Des locataires au Nouveau-Brunswick choqués d’une hausse de loyer de 100 %
Les avis sont arrivés juste après la levée, le 1er janvier, du plafond des hausses de loyer.

Le loyer d'Angela Vautour va augmenter de près de 85 %.
Photo : Radio-Canada
Depuis le 1er janvier, le gouvernement du Nouveau-Brunswick ne limite plus les hausses du loyer des locataires de la province.
Il n’a fallu que quelques jours après l’abolition de ce plafond pour qu’une locataire de Beaurivage, dans le comté de Kent, soit avertie par son propriétaire que son loyer allait bientôt augmenter de près de 85 %.
Le cap [plafond] a été enlevé le 31 décembre, puis j'ai eu ma lettre le 11 janvier
, dit cette résidente, Angela Vautour, ancienne députée fédérale du Parti conservateur.
Elle paie un loyer de 622 $ par mois en ce moment. Le propriétaire l’informe qu’elle va devoir payer 1150 $ par mois à partir de novembre.
« Je sais qu'on n'est pas les seules, mais faut que quelqu'un parle. »
Mon augmentation à moi sera une augmentation de 85 %. Et mes voisines, parce qu’elles payaient déjà moins que moi, ça leur donne une augmentation d'environ 102 %, ce qui ne fait pas de sens du tout. Il n’y a pas de logique
, déclare Mme Vautour.
Le logement n’est pas chauffé. L'hiver, je paie 350 piastres par mois
, dit-elle.
Depuis bientôt six ans, Angela Vautour vit dans son appartement à Beaurivage, qui est le nom d’une des nouvelles municipalités créées par les fusions au début du mois.
L'ancien propriétaire, note-t-elle, comprenait que les personnes qui vivaient ici – et dont la majorité sont encore ici – sont toutes des personnes à revenu fixe, à bas revenu
.
Un nouveau propriétaire qui habite dans l’Ouest canadien a acheté l'immeuble l'année dernière. Notre argent, ça s'en va en Colombie-Britannique. Ça n'aide même pas l'économie du Nouveau-Brunswick
, souligne Mme Vautour.
C’est tout le fardeau qui est sur les locataires
Angela Vautour et ses voisines, dont une est âgée de 74 ans, sont bien décidées à contester la hausse devant le Tribunal sur la location de locaux d'habitation, mais rien ne garantit qu’elles auront gain de cause.
Si les lois étaient bien pensées, affirme Mme Vautour, elles devraient plutôt exiger que les propriétaires s'adressent au tribunal pour demander et justifier les augmentations qu'ils souhaitent.
Oui, on va mettre des plaintes au tribunal, mais c’est tout le fardeau qui est sur les locataires
, dit Mme Vautour. C’est le seul recours, sinon la majorité va être obligée de sortir
.
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En décembre, la ministre du Logement, Jill Green, a affirmé qu'elle allait déposer au printemps une modification à la Loi sur la location de locaux d'habitation, pour obliger les propriétaires à justifier des augmentations qui dépasseraient une certaine limite.
Angela Vautour concède que l’acheteur de l’édifice a fait réparer la toiture. On est un petit village
, affirme-t-elle cependant. On a beaucoup de personnes âgées. Il n'y a rien qui justifie le montant qu'il demande.
Déjà, la nouvelle chamboule l’existence des locataires, clame Mme Vautour, qui est la plus jeune résidente de l’immeuble. J'ai une voisine, son hypertension est montée et le médecin a déjà été obligé d'augmenter ses médicaments
, dit-elle.
Le champ libre à la recherche des profits
Selon Angela Vautour, les raisons pour lesquelles des hausses de loyer aussi brutales sont généralisées dans la province sont, d’une part, la cupidité
, et d’autre part le fait que le Nouveau-Brunswick encourage ce phénomène en laissant le champ libre aux acheteurs.
Le monsieur ne vit pas au Nouveau-Brunswick. Quand il a acheté l'édifice, il savait qu'il n'y en avait pas, de règlements
, suppose-t-elle.
Des propriétaires sont hors de contrôle, poursuit la locataire, parce qu'il n'y a aucune mesure pour les réglementer.
Une de mes voisines disait hier : "J'ai payé toute ma vie pour rester au Nouveau-Brunswick. Rendue à 74 ans, je n'ai plus de place où rester". Ç'a n'a pas de sens quand on a un gouvernement qui peut mettre une loi qui va nous protéger
, dit-elle.
On a déjà beaucoup de souffrance avec le coût de la vie. On est passé à travers une pandémie qui était très stressante. Puis M. Higgs choisit de ne pas prendre les actions nécessaires pour protéger son peuple
, dit Angela Vautour, en parlant du premier ministre progressiste-conservateur Blaine Higgs, dont le gouvernement a refusé de prolonger le plafonnement des loyers en 2023. Ce n’est juste pas acceptable.
Angela Vautour a été députée fédérale de Beauséjour—Petitcodiac jusqu’en 2000. Élue en 1997 sous la bannière du NPD
, elle avait terminé son mandat en tant que membre du Parti progressiste-conservateur fédéral (aujourd'hui disparu) qu’elle avait rejoint en 1999. Candidate du Parti conservateur actuel dans Beauséjour, elle avait terminé deuxième à l’élection fédérale de 2004.Aujourd’hui à la retraite, Mme Vautour interpelle les élus actuels. Elle dénonce la manière dont le premier ministre du Nouveau-Brunswick, Blaine Higgs, et sa ministre responsable du Logement, Jill Green, gèrent la crise du logement qui persiste dans la province.
Un logement, c’est un droit, ce n’est pas un privilège
, martèle Angela Vautour. Il faut qu'ils comprennent ça et il faut qu'ils nous redonnent un cap pour nous protéger.
Je sais qu'on n'est pas les seules, mais faut que quelqu'un parle.
D’après le reportage de Babatundé Lawani