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À la recherche d’assureurs pour les maisons patrimoniales

Au Québec, les propriétaires de maisons anciennes ont du mal à vendre leur propriété parce que, trop souvent, les assureurs refusent de couvrir les acheteurs potentiels. S’ils acceptent de les assurer, la prime d’assurance peut parfois être multipliée par trois. Une réelle menace pour le patrimoine immobilier.

La maison d'André Tanguay en pierres avec ses deux portes rouges et ses nombreuses fenêtres et lucarnes.

La maison patrimoniale d'André Tanguay est située à Donnacona, dans l'ancien village Les Écureuils.

Photo : Radio-Canada / Martin Brunette

Depuis plus de 40 ans, André Tanguay possède une maison patrimoniale construite entre 1725 et 1730 sur le Chemin du Roy, à Donnacona. Une maison qui a même servi de relais de poste à ses débuts, où se faisait le changement de monture.

Ayant d’autres projets en tête, il veut vendre depuis l’été 2021 sa propriété inscrite dans le répertoire du patrimoine bâti de la MRC de Portneuf. De nombreuses visites ont été effectuées, mais rien ne s’est concrétisé jusqu’ici.

André Tanguay devant sa maison en pierres construite vers 1730.

André Tanguay veut vendre sa maison patrimoniale construite vers 1730.

Photo : Radio-Canada

Un couple voulait me faire une offre d’achat et ils se sont informés pour assurer la maison. Ils n'ont trouvé aucune compagnie qui voulait les assurer, dû au fait que la maison avait le titre patrimonial.

Une citation de André Tanguay

André Lemieux a lui aussi acheté une maison patrimoniale dans les années 1980, à Limoilou, au cœur de la ville de Québec. Elle fait partie des 350 maisons du genre classées par le ministère de la Culture et des Communications. En décembre 2021, il a accepté l’offre d’un acheteur, mais la vente n’a pu être réalisée, encore une fois à cause des assureurs.

André Lemieux est devant sa jolie maison patrimoniale en briques jaunes avec de nombreuses fenêtres et lucarnes.

André Lemieux devant sa maison patrimoniale du quartier Limoilou, en plein cœur de la ville de Québec.

Photo : Radio-Canada / Martin Brunette

Quand vient le temps aux acheteurs de négocier le prêt hypothécaire, le prêteur exige d’avoir des assurances. Et là, ça bogue. Les assureurs se désistent tous.

Une citation de André Lemieux

Selon M. Lemieux, une seule compagnie d’assurance aurait accepté de couvrir l’acheteur, mais ce dernier devait débourser entre 4600 $ et 12 000 $ pour une protection très partielle, seulement contre les incendies et le vol.

La maison en briques jaunes aux nombreuses fenêtres et lucarnes a déjà été une école.

La maison patrimoniale d'André Lemieux est située en plein cœur de la ville de Québec, dans le quartier Limoilou.

Photo : Radio-Canada / Martin Brunette

L'organisme Amis et propriétaires de maisons anciennes du Québec (APMAQ) reçoit chaque année une centaine d’appels de ses membres qui ont de la difficulté à assurer leur propriété. Selon son porte-parole, Claude Michaud, les assureurs ne se donnent même pas la peine d’évaluer convenablement le risque que peut représenter une propriété, dans le but de proposer une prime qui est en relation avec le risque encouru.

Gérard Beaudet, qui enseigne à la Faculté de l’aménagement de l’Université de Montréal, abonde dans le même sens. Selon lui, il existe une profonde méconnaissance des bâtiments anciens et la réalité quant à leur restauration.

Portrait de Gérard Beaudet.

Gérard Beaudet est professeur titulaire à la Faculté de l'aménagement de l'Université de Montréal.

Photo : Radio-Canada / Martin Brunette

On base l’analyse du risque sur les pires situations, comme un bâtiment exceptionnel qui est massivement détruit par un sinistre et qu’on va être obligés de reconstruire selon les techniques traditionnelles de l’époque. On sait pertinemment que ces cas-là sont quand même plutôt rarissimes.

Une citation de Gérard Beaudet

Le Bureau d’assurance du Canada, le BAC, nous indique de son côté que la difficulté d’assurer des maisons anciennes n’est pas un problème généralisé. Mais sa porte-parole, Line Crevier, reconnaît que les membres du BAC ont une certaine réticence à les couvrir. Les assureurs, selon elle, vendent un service de règlement aux clients. Et s’ils doutent qu’ils rendront un service adéquat, ils vont parfois préférer ne pas offrir l’assurance.

Claude Michaud, de l’APMAQ, sonne l’alarme et croit qu’il s’agit d’une réelle menace pour le patrimoine immobilier, si les assureurs refusent de couvrir les propriétaires de maisons anciennes ou leur imposent des primes disproportionnées.

Claude Michaud des Amis et propriétaires de maisons anciennes du Québec dans sa maison en pierres construite au 18e siècle.

Claude Michaud est responsable du dossier des assurances à l'organisme Amis et propriétaires de maisons anciennes du Québec.

Photo : Radio-Canada / Martin Brunette

La protection du patrimoine immobilier relève du ministère de la Culture et des Communications. Puisque les pressions effectuées auprès des assureurs ne semblent pas fonctionner jusqu’ici, Gérard Beaudet suggère que l’État crée une assurance publique collective, un peu comme l’assurance récolte qui existe dans le secteur agricole.

Les assurances (privées) couvrent l’ordinaire de la protection d’un bâtiment en cas de sinistre et la part du risque patrimonial serait assurée par l’État. C’est au nom du bien commun.

Une citation de Gérard Beaudet

Des dizaines de MRC et de municipalités demandent au ministre de la Culture et des Communications, Mathieu Lacombe, d’agir. Dans une très courte entrevue, le nouveau ministre nous dit que le patrimoine immobilier devient l’une de ses priorités.

Mathieu Lacombe en entrevue à Radio-Canada.

Le ministre Mathieu Lacombe fera du patrimoine immobilier une de ses priorités. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada

C’est complexe parce que ça relève de l'entreprise privée. Il y a déjà des discussions avec le Bureau d’assurance du Canada que j’aimerais peut-être voir un peu plus intensifiées. Et c’est entre autres là-dessus qu’on va travailler au cours des prochains mois.

Une citation de Mathieu Lacombe

Pour André Lemieux, il est clair que le ministre Lacombe doit agir, et vite…

Tant que le gouvernement ne bougera pas, ça va être difficile pour tout le monde, autant pour les acheteurs que pour les vendeurs.

Une citation de André Lemieux

Le reportage d'Yvan Lamontagne et de Claude Laflamme est diffusé à La facture le mardi à 19 h 30 et le samedi à 12 h 30 à ICI Télé.

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