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Les grands PDG canadiens ont déjà gagné l’équivalent de votre salaire annuel

Au Canada, les grands PDG gagnent 243 fois plus que le travailleur moyen.

Un homme d'affaires regarde par la fenêtre de son bureau.

Les grands PDG gagnent 243 fois plus que le travailleur moyen, selon une étude du Centre canadien de politiques alternatives.

Photo : iStock

En moins d’une heure de travail (et un congé férié payé), les PDG des plus grandes entreprises canadiennes auront déjà gagné votre salaire annuel en 2023, selon une étude du Centre canadien de politiques alternatives.

Les PDG les mieux payés ont déjà empoché 58 800 $, soit ce qu’un travailleur moyen gagne en une année, affirme David Macdonald, économiste principal au sein de l’institut de recherche indépendant.

Ce montant est réalisé au cours du congé férié lundi et dans les 43 premières minutes de travail mardi, précise-t-il.

Chaque année, son équipe décortique la rémunération des 100 chefs d’entreprises les mieux payés, parmi les sociétés cotées en bourse à Toronto. En 2021, ces PDG ont gagné en moyenne 14,3 millions de dollars, ce qui fracasse le record établi en 2018 (11,8 millions).

Les PDG gagnent 243 fois plus que le travailleur moyen au Canada.

Une citation de David Macdonald, économiste principal, Centre canadien de politiques alternatives

L’économiste montre du doigt l’inflation galopante au pays, qui a commencé à s’emballer en 2021 dans la foulée d’importantes perturbations aux chaînes d’approvisionnement durant la pandémie. L’an dernier, l’invasion russe en Ukraine a exacerbé la hausse des prix de l’énergie et des aliments.

Bien que cette inflation fasse mal au portefeuille des Canadiens, elle a l’effet contraire pour les hauts dirigeants, souligne M. Macdonald. L'inflation a augmenté les profits des entreprises et les primes des PDG sont liées à ces profits-là, dit-il.

David Macdonald, du Centre canadien de politiques alternatives, devant ses écrans d'ordinateur.

David Macdonald, économiste principal au Centre canadien de politiques alternatives

Photo : Radio-Canada / Toni Choueiri

L’économiste souligne par ailleurs que ces primes représentaient 83 % de la rémunération des PDG les mieux payés en 2021, contre 69 % en 2008.

Tobias Lütke, chef de la direction de Shopify, par exemple, a touché un salaire symbolique de 1$  en 2021. La quasi-totalité de sa rémunération (25,1 millions) provenait d’options d’achat d’actions.

C’était le cas aussi du président exécutif de Canadian Natural Resources, N. Murray Edwards, qui a empoché 1 $ en salaire cette année-là, en plus de primes et d’autres compensations totalisant plus de 16,1 millions.

Parmi les 100 PDG analysés, il n'y a d'ailleurs que trois femmes, soit Linda Hasenfratz de Linamar, Ann Fandozzi de Ritchie Bros., et Dawn Farrell de Trans Mountain. La diversité au sein des équipes de direction est encore atrocement absente. Il reste encore bien du chemin à faire, affirme David Macdonald.

Des rémunérations justifiées, croit un expert

Ian Lee, professeur associé à la Sprott School of Business de l'Université Carleton, estime que les chefs d’entreprises méritent pleinement leur rémunération, bien qu’elle puisse sembler faramineuse pour le commun des mortels.

Les salaires et les primes sont très élevés parce que les attentes sont très élevées, affirme-t-il. Dès que vous ne répondez plus aux attentes, on vous montre la porte.

Portrait d'Ian Lee.

Le professeur associé à la Sprott School of Business de l'Université Carleton, Ian Lee

Photo : Radio-Canada / Alexander Behne

C’est une question d’offre et de demande, indique M. Lee. Comme dans le sport de haut niveau, le bassin de candidats est extrêmement limité et les compagnies les plus performantes s’arrachent les meilleurs talents.

Dans le marché des superstars, l’offre est très mince.

Une citation de Ian Lee, professeur associé, Sprott School of Business, Université Carleton

Donna Hokiro, présidente de la section locale au syndicat des Métallos qui représente 6800 employés de Telus, est en pleine renégociation de la convention collective. Elle s’indigne que les salaires de ses membres perdent du terrain en raison du taux d’inflation élevé.

Pendant ce temps, le PDG du géant des télécommunications, Darren Entwistle, figure parmi les chefs d’entreprises les mieux rémunérés. Il a empoché 19,8 millions de dollars en 2021.

Telus engrange des profits de plus en plus élevés, de trimestre en trimestre, et le PDG et son équipe de direction voient leur part du gâteau gonfler bien au-delà de l’inflation, affirme Mme Hokiro.

Un édifice de Telus.

La présidente syndicale Donna Hokiro estime que les travailleurs de Telus ne reçoivent pas leur juste part, alors que l'entreprise voit ses profits grimper ces dernières années.

Photo : (Frank Gunn/The Canadian Press)

La représentante syndicale dit comprendre que la rémunération des dirigeants soit accordée en fonction de la performance de l’entreprise, mais elle croit que les employés ne reçoivent pas leur juste part.

Si ce n’était pas des travailleurs, l’entreprise ne roulerait pas, dit-elle.

Taxer davantage les plus riches, une solution?

Le rapport du Centre canadien de politiques alternatives recommande d'instaurer une panoplie de mesures fiscales afin de réduire l’écart entre les plus nantis et la classe ouvrière.

Il propose d’implanter un seuil pour les déductions d’impôts corporatifs liées à la rémunération, comme aux États-Unis, où les sociétés cotées en bourse ne peuvent pas déduire tout montant excédant 1 million de dollars. Au Canada, actuellement, les sociétés peuvent déduire tous les salaires bruts et autres avantages payés à leurs employés.

Selon les estimations du CCPA, instaurer ce seuil aux 100 entreprises dont les PDG figurent dans la liste des mieux payés aurait permis à Ottawa de récolter 199 millions de plus.

Un crayon sur un formulaire imprimé d'une déclaration de revenus de l'Agence du revenu du Canada.

Le rapport propose notamment d'ajouter des tranches de revenu qui seraient imposées plus lourdement et d'instaurer un impôt sur la fortune.

Photo : iStock

Le rapport suggère aussi d’imposer l’ensemble des gains en capital, c’est-à-dire le profit réalisé lors de la vente d'un bien, tel qu’une action, une obligation ou une résidence secondaire.

Seulement la moitié (50 %) de ces gains sont imposés actuellement, ce qui est très avantageux pour ces PDG qui sont payés majoritairement en actions ou en options, souligne l’économiste David Macdonald.

Il propose également d’instaurer un impôt sur la fortune et d’ajouter des tranches de revenus qui seraient imposées plus lourdement.

Le professeur de gestion Ian Lee, de l’Université Carleton, estime que l’impôt progressif est le meilleur moyen de s’attaquer à l’écart entre les plus riches et la classe moyenne. Mais ajouter trop d’impôts risque de provoquer une fuite des cerveaux, dit-il.

Les impôts sur le revenu des particuliers et des entreprises sont déjà plus élevés au Canada qu’aux États-Unis. Ces gens et ces compagnies peuvent choisir de partir n’importe quand, avertit M. Lee.

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