatrième parmi les taux d'innoccupation les plus bas au Québec. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / François Gagnon
C’était une annonce très attendue. Le maire de Rimouski, Guy Caron, a présenté jeudi soir le plan de lutte contre la pénurie de logements de la Ville. Il en a exposé les grandes lignes à l’occasion du souper du maire annuel, organisé par la Chambre de commerce et de l'industrie Rimouski-Neigette.
Le plan s’articule en 12 actions fiscales, budgétaires et réglementaires que Rimouski désire mettre en application dès cette année. L'objectif : stimuler les mises en chantier d’unités résidentielles. Il en faudrait plus de 2000 pour atteindre un équilibre sur le marché locatif dans les prochaines années, selon la Ville.
Certaines de ces unités sont sur le point de sortir de terre, mais bien souvent l’inflation ou la situation financière des promoteurs ralentissent leur progression.
Aux prises avec un taux d'inoccupation des logements de 0,2 % en 2021, Rimouski a vu son nombre de mises en chantier chuter en 10 ans, notamment en raison de la hausse des coûts des matériaux de construction.
Le rôle de la Ville, c’est de donner un message fort [aux promoteurs] qu’on va être avec [eux], qu’on va [leur] donner les bons incitatifs, qu’on va [les] aider à avoir plus de sécurité économique pour aborder les projets
, a fait valoir le maire Guy Caron.

Le maire de Rimouski, Guy Caron, souhaite attirer de nouvelles mises en chantier dans les prochaines années.
Photo : Radio-Canada / Jean-Luc Blanchet
Le plan en 12 points va répondre à plusieurs de ces interrogations, ajouter cet élément de sécurité et donner des incitatifs viables pour que l’on puisse se sortir de cette crise le plus vite possible.
Incitatifs fiscaux pour accélérer les premières pelletées de terre
Dans le but précis d’attirer de nouveaux promoteurs, refroidis par la conjoncture économique, Rimouski prévoit alléger leur fardeau fiscal sur plusieurs années. Une grande part de ce plan est consacrée à la construction de logements sociaux et abordables, qui se fait attendre dans la métropole bas-laurentienne.
Nombres d’unités locatives sociales et abordables en préparation
Projets | Organismes | Nombre d'unités |
---|---|---|
Notre-Dame-du-Saint-Rosaire (Phase I) | Serviloge | 44 |
Notre-Dame-du-Saint-Rosaire (Phase II) | Serviloge | 47 |
Jardins du Village Brisson | Office d'habitation Rimouski-Neigette | 63 |
Résidences aînés Alcide-C.-Horth | Logeri Inc. | 45 |
Résidence communautaire Sainte-Blandine | Habitations populaires de l'Est | 20 |
L’administration Caron compte prolonger le crédit de taxes foncières pour les projets de logements sociaux ou abordables de plus de 20 unités, pour que celui-ci passe de 5 à 35 ans, sous forme d’appui automatique
. Ce crédit équivaudra à la valeur de la contribution municipale exigée par la Société d’habitation du Québec (SHQ).

