Des chercheurs albertains explorent des façons de manufacturer des vêtements antivirus

Patricia Dolez, qui dirige l'équipe de recherche sur le projet, assure qu'elle et ses collègues travaillent d'arrache-pied pour que la fabrication à grande échelle de vêtements autodécontaminants puisse se faire le plus rapidement possible.
Photo : Université de l'Alberta/John Ulan
Le procédé chimique qui permet de mettre au point un vêtement autodécontaminant existe déjà. Des chercheurs de l’Université de l’Alberta travaillent à tester la même solution chimique pour fabriquer à grande échelle des blouses médicales, des uniformes militaires, mais aussi des vêtements antivirus pour le grand public.
L’équipe de recherche est composée de la chercheuse principale Patricia Dolez, professeure au département d’écologie humaine, et de ses collègues James Harynuk et Jane Batcheller.
Nous voulons prendre la technologie du laboratoire et la mettre à l'échelle afin qu'elle soit efficace et compatible avec les processus de fabrication de l'industrie [textile]
, explique Patricia Dolez dans un communiqué de l’Université de l’Alberta.
En entrevue à l’émission La Croisée de Radio-Canada, la chercheuse souligne que le procédé en lui-même existe déjà depuis assez longtemps, car c’est le même qui est utilisé pour désinfecter les piscines.
Pour écouter l'entrevue de La Croisée :
Créer des vêtements antivirus pour les travailleurs de première ligne
Les produits utilisés appartiennent à une famille de polymères qui ont la particularité d'être composés d’un atome d’azote et d’un atome d’hydrogène, indique-t-elle.
Lorsque ces polymères sont mis en contact avec, par exemple, de l’eau de javel, ou quelque chose qui contient une source d'halogène (le chlore, par exemple), le lien chimique azote-hydrogène est remplacé par un lien azote-chlore, explique la chercheuse. Et c’est ce qui agit pour décontaminer les vêtements ayant été en contact avec des agents infectieux, souligne la chercheuse.
Quant à l’efficacité, Patricia Dolez dit qu’il y aura peut-être des virus ou bactéries qui vont survivre, mais relève qu’il s’agit là du biocide (procédé antibactérien) le plus efficace et dont l’action est la plus rapide.
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Cette solution pourrait s'appliquer à tout type de vêtements de protection, même les masques faciaux, ce qui donne un moyen supplémentaire d'aider les premiers répondants à rester en bonne santé et en sécurité
, note Patricia Dolez dans le communiqué de l’Université.
Selon elle, le secteur médical est une cible d’autant plus importante qu’environ 8000 personnes meurent chaque année au Canada à la suite d’infections nosocomiales, c'est-à-dire des infections contractées à l’hôpital.
Pour répondre aux besoins des premiers répondants (travailleurs hospitaliers et ambulanciers paramédicaux entre autres), les chercheurs se sont associés à Logistik Unicorp Inc., une entreprise canadienne qui gère les chaînes d'approvisionnement pour une gamme d'entreprises et de gouvernements du monde entier qui utilisent des vêtements de protection.
Selon Mme Dolez, la technologie est tout aussi importante pour les militaires, notamment ceux en mission. Le projet est d’ailleurs financé à hauteur d’un million de dollars par le programme Innovation pour la défense, l'excellence et la sécurité (IDEeS) du ministère de la Défense nationale.
Solution soucieuse de l’environnement
Par ailleurs, selon Patricia Dolez, il s’agit aussi d’une solution à faible impact environnemental.
Un des gros avantages de cette solution est que, une fois que le tissu est utilisé et qu’il aura consommé ses atomes de chlore qui lui permettent de désactiver les bactéries, on peut le remettre par exemple dans de l’eau de javel, pour recharger les liens [chimiques azote-chlore]
, explique-t-elle.
Et lorsque ce vêtement arrivera en fin de vie, il n’aura pas de risque d’affecter l’environnement, car le principe actif ne sera plus actif.
Il n’y a pas encore de date quant à la mise en œuvre du procédé à l’échelle manufacturière, mais Patricia Dolez assure que l’équipe travaille fort pour faire avancer les choses le plus rapidement possible
.
Avec les informations de l'émission La Croisée