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Que fera l’Ontario avec les revenus de sa nouvelle taxe carbone pour les industries?

Le gouvernement Ford prévoit que sa taxe générera 2,2 milliards $ au cours des 8 prochaines années.

Doug Ford.

Le premier ministre Doug Ford a annoncé en novembre que son gouvernement prolongerait la réduction de 5,7 cents le litre de la taxe provinciale sur l'essence jusqu'en 2023. Entre-temps, l'Ontario est sur le point de percevoir 131 millions $ en tarification du carbone auprès des grands émetteurs.

Photo :  CBC News / Robert Krbavac

Radio-Canada

Le gouvernement de Doug Ford prévoit de récolter plus de 2 milliards de dollars au cours des huit prochaines années grâce à une taxe sur le carbone imposée aux émetteurs industriels, a appris CBC News.

L'Ontario n'a pas encore expliqué à quoi serviront les revenus de ce nouveau programme pour encourager la réduction des émissions. C'est pourquoi des lobbyistes d'entreprises et des groupes environnementaux demandent à la province de clarifier ses intentions.

La province doit commencer prochainement à percevoir ce qu'elle appelle des « paiements de conformité » auprès des plus grands producteurs industriels d'émissions de gaz à effet de serre. Il s'agit notamment des constructeurs automobiles, des aciéries, des cimenteries, des usines chimiques et des raffineries de pétrole.

L'arrivée du programme provincial doit permettre de remplacer le programme fédéral de tarification du carbone industriel, qui avait été imposé par Ottawa en 2019. Le gouvernement Trudeau avait mis en place le programme lorsque le gouvernement Ford avait décidé de sortir la province du marché du carbone.

Des chiffres communiqués à CBC News par le gouvernement Ford montrent que la province prévoit percevoir 131 millions de dollars en paiements de conformité en 2023, avec des revenus totaux annuels qui devraient grimper à 446 millions de dollars d'ici 2030.

Une question demeure : que fera le gouvernement Ford avec cet argent?

Des bobines d'acier dans un environnement industriel.

Les trois plus grands émetteurs industriels de CO2 en Ontario sont des aciéries. Sur la photo, des bobines d'acier dans l'usine d'Algoma Steel de Sault-Sainte-Marie.

Photo : La Presse canadienne / Justin Tang

Un incitatif pour l'industrie?

« Nous développons une approche pour l'utilisation des recettes obtenues dans le cadre du programme », a indiqué dans un courriel le porte-parole du ministère de l'Environnement, de la Protection de la nature et des Parcs de l'Ontario, Gary Wheeler.

Les entreprises et les environnementalistes ont déjà tous leur avis sur l'approche à prendre pour dépenses les revenus.

Le président et chef de la direction de Manufacturiers et exportateurs du Canada, Dennis Darby, croit que le gouvernement devrait remettre l'argent aux industries de manière à les aider à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES).

« Je pense que l'Ontario a une opportunité, explique-t-il. S'ils le font correctement, cela peut être bénéfique pour l'industrie, mais aussi bénéfique pour l'environnement. »

Pour que les industries se décarbonent, Dennis Darby estime que les gouvernements doivent non seulement montrer le bâton de la tarification du carbone, mais aussi la carotte du financement des technologies vertes.

« Je pense que nous avons une occasion en ce moment de le faire d'une manière qui mènera finalement au résultat espéré, c'est-à-dire aider les entreprises à améliorer leur performance en matière de GES », souligne Dennis Darby.

Le premier ministre Ford et son gouvernement s'opposent à toute forme de tarification du carbone depuis leur arrivée au pouvoir en 2018. Mais la Cour suprême du Canada a confirmé la loi fédérale sur la tarification du carbone, ce qui fait en sorte que les provinces sont confrontées à un choix : mettre un prix sur les émissions (et percevoir les revenus) ou encore laisser Ottawa imposer le sien et ne pas avoir de contrôle sur les revenus.