Le plan détaille 12 actions réglementaires, budgétaires et fiscales que la Ville de Rimouski compte mettre en œuvre pour accélérer la mise en chantier d'unités résidentielles.
Photo : Radio-Canada / Jean-Luc Blanchet
Des crédits modulés de taxes foncières sont aussi au menu, cette fois pour stimuler la construction d’habitations multifamiliales de plus de huit unités. Le crédit sera plafonné à 1500 $ par année par unité, et à 150 000 $ par projet.
Déclinaison des crédits de taxes foncières pour les habitations multifamiliales de plus de huit unités
- An 1 : 100 %
- An 2 : 100 %
- An 3 : 75 %
- An 4 : 50 %
- An 5 : 25 %
Source : Ville de Rimouski
Ce sont donc des revenus dont la Ville accepte de se départir pour offrir des incitatifs fiscaux aux promoteurs immobiliers. En 2023, Rimouski pourrait dépenser jusqu’à 1 090 000 $ en crédits de taxes foncières, soit 1 % de son budget.
La plupart de ces incitatifs fiscaux devraient voir le jour plus tard cette année.
Réglementation municipale en voie d’être assouplie
La Ville mise également sur des unités résidentielles plus compactes, comme les minimaisons, pour bonifier l’offre sur le marché. Rimouski entend en effet emboîter le pas à d’autres villes québécoises qui modifient leurs règlements de zonage pour permettre la construction d’unités d’habitations accessoires (UHA).
Concrètement, les normes de lotissement seraient assouplies pour faciliter la construction de ces unités additionnelles, notamment en réduisant la superficie requise pour une unité d’habitation. On permet d’avoir, pour le même terrain, une densité résidentielle de plus grande importance
, souligne le directeur du Service urbanisme, permis et inspection à la Ville de Rimouski, Jean-Phillip Murray.
Dans les prochains mois, la Ville prévoit d’ailleurs cibler un terrain sur son territoire pour y développer un quartier de minimaisons. Elle dit vouloir s’inspirer du Petit Quartier de Sherbrooke, un projet de 73 habitations.

Une maquette du projet de Petit Quartier de Sherbrooke. (Photos d'archives)
Photo : A³DESIGN
Dans la même lignée, Rimouski entend se prévaloir de son droit de préemption au cours des prochains mois afin d’identifier des zones qui pourraient accueillir des projets de logements sociaux et abordables. Des secteurs situés au centre-ville seront privilégiés, toujours dans une logique de densification résidentielle.
Même si elle juge que les résidences touristiques de type Airbnb ont un impact faible
sur la pénurie de logements à Rimouski, la Ville entend en encadrer l'usage.
Plus précisément, Rimouski aura à l'œil les résidences secondaires converties en résidences touristiques à l’extérieur du zonage prévu à cet effet, ce qui constitue une infraction.
L’administration municipale veut explorer la mise sur pied d’un registre des établissements de résidences principales et secondaires, et transmettre au gouvernement du Québec les cas de fraude potentiels.
Enfin, la Ville prévoit se doter d’une politique d’habitation pour dicter les possibilités et les interdictions sur le territoire en matière d’habitation et de développement. Elle compte embaucher un chargé de projet en 2024 pour rédiger une telle politique.
Entre-temps, Rimouski révisera son plan d’urbanisme pour mettre en œuvre la plupart de ses engagements en matière de logement.
Nouveau quartier dans la Cité des achats
Par ailleurs, Guy Caron dévoilait être en contact avec le propriétaire principal de la Cité des achats, SmartCentres, pour y développer des projets résidentiels. La Ville voit un potentiel de mixité résidentielle et commerciale pour le secteur. Des projets similaires sont sortis de terre à Laval et Mascouche.
Plusieurs facteurs géographiques encouragent Rimouski à envisager cette option, comme la proximité de la Cité des achats avec d’importants axes routiers, l’Université du Québec à Rimouski (UQAR) et certains commerces, dont des épiceries.
En plus de verdir les environs, la Ville voit en ce projet l’occasion d’éliminer une portion de cet îlot de chaleur
. Elle se donne trois ans pour compléter le projet.
Cette possibilité est toutefois tributaire de modifications à apporter au schéma d’aménagement de la MRC de Rimouski-Neigette. Celui-ci doit par la suite être approuvé par le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH).
Malgré ce plan somme toute de nature municipale, le conseil municipal demande tout de même l’aide du gouvernement provincial pour concrétiser son plan. Il va notamment adopter une résolution pour enjoindre le MAMH à réduire le taux de taxation des immeubles de plus de six logements et à bonifier les enveloppes destinées au logement social.
Le plan de lutte contre la pénurie de logements pourrait bien évoluer, de l'aveu du maire de Rimouski. On n'a pas les moyens, dans la situation actuelle, de se priver d'options
, lance Guy Caron, qui souhaite du même souffle que la Ville devienne un chef de file
pour faciliter la construction de logements.