Une cheffe wolastoqey prédit une expiration « chaotique » de l’accord fiscal
Le complexe Grey Rock est un important moteur économique pour la Première Nation malécite du Madawaska. (Archives)
Photo : Radio-Canada / Bernard Lebel
La Première Nation malécite du Madawaska compte mettre en place sa propre loi fiscale qui pourrait mener à la vente de produits de tabac et de cannabis « beaucoup moins cher ».
Le gouvernement Higgs et une communauté Wolastoqey se dirigent vers une possible confrontation à la fin du mois lorsque l’accord sur la taxe de vente au détail doit prendre fin.
La fin de cet accord signifie l’arrêt complet du partage des revenus avec la province
et la possible création d’une nouvelle loi fiscale pour la communauté, selon la cheffe de la Première Nation malécite du Madawaska, Patricia Bernard.
Elle explique que sa communauté travaille sur sa propre réglementation fiscale qui mènerait à la vente de produits beaucoup moins chers
comme le tabac et le cannabis et peut être l’essence par les entreprises basées dans la réserve.
La Première Nation laisserait les entreprises non autochtones louer des terres de la réserve et payer les impôts fédéraux et provinciaux. Les commerces autochtones paieraient un impôt fixé par la communauté.
95 % des revenus reversés aux communautés autochtones
Pour Patricia Bernard, ce changement radical est le résultat de la décision du premier ministre Blaine Higgs d’annuler le partage des impôts de Premières Nations en avril 2021.
« Ils ne réfléchissent pas aux conséquences. Ça va être chaotique. Il va y avoir de la confusion. Les consommateurs ne vont pas savoir que faire, les entreprises vont être frustrées. »
L’accord, qui date de 1994 et a été renouvelé en 2017, a nourri la croissance économique de certaines communautés autochtones.
Actuellement, les communautés collectent aux entreprises les mêmes taxes provinciales qu’en dehors des collectivités. Mais en vertu de l’accord, la province reverse ensuite 95 % de ces revenus aux Premières Nations, et ce jusqu’à hauteur de 8 millions de dollars. Au-delà de ce montant, la province remet 70 % des revenus.
Selon Blaine Higgs, l’accord est injuste et insoutenable
et a créé un système fiscal à deux vitesses
qui viole le principe selon lequel tous les Canadiens paient pour des programmes qui bénéficient à tous. Il estime que l’accord prive les écoles, les hôpitaux et d’autres services publics de financement.
Pour le premier ministre, il est injuste que la Première Nation malécite du Madawaska touche 40 % des recettes issues de l’accord fiscal alors que la communauté ne représente que 2 % de la population autochtone de la province.
Le gouvernement « n'étendra pas l'accord »
La cheffe wolastoqey se prépare déjà à ce qu’Ottawa et Fredericton puissent lancer des actions en justice. C’est possible que l’Agence de revenu du Canada ou la province ne soient pas d’accord. Mais nous sommes prêts à nous battre
, dit Patricia Bernard.
En 2016, la Cour suprême du Canada avait refusé un appel d’un jugement québécois qui affirmait que le gouvernement peut forcer les stations d'essence des Premières Nations à percevoir des taxes de vente et à les reverser au gouvernement.
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Contacté par CBC, le gouvernement provincial a transmis une lettre de la ministre des Affaires autochtones datée du 15 décembre et envoyée à 6 chefs wolastoqey. La ministre Arlene Dunn y écrit qu’elle souhaite une résolution complète
de la question d’ici le 31 janvier. Elle propose des accords comprenant le financement pour le logement, la santé, les services sociaux et l’éducation.
Arlene Dunn explique dans cette lettre que les efforts de la province pour négocier ont été reçus de manière différente
selon les communautés. Certaines ont eu des discussions limitées
avec la province. Les Premières Nations du Madawaska et de Woodstock ont refusé d’y participer
et souhaitaient seulement discuter d’un nouvel accord ou d'une extension de l’ancien.
La ministre assure dans sa lettre que le gouvernement n'étendra pas l’accord fiscal wolastoqey qui prendra fin le 31 janvier
.
D'après un reportage de Jacques Poitras, de CBC