C'est ce qui se passe avec la taxe sur le carbone qui a le plus suscité de débat : celle imposée à la pompe. Le gouvernement Trudeau a perçu ces revenus en Ontario, en Alberta, en Saskatchewan et au Manitoba et les a redistribués aux contribuables de ces provinces par le biais de remboursements d'impôt sur le revenu.

La taxe imposée sur les carburants en Ontario continuera d'être gérée par Ottawa, mais la province prend en charge la perception des frais pour les émissions de CO2 des grands producteurs industriels. Les prix ont déjà été fixés par Ottawa : 65 $ la tonne pour cette année, et la taxe augmentera de 15 $ chaque année, pour atteindre 170 $ la tonne en 2030.

Depuis plus d'un an, la Chambre de commerce de l'Ontario fait pression sur le gouvernement Ford afin qu'il clarifie ses intentions pour l'utilisation des revenus.

La directrice principale des politiques de la Chambre, Claudia Dessanti, a d'ailleurs rédigé un rapport en 2021 appelant la province à consulter les industries concernées sur la façon de dépenser l'argent.

« Les entreprises veulent réduire leurs émissions, souligne Claudia Dessanti. Pour beaucoup d'entre elles, l'incertitude sur les coûts et le retour sur investissement est un obstacle majeur. Plus le gouvernement fera preuve de transparence, mieux ce sera. »

Claudia Dessanti croit que la meilleure utilisation des revenus serait de redonner de l'argent aux industries qui ont le plus de difficulté à réduire leurs GES afin qu'elles investissent dans des technologies à faible émission.

« Les technologies existent, mais souvent les compagnies n'ont pas le capital pour se les payer, ou elles ne savent pas si le retour sur investissement est là », explique-t-elle.

Trois sites industriels superposés dans une image.

Algoma Steel, Arcelor Mittal et Imperial Oil font partie des industries les plus polluantes en Ontario.

Photo : Radio-Canada / Camile Gauthier

Les revenus de la tarification du carbone que le gouvernement fédéral a perçus depuis 2019 auprès des industries en Ontario servent à financer des projets de technologies propres pour aider les industries de la province à réduire leurs émissions.

Les données du fédéral indiquent qu'Ottawa a collecté 85,3 millions $ auprès des industries ontariennes en 2019 et 117,2 millions $ en 2020 grâce à son programme, baptisé le Système de tarification fondé sur le rendement.

L'équivalent ontarien est appelé le Programme des normes de rendement à l’égard des émissions. Dans des documents publiés dans la deuxième moitié de 2022, la province indique que son programme permettra aux grands émetteurs d'économiser plus d'un milliard de dollars d'ici 2030 par rapport au système fédéral. Or, le gouvernement provincial n'a pas publié le détail de ses projections.

Justin Trudeau et Doug Ford.

Les gouvernements fédéral et provincial ont tous deux annoncé des investissements de centaines de millions de dollars pour soutenir la production de véhicules électriques et hybrides en Ontario, y compris dans cette usine Honda à Alliston, en Ontario.

Photo : La Presse canadienne / Chris Young

Que pensent les groupes environnementaux?

Les groupes environnementaux suivent la situation de près. L'Institut Pembina est d'avis que le gouvernement devrait investir dans des technologies émergentes, comme la production de ciment à faibles émissions.

« Les revenus de la tarification du carbone devraient être consacrés à des initiatives d'économie propre », pense l'analyste principal au sein de l'organisme, Jason Wang.

« La transition énergétique va nécessiter des milliards de dollars d'investissements privés, donc tout ce que le gouvernement peut faire pour encourager ces investissements est une bonne chose », ajoute-t-il.

Environmental Defence croit aussi que la province devrait fournir un financement pour les technologies propres, notamment pour aider les entreprises à s'électrifier. L'organisme s'oppose cependant à tout financement offert aux entreprises de combustibles fossiles.

« La meilleure utilisation des revenus serait de les investir dans des projets d'énergie renouvelable comme l'énergie éolienne et solaire pour s'assurer que l'Ontario remplace les nombreuses centrales à gaz qui sont actuellement utilisées pour produire de l'électricité », explique la gestionnaire du programme climatique, Lana Goldberg.

D'après les informations de Mike Crawley, de CBC

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